La présidente du Liberia, Ellen Johnson Sirleaf, a annoncé jeudi la levée de l'état d'urgence instauré en août pour lutter contre l'épidémie d'Ebola, prévenant néanmoins que «le combat n'était pas terminé».

«J'ai informé les dirigeants de l'Assemblée nationale que je ne demanderais pas une prolongation de l'état d'urgence» décrété le 6 août, a annoncé Mme Sirleaf dans une déclaration diffusée à la radio et à la télévision, ajoutant que le couvre-feu nocturne était repoussé d'une heure, de minuit (heure locale et GMT) à 6 h. Avec plus de la moitié des quelque 5100 morts de l'épidémie en Afrique de l'Ouest, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le Liberia est le pays le plus touché, mais la propagation du virus s'y est nettement ralentie depuis environ un mois.

La fin de l'état d'urgence «ne signifie pas que le combat contre Ebola est terminé», a indiqué Mme Sirleaf.

«Alors que le virus avançait, représentant un danger manifeste pour notre État, nos voisins et le reste du monde, nous avons été obligés de déclarer l'état d'urgence. Nous nous sommes mobilisés, nous avons fait appel au monde. Nos citoyens et le monde ont répondu. Aujourd'hui, nous pouvons tous être fiers des progrès», a-t-elle expliqué.

«Nous ne pouvons pas baisser notre garde ni réduire notre vigilance», a-t-elle insisté, précisant que les marchés et les écoles rouvriraient progressivement.

Mme Sirleaf a souligné que le Liberia «avait réagi fermement» en fermant les frontières, décrétant couvre-feu et quarantaines, en fermant les écoles et en restreignant les rassemblements publics».

Une réunion du Parlement était prévue pour discuter d'une éventuelle prolongation de l'état d'urgence, dont la durée avait été fixée à trois mois, avant l'annonce de la présidente.

Premiers essais en Afrique de trois traitements

Les premiers essais de trois traitements cliniques de la fièvre hémorragique Ebola vont commencer dans des centres de soins en Guinée et éventuellement au Liberia avec l'espoir de trouver un traitement pour cette épidémie qui a fait plus de 5000 morts en Afrique de l'Ouest.

En l'absence de traitement spécifique de cette épidémie, ces essais vont commencer en décembre et leurs résultats pourraient être disponibles dès février 2015, a précisé l'ONG dans un communiqué.

«C'est un partenariat international sans précédent qui représente un espoir pour les malades d'obtenir enfin un vrai traitement d'une maladie qui tue aujourd'hui entre 50 et 80 % de ceux qui sont infectés», a souligné la Dre Annick Antierens, qui coordonne les essais pour MSF.

Un essai placé sous l'autorité de l'Université d'Oxford avec le médicament antiviral brincidofovir dans le centre ELWA 3 de Monrovia, la capitale du Libéria, est prévu, mais MSF attend toujours l'accord des autorités locales, a précisé la docteure. 

Deux autres tests sont prévus en Guinée, l'un sous l'autorité de l'INSERM (l'Institut français pour la santé et la recherche médicale) utilisant le médicament antiviral favipiravir à Guéckédou, et l'autre de l'Institut de médecine tropicale d'Antwerp(IMT) utilisant une thérapie à base de sang et de plasma de convalescents à Conakry, la capitale.

L'Organisation mondiale de la santé est associée à ces essais. Son dernier bilan diffusé mercredi fait état de 5160 décès sur 14 098 cas.

«En tant qu'un des principaux opérateurs de soins engagés en Afrique de l'Ouest, MSF participe à ces tests cliniques accélérés pour donner à ceux qui sont contaminés une plus grande chance de survivre», a dit la Dre Antierens.

Les protocoles de ces essais sont en phase finale de développement et ont été conçus avec un objectif de survie à au moins 14 jours après avoir développé la maladie.

Les deux médicaments, le brincidofovir et le favipiravir, ont été sélectionnés dans la liste des traitements potentiels contre l'Ebola retenus par l'OMS, après un examen attentif des profils d'innocuité et d'efficacité, de la disponibilité des produits, et de la facilité d'administration aux patients.

« Mener des études cliniques sur des médicaments expérimentaux au coeur d'une crise humanitaire est une nouvelle expérience pour nous tous, mais nous sommes déterminés à ne pas décevoir les populations d'Afrique de l'Ouest», a déclaré le professeur Peter Horby, investigateur principal de l'essai mené par l'ISARIC d'Oxford (Consortium international des infections respiratoires aigües sévères et émergentes).

L'essai clinique sur le traitement par sang total ou plasma convalescent consistera à administrer du sang ou du plasma contenant des anticorps de survivants aux patients infectés. Cette approche a également été mise en avant par l'OMS.

«Le plasma convalescent de patients guéris, qui contient des anticorps contre un agent pathogène, a déjà été utilisé en toute sécurité pour d'autres maladies infectieuses», explique Johan vanGriensven, coordinateur de la recherche menée par l'IMT. «Nous voulons savoir s'il fonctionne pour l'Ebola, s'il est sûr et s'il serait possible d'élargir son utilisation pour réduire le nombre de décès. Une bonne communication avec les personnes ayant survécu à l'Ebola, et avec toute la communauté, est cruciale pour le succès de cet essai. Nous espérons que le don de sang par les survivants pour aider les malades aidera à réduire la peur et la stigmatisation auxquelles les personnes guéries font face».

Le G20 appelé à se mobiliser

Plusieurs professionnels de santé d'Afrique de l'Ouest ainsi que l'ONG OXFAM ont appelé jeudi les pays du G20 à renforcer leur aide pour endiguer l'épidémie d'Ebola, évoquant de graves insuffisances de moyens.

La lutte contre la propagation du virus sera l'un des sujets abordés ce week-end par les chefs d'État et de gouvernement du G20, réunis en sommet à Brisbane.

L'ONG OXFAM a estimé jeudi que «presque la moitié» des pays du G20 n'avaient pas fourni «leur part» en terme de participation financière à la lutte contre l'Ebola.

«Si le G20 veut remplir son rôle de protecteur de l'économie mondiale, il ne peut pas se permettre de laisser une région entière être déstabilisée. (...) Le G20 doit se demander comment répondre aux besoins immédiats en terme d'urgence, et aux facteurs de reprise à long terme», a insisté l'ONG dans un communiqué.

Les États-Unis ont appelé le Fonds monétaire international (FMI) à effacer près d'un cinquième de la dette de la Guinée, le Liberia et la Sierra Leone.

La Banque mondiale - selon le Financial Times - devrait profiter du sommet du G20 pour défendre son projet de création d'un «fonds d'urgence» destiné à mieux contrer les prochaines pandémies.

-Avec Pierre Taillefer