Le chef du NPD, Thomas Mulcair, accuse le premier ministre Stephen Harper d'avoir induit les Canadiens en erreur au sujet de la participation du Canada à des combats au sol en Irak.

Des commandants des Forces armées canadiennes ont révélé hier que des membres des forces spéciales ont été impliqués dans un échange de tirs lorsqu'ils ont été attaqués par des membres du groupe armé État islamique (EI) durant un exercice.

Ces membres des forces spéciales canadiennes ont aussi participé à 13 reprises à des missions d'identification de cibles pour des bombardements par des avions de la coalition.

« M. Harper ne peut s'en tirer et dire aux Canadiens : "Il n'y aura pas de combat de nos troupes" et ensuite essayer d'expliquer qu'en fait, ils sont impliqués dans ces combats », a déclaré M. Mulcair lors d'un point de presse dans une garderie de Toronto.

« Je lui ai posé ces questions spécifiquement en septembre, et il a dit aux Canadiens qu'ils ne seraient pas impliqués dans une mission de combat. Il n'a pas dit la vérité. »

Environ 70 membres des forces spéciales canadiennes ont initialement été déployés en Irak pour une mission de formation des forces de sécurité irakiennes. Cette mission a ensuite été élargie pour permettre à des avions militaires canadiens de participer à des frappes aériennes sur des cibles de l'EI.

Le premier ministre Harper a toujours affirmé que le Canada ne participerait pas à des combats au sol, tout au long du débat sur la participation canadienne à la coalition d'une vingtaine de pays dirigée par les États-Unis, à l'automne.

« Les soldats canadiens n'accompagneront pas les forces irakiennes au combat », avait entre autres martelé le premier ministre.

Lundi, lors d'une séance d'information menée à Ottawa, le commandement des Forces armées canadiennes a précisé que des membres des forces spéciales n'avaient eu d'autre choix que de se défendre lorsqu'ils se sont fait attaquer par des tirs de mortier et de fusil mitrailleur.

Ces militaires canadiens se seraient rendus au front avec leurs homologues irakiens dans le cadre d'un exercice de formation mené « au cours des sept derniers jours ».

Les porte-parole canadiens ont affirmé qu'il s'agissait d'un cas unique et de légitime défense.

Quant à l'identification de cibles, avec des appareils au laser notamment, ils ont soutenu que ces manoeuvres s'inscrivaient dans le cadre de leur mission d'« aide et de formation », puisque les forces de sécurité irakiennes ne sont pas en mesure d'accomplir ces tâches par eux-mêmes.

Plutôt que de se défendre, le premier ministre a préféré attaquer ses adversaires. « Le mouvement djihadiste international a déclaré la guerre au Canada et à ses alliés. Nous devons faire face directement à cette menace et c'est exactement ce que fait le gouvernement », a déclaré Carl Vallée, un porte-parole du gouvernement. « Nous sommes immensément fiers du travail extraordinaire que font nos forces armées canadiennes en combattant la menace terroriste que constitue le soi-disant État islamique en Irak et nous les appuyons à 100%. Contrairement aux libéraux et au NPD, qui préféreraient voir le Canada se tenir en retrait pendant que d'autres se battent pour nous, nous allons continuer à soutenir la coalition internationale dans la lutte contre les terroristes de l'EI », a-t-il ajouté.

Le chef du Parti libéral du Canada, Justin Trudeau, a invité le premier ministre à faire preuve de plus de transparence dans le dossier de la mission des troupes canadiennes en Irak. À l'instar de Thomas Mulcair, M. Trudeau a mis en relief les contradictions entre les propos de Stephen Harper durant le débat aux Communes l'automne dernier sur la nature de cette mission et le compte rendu des hauts dirigeants des Forces armées canadiennes de lundi.

« Le premier ministre a fait des déclarations l'automne dernier concernant la mission qui se révèlent pas totalement vraies aujourd'hui. Le premier ministre doit donc donner des réponses à plusieurs questions », a affirmé M. Trudeau, de passage à London, en Ontario, où le caucus libéral se réunit en prévision de la rentrée parlementaire du 26 janvier.

« Nous comprenons tous bien que nos troupes auront toujours le droit de se défendre. Mais la question concerne le premier ministre parce qu'il n'a pas fait preuve de franchise et de transparence avec les Canadiens sur cette mission depuis le tout début », a-t-il ajouté.



Échanges entre Thomas Mulcair et Stephen Harper à la Chambre des communes le 30 septembre 2014:

Thomas Mulcair: Monsieur le Président, le premier ministre dit que les règles d'engagement sont de conseiller et d'assister les Irakiens, mais la question est de savoir: assister comment? Par exemple, est-ce que les soldats canadiens participent à des patrouilles irakiennes ou kurdes en ce moment?

Stephen Harper: Monsieur le Président, j'ai dit: conseiller et assister les Irakiens. Les termes sont assez précis. Il s'agit de conseiller et d'assister, et non pas d'accompagner. Il me semble que cette question a été soulevée au comité parlementaire.

Thomas Mulcair: Monsieur le Président, font-ils des sorties en zones de combats?

Stephen Harper: Monsieur le Président, je viens de le dire, les soldats canadiens n'accompagnent pas les forces irakiennes dans leurs combats.