La justice haïtienne envisageait lundi des poursuites contre les dix Américains impliqués dans un trafic d'enfants, alors que les Etats-Unis ont repris les vols sanitaires vers des hôpitaux américains, interrompus après une polémique sur la prise en charge financière.

Le procureur de Port-au-Prince Mazar Fortil a annoncé que des poursuites pour «trafic d'enfants, enlèvement de mineurs et association de malfaiteurs», étaient à l'étude contre les dix Américains qui ont tenté de faire passer la frontière à une trentaine d'enfants.

Interrogé sur la possibilité qu'ils soient jugés aux Etats-Unis, M. Fortil a répondu: «il est prématuré de le dire».

De fait, l'organisation d'un éventuel procès en Haïti pourrait être problématique: comme la plupart des composantes de l'Etat haïtien, les moyens de la Justice ont été réduits à néant par le séisme du 12 janvier qui a fait au moins 170 000 morts.

Le consul général des Etats-Unis en Haïti Donald Moore, dont les services ont pu rencontrer lundi les dix Américains, a indiqué que c'était «au gouvernement haïtien de décider de leur sort devant la justice».

A Washington, le porte-parole du département d'Etat Philip Crowley a indiqué de son côté que ses compatriotes étaient «bien traités», évoquant un «accès consulaire illimité».

Les dix ressortissants américains, des baptistes membres d'une association caritative appelée «Le refuge pour une nouvelle vie des enfants», basée dans l'Idaho (nord-ouest des Etats-Unis), ont été interpellés vendredi près de la frontière dominicaine, en compagnie de 33 enfants de 2 mois à 14 ans.

Ils sont accusés par Port-au-Prince d'avoir «volé» les enfants à la faveur du séisme du 12 janvier. L'affaire rappelle celle de «l'Arche de Zoé» en 2007 entre la France et le Tchad.

La porte-parole du groupe des Américains, Laura Silsby, a déclaré à l'AFP qu'ils n'étaient «venus que pour aider les enfants» et avaient «de bonnes intentions».

De nombreux enfants ont été adoptés depuis le tremblement de terre qui a dévasté Haïti.

Les Etats-Unis ont annoncé la reprise des vols sanitaires évacuant vers des hôpitaux américains les Haïtiens grièvement blessés.

Ces vols avaient été suspendus dans l'attente d'une décision sur la prise en charge financière des soins. Des Etats comme la Floride avaient demandé au gouvernement fédéral de prendre en charge une partie des coûts, ce que Washington a accepté de faire.

Près de trois semaines après la catastrophe, le gouvernement haïtien a décidé lundi de reconduire pendant 15 jours l'état d'urgence dans le pays.

Dans certains endroits, la distribution de l'aide est entravée par les violences. Selon un colonel américain, les gangs du bidonville de Cité Soleil «utilisent l'intimidation et tentent de recourir à la force pour saper les efforts en vue de la distribution d'aide».

Du côté du déploiement militaire, les Etats-Unis semblaient commencer à alléger leur présence. Le Commandement Sud américain (Southcom) a annoncé lundi le départ du porte-avion USS Carl Vinson après deux semaines sur place.

Dix hélicoptères du Vinson resteront toutefois pour distribuer l'aide aux victimes du séisme.

Les Haïtiens continuaient par ailleurs de pleurer les victimes du séisme. Lundi matin à Port-au-Prince, à proximité de la fosse commune de Titanyen, 42 adolescents ont entonné, a capella, un chant mélancolique à la mémoire de ceux qui ont disparu.

«Jusqu'alors, je n'ai pas eu le temps d'honorer la mémoire de mes camarades de classes disparus», a dit à l'AFP Desermithe Pierre, 16 ans, une des jeunes chanteuses.