Faux prétexte, absence de plan pour l'économie, intérêts partisans; les deux partis de l'opposition se sont ligués, hier, pour démonter l'argumentaire de Jean Charest servant à justifier la tenue possible d'élections en décembre.

Mario Dumont et Pauline Marois ont réitéré qu'ils offraient toute leur collaboration au gouvernement pour faire face aux difficultés économiques, accusant le premier ministre de ne proposer, au final, aucune solution à la crise et d'avoir plutôt les yeux rivés sur les sondages.

Lundi, M. Charest avait estimé que l'Action démocratique et le Parti québécois ne semblaient pas «en mode collaboration», annulant sa participation à une importante mission en Chine et laissant la porte grande ouverte au déclenchement d'élections générales le mercredi 5 novembre. «S'il y a une chose qui est devenue claire aujourd'hui, c'est à quel point les prétextes évoqués par le premier ministre sont vides, vides de contenu, vides de sens, a lancé le chef de l'ADQ. Le premier ministre du Québec, plutôt de rencontrer les vrais acteurs de l'économie, ce qui aurait été utile pour sa population, c'est son comité électoral qu'il s'est appliqué à rencontrer dans les dernières semaines.» La chef péquiste s'est questionnée sur le changement de cap de M. Charest, qui a répété inlassablement dans les derniers mois qu'il n'y aurait pas d'élections au Québec en 2008.

«Est-ce parce qu'il voit des embellies dans les sondages ou la vérité, c'est plutôt qu'il est absolument incapable de boucler le budget et qu'il veut se dépêcher d'aller en élection avant l'avalanche de mauvaises nouvelles?» Mme Marois a sommé le premier ministre de «faire preuve de transparence, d'honnêteté» en donnant l'heure juste sur la situation économique du Québec. «Pourquoi a-t-il choisi de travailler à sa réélection plutôt que de travailler pour les Québécois?»

Dans ce qui risque de devenir des lignes de campagne électorale, M. Charest a répliqué sans ménagement. «Entre ce que dit le chef de l'ADQ et ce qu'il fait, il y a un monde de différence», a martelé le premier ministre dans le cas de M. Dumont, l'accusant de s'intéresser davantage à la réouverture de la Constitution qu'à l'économie du Québec.

À propos de la chef péquiste, le premier ministre a ressorti des boules à mites une déclaration d'octobre 2005, alors que Mme Marois, en pleine course au leadership du PQ, avait estimé que l'indépendance du Québec serait suivie de «cinq années de perturbations».

Le jour où deux sondages indiquent que plus de 70% des Québécois ne veulent pas d'élections en décembre, péquistes et adéquistes ont répété qu'il serait irresponsable de tenir un scrutin alors qu'une crise financière, et potentiellement économique, guette les Québécois. «On a un gouvernement qui retarde délibérément les mauvaises nouvelles, a estimé le porte-parole péquiste en matière de finances, François Legault. Le gouvernement libéral a l'air d'un gars qui vient de tomber du 25e étage puis, à chaque étage, il nous dit: «Jusqu'à présent, ça va bien.».»

«Je ne peux pas croire qu'il ne reculera pas, a renchéri M. Dumont. Il sait qu'il a la collaboration des partis de l'opposition à l'Assemblée, on en a fait une démonstration on ne peut plus claire. Ce qu'on lui demande aujourd'hui, c'est de mettre cet agenda électoral de côté et se concentrer sur l'agenda économique.»

Selon Mario Dumont, le premier ministre Charest arrivera affaibli et mal préparé à la rencontre des premiers ministres, le 10 novembre, si le Québec est en campagne électorale, alors qu'il aurait pu se présenter à Ottawa «beaucoup plus fort», porteur de demandes adoptées à l'unanimité à l'Assemblée nationale, si les trois partis travaillent ensemble.

Une campagne électorale ferait en sorte que l'Assemblée nationale pourrait ne pas siéger pendant plusieurs mois, ce qui compliquerait l'adoption de mesures économiques, selon l'opposition. «Jean Charest et le Parti libéral travaillent pour eux-mêmes plutôt que de travailler pour la population», a conclu le chef adéquiste.