La production de Don Giovanni qui vient de prendre l'affiche à l'Atelier d'opéra de McGill se distingue principalement par le jeu et les voix.

La scénographie est très sommaire: des ogives blanches, qu'on déplace ou qui se déplient. L'action se déroule à l'intérieur de ces constructions ou sur une passerelle, derrière l'orchestre placé sur scène.

Comme il fallait s'y attendre, le metteur en scène Patrick Hansen (également responsable de l'opéra à McGill) propose un Don Giovanni en costumes modernes. Dieu merci, il renonce cette fois aux excès qu'on lui connaît. Don Juan porte du cuir et des verres fumés, mais ses capes sont finalement «d'époque», le costume de son valet Leporello est comique, les femmes sont en robes simples dont certaines font années 40. Le spectacle fait aussi une grande utilisation de ce qu'on appelle en langage techno «light sabres».

Dans le décor très stylisé qu'il a devant soi, le spectateur doit faire preuve d'une certaine imagination pour retrouver l'intrigue familière du séducteur qui laisse tomber l'une après l'autre les femmes qu'il trouve sur son passage. Ainsi, la statue du Commandeur se ramène à un petit bâtiment qui pourrait être une cabine de plage. Peu importe : ceci est un exercice public d'école de musique aux moyens financiers limités.

Ce qui compte, c'est le travail qu'y accomplissent les étudiants et, à cet égard, le résultat est remarquable. Dans le rôle-titre, le jeune baryton Gordon Bintner, récent grand lauréat du Concours OSM, est la vedette du spectacle. Grand, blond, séduisant, il a tout d'un Don Juan et, mieux encore, il joue bien et il chante bien. Ce garçon fera certainement une grande carrière.

Deux autres interprètes sont à signaler immédiatement : Tracy Cantin, touchante Donna Anna à la voix capable d'une force et d'une virtuosité extraordinaires à l'aigu, et Geoffrey Penar, baryton à couleur de basse et irrésistible comédien, en Leporello. Sara Ptak, en Donna Elvira pourchassant Don Juan, est comique elle aussi, mais sa voix est parfois stridente. Sarah Gilbert est l'incarnation même de l'innocente Zerlina et David Tinervia est excellent en Masetto, son fiancé trompé. Michael Gracco projette une solide voix de basse en Commandeur, mais Kevin Myers n'a pas de chance: il joue l'insipide Don Ottavio et sa voix est désagréable.

Comme toujours, il y a deux distributions et celle-ci revient samedi soir.

Gordon Gerrard dirige l'excellent orchestre et accompagne les récitatifs au clavecin; sa synchronisation des grands ensembles vocaux est parfaite.

«DON GIOVANNI», opéra en deux actes, livret de Lorenzo da Ponte, musique de Wolfgang Amadeus Mozart, K. 527 (1787). Production : Atelier d'opéra de l'Université McGill. Pollack Hall de McGill. Mise en scène : Patrick Hansen. Décors : Vincent Lefèvre. Costumes : Ginette Grenier. Éclairages : Serge Filiatrault. Orchestre symphonique et Choeur de McGill. Direction musicale : Gordon Gerrard. Avec surtitres français et anglais. Première jeudi soir. Autres représentations : vendredi et samedi, 19 h 30, et dimanche, 14 h.