Sous la pression des manifestations au Brésil, la présidente Dilma Rousseff va rencontrer lundi les leaders des manifestants puis les gouverneurs et maires des capitales régionales pour décider d'une série de mesures destinées à améliorer les services publics et lutter contre la corruption.

La présidence a confirmé à l'AFP une réunion à 13h30 locale (12H30 heure de Montréal) avec les dirigeants du Mouvement «Passe livre» (ticket gratuit), à l'origine de la fronde qui secoue le pays émergent d'Amérique latine depuis quinze jours, et à 16h00 (15H00) avec les maires et gouverneurs.

Dans une allocution radiotélévisée à la nation vendredi soir, au lendemain des manifestations historiques qui ont rassemblé 1,2 million de personnes et ont souvent été émaillées de violences et d'actes de vandalisme, la présidente s'est dite «à l'écoute de la rue» et a promis un «grand pacte pour améliorer les services publics» ainsi qu'une lutte plus efficace contre la corruption. Elle a ajouté qu'elle serait «intransigeante» avec le vandalisme.

Gouverneurs et maires du plus grand parti d'opposition, le Parti de la sociale- démocratie (PSDB) ont répondu à l'appel, mais ils devaient se réunir entre eux pour élaborer un programme commun avant de rencontrer la chef de l'État, selon le quotidien de Rio, lundi.

«Je veux aller à la réunion de la présidente Dilma pour signer un pacte entre l'Union, les États fédérés et les municipalités pour une action commune en faveur des Brésiliens», a écrit sur son compte twitter le gouverneur du Goias, Marconi Perillo.

Le mouvement a commencé il y a quinze jours pour exiger la suspension d'une hausse des tickets d'autobus. Mais les revendications se multiplient et la lutte contre la corruption se renforce.

Manifestations à date fixe ou spontanées

De nouvelles manifestations sont prévues ce lundi à Rio de Janeiro, où les manifestants se sont donné rendez-vous devant l'église de la Candelaria au centre-ville. Le mouvement «Passe livre» annonce sur son site de «grandes actions» ces prochains jours dans la périphérie de São Paulo, la capitale économique du pays.

Sur les réseaux sociaux, les internautes de tout le pays discutent de la façon de mener le mouvement, et doivent décider si les manifestations seront spontanées ou organisées à des dates fixes.

Dimanche, des manifestations pacifiques et moins massives que la veille ont eu lieu dans une vingtaine de villes sur des thèmes divers.

À Rio de Janeiro, 4000 personnes, selon la police, ont manifesté sur la célèbre plage de Copacabana pour dénoncer un projet de réforme constitutionnelle (PEC 37), prévoyant de retirer le pouvoir d'enquêter aux parquets, ce qui contribuerait, selon eux, à favoriser l'impunité des politiques corrompus.

Un sondage Ibope diffusé dimanche soir à la chaîne de télévision TV Globo a montré que les transports et la politique sont les principales motivations des manifestants (à 46%).

Pour 57% des personnes interrogées, la police a agi de façon violente et 94% estiment que leurs revendications seront satisfaites par le gouvernement.

La plupart des contestataires expriment leur indignation par rapport aux sommes colossales - 15 milliards de dollars - dépensées pour l'organisation du Mondial desoccer, alors que les transports, les secteurs de la santé et de l'éducation laissent à désirer.

Mais dans leur ensemble, 67% des Brésiliens sont d'accord, totalement ou en partie, pour accueillir cette compétition qu'ils sont la seule nation à avoir remportée cinq fois, selon le sondage de l'institut Ibope.

Les analystes politiques brésiliens sont partagés sur l'avenir du mouvement de protestation animé sur les réseaux sociaux par des jeunes de la classe moyenne qui se méfient des partis politiques, des syndicats et des médias traditionnels.

«Cette opposition apolitique va finir par se canaliser dans un parti» pour la présidentielle de 2014, a estimé l'analyste Murilo Aragao lors d'un débat sur la chaîne de télévision Globo News.

«Le mouvement va se poursuivre et sa durée va dépendre de la façon dont va y répondre la classe politique», a déclaré le professeur de philosophie de l'université de Rio, Luis Felipe Pondé.

Les protestations se poursuivent au Brésil

L'accès au plus important port de Santos, dans l'État de Sao Paulo, a été bloqué par des manifestants lundi. Des rassemblements se sont aussi déroulées dans au moins quatre autres États et des événements semblables étaient prévus ailleurs durant la journée.