Au moins neuf personnes ont été tuées dans le bombardement d'un hôpital dans le nord-est du Sri Lanka où quelque 200 000 civils sont pris au piège dans des combats acharnés entre l'armée gouvernementale et un dernier carré de rebelles tamouls.

Dans une ambiance très lourde dans le pays --un ministre ayant menacé d'expulser diplomates, organisations humanitaires ou journalistes perçus comme favorables aux Tigres tamouls-- les militaires et les insurgés se battent à huis clos sur un dernier triangle de 300 km2 encore aux mains des séparatistes.

Dans ce département de Mullaittivu, dont le chef-lieu est tombé le 25 janvier, l'hôpital du secteur de Puthukkudiriruppu, a été bombardé à deux reprises dimanche après-midi, a révélé le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

Au moins neuf personnes ont péri et 15 autres ont été blessées, selon des organisations et des travailleurs humanitaires.

«Nous sommes choqués que cet hôpital ait été touché et ce, pour la deuxième fois ces dernières semaines», a déclaré Paul Castella, chef de la mission du CICR à Colombo, sans accuser ni l'armée, ni les Tigres de libération de l'Eelam tamoul (LTTE).

Sur place «la situation est très tendue», a déclaré à l'AFP par téléphone T. Varatharajah, directeur régional des services de santé et présent dans l'établissement attaqué. Les locaux des infirmiers, le dortoir des femmes, la cuisine et la morgue ont été endommagés, a-t-il précisé.

«Les blessés et les malades, le personnel médical et les installations médicales sont protégés par le droit international humanitaire. Ils ne doivent en aucune circonstance faire l'objet d'attaques directes», a protesté M. Castella.

Mais l'armée a nié avoir bombardé l'hôpital et accusé les LTTE de l'avoir fait pour la «discréditer».

«Nous connaissons l'emplacement précis de l'hôpital. Nous ne le frapperons pas et sommes disposés à organiser à tout moment l'évacuation en toute sécurité des civils», a assuré le porte-parole de l'armée, le général Udaya Nanayakkara.

Le dispensaire visé abrite entre 500 et 1000 patients, parmi lesquels certains doivent être acheminés vers un établissement mieux équipé, plus au sud, en zone gouvernementale.

Des équipes des Nations unies et de la Croix-Rouge étaient parvenues jeudi dernier à évacuer 226 blessés graves, dont 51 enfants, d'un hôpital de Mullaittivu après avoir âprement négocié avec les Tigres.

Depuis une semaine, la communauté internationale et des organisations d'aide et de défense des droits de l'Homme exhortent l'armée sri-lankaise et la guérilla à épargner les centaines de milliers de civils tamouls coincés à Mullaittivu.

Des centaines d'habitants y ont déjà été tués en janvier.

L'ONU estime qu'ils sont 250 000 à survivre dans cette région. Colombo affirme qu'ils sont deux fois moins nombreux.

Le Sri Lanka est en tout cas resté sourd aux appels internationaux à un cessez-le-feu. Il avait simplement donné aux Tigres jusqu'à samedi soir pour laisser partir les résidents de Mullaittivu.

Après quoi, il a lancé dimanche son assaut final pour «libérer» entièrement l'ex-Ceylan, ex-colonie britannique meurtrie par 37 années de conflit entre la majorité cinghalaise bouddhiste et la minorité tamoule hindouiste, au prix de 70 000 morts.

Des avions de chasse ont pilonné les dernières positions des Tigres, qui ont répliqué par des tirs d'artillerie: 46 combattants des LTTE ont été tués, si l'on en croit le ministère de la Défense, qui interdit aux ONG et à la presse d'accéder à Mullaittivu, ni même à un camp de réfugiés tamouls plus au sud, à Vavuniya.