Les condamnations se sont multipliées vendredi après la destruction par le groupe État islamique de la cité antique de Nimroud, dans le nord de l'Irak où  des combats avaient lieu aux alentours de Tikrit, une grande ville que l'armée tente de reprendre aux djihadistes.

L'EI est également sous le coup d'une contre-offensive dans l'ouest du pays, où le groupe extrémiste contrôle de larges secteurs. L'État-major américain a annoncé que les forces gouvernementales l'avait chassé de Baghdadi, ville voisine d'une base aérienne où sont stationnés des soldats américains.

Les forces irakiennes, avec 30 000 hommes mobilisés, ont lancé lundi une offensive pour reprendre Tikrit, à 160 km au nord de Bagdad. L'opération a été présentée comme «la plus massive» depuis la prise par l'EI en juin 2014 de pans entiers du territoire.

Des combats sporadiques ont eu lieu vendredi à Dour, à 20 km au sud de Tikrit, après l'entrée des forces gouvernementales dans la ville, selon un général de division de l'armée.

Le gouverneur de la province de Salaheddine, Raad al-Joubouri a affirmé que les forces irakiennes avaient repris l'artère principale de cette localité.

Dour est l'un des points par lesquels les forces irakiennes entendent encercler Tikrit, la deuxième ville la plus importante conquise en Irak par l'EI, après Mossoul, plus au nord.

Dans l'ouest, les forces gouvernementales ont repris à l'EI Al-Baghdadi, une ville à environ 8 kilomètres de la base aérienne d'Al-Assad, où 300 militaires américains entraînent les forces de sécurité irakiennes, a indiqué un communiqué de la coalition.

L'EI a également perdu le contrôle de sept villages proches, a-t-on ajouté, précisant que la coalition internationale dirigée par les États-Unis avait aidé les forces irakiennes avec des raids aériens.

«Des fous»

En dépit des pressions de plus en plus importantes que lui font subir les forces irakiennes et la coalition --qui vise aussi ses positions en Syrie voisine--, l'EI s'en est pris jeudi à Nimroud, joyau archéologique inestimable, une semaine après avoir réduit en miettes des trésors archéologiques dans le musée de Mossoul.

Des hommes ont commencé à détruire au bulldozer ce site situé à une trentaine de kilomètres au sud-est de Mossoul, selon le ministère irakien du Tourisme.

«On ignore encore l'étendue des destructions», a indiqué à l'AFP un responsable sous couvert d'anonymat.

Mais l'UNESCO a d'ores et déjà dénoncé «un crime de guerre», selon un communiqué de sa directrice générale Irina Bokova qui a saisi le Conseil de sécurité de l'ONU et la Cour pénale internationale.

Al-Azhar, l'une des plus prestigieuses institutions théologiques de l'islam sunnite, basée en Égypte, a appelé à «sauver les nations arabes et islamiques de leurs diables», alors que la reine Rania de Jordanie qualifiait l'EI de «fous qui cherchent à nous ramener aux temps médiévaux».

La Maison-Blanche a dénoncé un acte «incompréhensible».

«Sauvagerie»

L'EI justifie ces destructions en arguant que les statues favorisent l'idolâtrie. Mais selon plusieurs experts, les «idoles» si vivement dénoncées dérangent moins les djihadistes lorsqu'il s'agit de les vendre au marché noir. Ce sont les statues trop imposantes pour être transportées aisément qui sont détruites, estiment-ils.

Le grand ayatolah Ali al-Sistani, la plus haute autorité chiite de l'Irak, a estimé que ces destructions étaient la preuve «de la sauvagerie, de la barbarie et de l'hostilité (des djihadistes) pour les Irakiens», dans un prêche prononcé par un assistant à Kerbala (centre).

«Leur projet, c'est de détruire le patrimoine irakien, site par site», explique Abdelamir Hamdani, un archéologue irakien de l'université Stony Brook de New York.

«Ce va être au tour d'Hatra», a-t-il ajouté, en référence à une cité vieille de 2000 ans inscrits au patrimoine mondial de l'UNESCO située à 100 km au sud de Mossoul.

Nimroud est l'une des villes phares de l'empire assyrien, où ont été exhumés en 1988 plus de 600 bijoux, décorations et pierres précieuses, l'une des plus importantes découvertes archéologiques du XXe siècle.

La plupart des objets inestimables provenant de Nimroud sont exposés dans des musées en Irak ou en Europe, mais le site abrite toujours des bas-reliefs et de colossaux «lamassu», ces taureaux ailés à face humaine.

La communauté internationale a fermement critiqué les destructions, mais semble cantonnée au rôle d'observateur, s'est désolé Stuart Gibson, expert à l'UNESCO.

«À l'heure actuelle, les populations sont épuisées et terrifiées. Le reste d'entre nous n'a d'autre choix que (...) de regarder, désespéré», a-t-il dit.

Impuissance 

La communauté internationale a fermement critiqué les destructions, mais semble cantonnée au rôle d'observateur, se désole Stuart Gibson, expert à l'UNESCO.

«À l'heure actuelle, les populations sont épuisées et terrifiées. Le reste d'entre nous n'a d'autre choix que (...) de regarder, désespéré», commente-t-elle.

L'EI contrôle de vastes territoires en Irak et en Syrie voisine où il a déclaré un «califat» et multiplié les pires exactions, mais semble perdre du terrain sous la pression conjuguée des forces irakiennes au sol et de la coalition internationale menée par les États-Unis dans les airs.

Autour de Tikrit, au sud de Mossoul, armée, police, milices et combattants tribaux poursuivaient leur offensive pour reprendre la ville aux djihadistes. Les forces pro-gouvernmentales étaient vendredi aux prises avec les djihadistes dans la localité voisine de Dour.

Tikrit est la deuxième ville la plus importante conquise en Irak par l'EI. Avec 30 000 hommes mobilisés, l'offensive est présentée comme «la plus massive» depuis la prise par l'EI en juin 2014 de pans entiers du territoire.

Mais les civils payent un lourd tribut: près de 28 000 personnes ont dû fuir la région selon l'ONU. Ils viennent s'ajouter au 2,5 millions de personnes déplacées par l'avancée des djihadistes en 2014.