C'est dans le cadre idyllique de l'hôtel The Breakers, à quelques pas de l'océan Atlantique, que se tient le Cavallino Classic, un événement organisé par le magazine du même nom.

À cet événement essentiellement privé (les télévisions étant interdites) sont admis quelques médias, dont votre journal préféré. Cette année, nous honorons deux vedettes de la grande famille italienne, sorties des usines de Maranello: la Ferrari 250 GT châssis long Tour de France et la redoutable 365 GTB/4, dite «Daytona».

Concorso d'Eleganza

Sous le magnifique soleil floridien de janvier, nous sommes accueillis sur le parterre finement gazonné par les grands classiques Ferrari, présidés cette année par la panoplie complète des 250. Au centre, se font face quatre 250 GT Tour de France châssis long (LWB, ou long wheelbase). Précisons que l'appellation Tour de France découle des victoires remportées par les Ferrari 250 à l'épreuve routière française courue jusqu'aux années 80 sur une distance pouvant atteindre 4000 kilomètres.

 

Tout autour des quatre vedettes centrales sont alignées d'autres 250 dont une spectaculaire 250 GTO 1962 dans sa robe bleue assortie d'une bande centrale jaune vif, sans doute l'une des voitures les plus prisées au monde. Si les berlinettes sont ici en majorité, les cabriolets retiennent tout autant l'attention (nous sommes en Floride, après tout), notamment une 250 GT Pininfarina 1958 rouge vin, gagnante du Best of Show, catégorie GT. Parmi les autres classiques, nous admirons l'ancêtre de la famiglia, la 166 MM Berlinetta Touring 1949, couronnée Best of Show, catégorie compétition. Quelle simplicité, quel équilibre des formes, quelle élégance indémodable que cette 166 MM carrossée par Touring.

À ses côtés, un autre duo de 250. La première, habillée rouge vin, baptisée 250 MM, et l'autre, une 250 GT Europa, vêtue en bleu de France et impeccablement restaurée que nous avions déjà admirée - et entendue - sur le circuit de Moroso la veille. Ce sont elles, les premières 250, qui inaugurèrent le mythe aujourd'hui universel du Cavallino Rampante par la victoire inattendue aux Mille Miglia de 1952 signée Giovanni Bracco, un pilote presque inconnu, au volant d'une nouvelle venue nommée Ferrari 250 Sport.

Midi déjà. Profitons-en pour prendre une pause sur la terrasse à quelques dizaines de mètres des «breakers» de l'océan qui viennent mourir sur la plage. Après le lunch, nous sommes reçus par une 275 GTB/C 1966 «au naturel» dont on vient de terminer la restauration mécanique, mais qui n'a pas pu être repeinte à temps pour l'exposition. Qu'à cela ne tienne, on la présente à nu, ce qui ne manque pas de retenir l'attention des curieux. Tout près, c'est au tour des sculpturales 275 GTB/4 «Daytona» de nous tendre les bras, ce surnom ayant été attribué après le triplé remporté par Ferrari aux 24 Heures de Daytona de 1966, ultime revanche de Ferrari sur Ford qui venait de l'humilier par son triplé au Mans. Dans le même lot, une belle 330 GTS dont le propriétaire en sueur subit l'interrogatoire en règle de trois membres du jury de sélection du concours (on les appelle judges en anglais, et ce n'est pas pour rien).

Les temps modernes

Nous sommes à présent directement sur le terrain de golf où se cantonnent des dizaines de Ferrari plus récentes, dont les petites Dino longtemps boudées, mais qui ont enfin retrouvé leur juste place dans la famille. Et puisque toute chose, aussi belle soit-elle, a une fin, nous concluons cette journée avec celle qui porte le prénom du géniteur: la spectaculaire Enzo.

Perchée sur une butte gazonnée, on dirait un OVNI qui s'est posé là, en bout de terrain, question de mieux redécoller une fois la visite terrestre terminée. Qu'on aime ou qu'on n'aime pas, l'Enzo attire tous les regards, celui des tout jeunes qu'elle fait rêver d'espaces interstellaires, et celui des moins jeunes qui ne peuvent s'empêcher d'admirer ces fibres de carbone, ces métaux rares et ces formes aérospatiales en pensant: quel chemin fantastique parcouru par l'automobile en général et par Ferrari en particulier depuis plus de 60 ans.

N'empêche que si nous devions choisir, c'est probablement au volant de l'ancienne 166 MM que nous repartirions, ou de la 250 MM, ou de la 250 GTO ou Tour de France, ou encore...