Si la panne dure plus de 20 minutes, l'inventeur prend la clé de sa Toyota Prius, la branche sur un circuit électrique spécialement installé dans sa maison, et démarre le moteur. Quand les batteries du système d'alimentation en continu faiblissent, celle de la Prius prend le relais. De cette manière, il a réussi à continuer à travailler durant des pannes de plusieurs heures.

Si la panne dure plus de 20 minutes, l'inventeur prend la clé de sa Toyota Prius, la branche sur un circuit électrique spécialement installé dans sa maison, et démarre le moteur. Quand les batteries du système d'alimentation en continu faiblissent, celle de la Prius prend le relais. De cette manière, il a réussi à continuer à travailler durant des pannes de plusieurs heures.

«Ça m'a servi une demi-douzaine de fois depuis deux ans», explique M. Factor, qui dirige une société d'équipements audio et d'avionique, en entrevue téléphonique. «Les coûts ont été minimes. J'ai dépensé moins de 2000$ en tout, la majorité en frais d'électricien que j'aurais encourus de toute façon si j'avais acheté une génératrice. Et j'ai calculé que j'augmente à peine l'usure de la batterie de ma Prius, moins de 10% tout au plus.»

Les histoires comme celles de M. Factor sont de plus en plus fréquentes. Récemment, le New York Times faisait état de quelques autres inventeurs qui utilisent leur voiture hybride comme une assurance contre les pannes d'électricité. Honda a même pris la peine de prendre position sur la question, en affirmant que cet usage des hybrides n'était pas cautionné, et qu'il vaudrait mieux utiliser une génératrice.

D'autres ont des ambitions encore plus grandes pour les hybrides. «L'idée est d'utiliser les hybrides pour produire de l'électricité en période de pointe», explique John DeCicco, un ingénieur mécanique qui s'occupe des questions automobiles au groupe écologiste Environmental Defense, à Washington. «En théorie, c'est très valable. Au fur et à mesure que le marché de l'électricité reflète mieux les coûts de production, le prix de l'électricité en période de pointe, par exemple tôt le matin quand les bureaux ouvrent et les maisons s'éveillent, sont de plus en plus élevés. Les compagnies génératrices doivent construire des centrales qui ne serviront que pour la pointe, et ne seront pas utilisées à leur plein potentiel le reste du temps. C'est très coûteux. Ça compense amplement l'inefficacité de la production d'électricité à partir d'un moteur de voiture.»

Cette approche est appelée «V2G», l'acronyme anglais de l'expression «du véhicule au réseau» (vehicle to grid). «Avec le passage vers les batteries au lithium, le V2G va devenir une réalité», affirme Willett Kempton, un anthropologue de l'Université du Delaware qui se spécialise en politiques publiques urbaines. En 2005, dans la revue académique Journal of Power Sources, M. Kempton a évalué que la flotte automobile a 20 fois la capacité de l'industrie électrique, avec 10 fois moins de coûts de capital. Le V2G pourrait être combiné à l'énergie éolienne pour améliorer la stabilité de la capacité de cette dernière.

Par contre, le V2G ne diminue pas les émissions de gaz à effet de serre, parce que les moteurs des voitures sont beaucoup moins efficaces que les centrales pour produire de l'électricité. Et ce, même si on considère la pollution associée à la construction des centrales réservées à la demande de pointe. «À un moment donné, les voitures carbureront à quelque chose de moins polluant que les centrales, observe M. DeCicco. Mais on est loin de ça.»

Le seul problème, selon M. DeCicco, est que les batteries d'aujourd'hui ne suffisent pas à la tâche. «Le progrès dans le domaine des batteries est très lent. N'importe qui vous le dira, une pile rechargeable n'est plus très bonne après 18 mois. Soumettre des batteries d'hybrides à une ou deux heures d'utilisation supplémentaire à chaque jour me semble une recette pour des réparations coûteuses et fréquentes. À moins d'une percée technologique inattendue, je ne vois pas le V2G survenir avant au moins 10 ans.»

On s'en doutera, MM. Factor et Kempton sont beaucoup plus optimistes. Ils balaient du revers de la main les questions de fiabilité des batteries, et entrevoient même un monde où les propriétaires d'hybrides vendront leur électricité aux producteurs en période de pointe. «Une Prius peut fournir trois kilowatts en continu, mais jusqu'à 10 kilowatts pendant de brèves périodes de quelques dizaines de secondes. Multipliez cela par les millions de voitures hybrides qui existeront quand la technologie aura agrandi sa part de marché, et vous avez une source d'énergie de pointe très fiable. On peut même imaginer que les employés d'une grande compagnie branchent leurs voitures en arrivant au bureau, pour réduire les coûts d'électricité de leur employeur. Moyennant rétribution, évidemment», estime M. Factor.

Il faut dire que l'homme, qui est dans la soixantaine, n'est pas étranger aux aventures. Depuis une quinzaine d'années, il dirige la Ligue SETI, qui se sert des ordinateurs personnels de ses 1000 membres pour analyser les données de télescopes aux quatre coins de la planète, à la recherche de signaux d'origine extraterrestre, comme dans le film Contact avec Jodie Foster.