On peut ne pas aimer les Bee Gees, leurs dents trop blanches et leurs voix fluettes. Mais personne ne peut nier que les frères Gibb ont réussi quelques bons coups. À commencer par le somptueux double album Odessa, tout juste réédité par la compagnie Rhino.

Ce «classique» des Bee Gees a été lancé en 1969, 10 ans avant l'explosion Stayin' Alive. À l'époque, les Beatles trônaient toujours au sommet des palmarès. Et les Bee Gees, malgré quelques tubes encourageants (Massachussetts, I've Gotta Get a Message to You), n'étaient encore que trois pieds-tendres plus ou moins crédibles.

 

Les choses ont changé avec cette oeuvre ambitieuse, ponctuée de pièces folk-pop aux orchestrations symphoniques. Ce n'était pas le mur du son de Phil Spector, mais presque. C'était un disque porté par la mode et les excès du temps, avec de la guitare et du piano, des harpes, des orgues d'église, des chorales et des nappes de violons dignes de Walt Disney et bien sûr des harmonies vocales à n'en plus finir. Quant aux chansons, elles dépassaient le stade de la simple bluette sentimentale, à commencer par l'épique chanson-titre (huit minutes), sur le naufrage d'un bateau au XIXe siècle...

On a souvent dit qu'Odessa était le Sgt. Pepper's des Bee Gees. Cette réputation n'a fait que grandir avec le temps. Et semble toujours justifiée, si on en juge par cette réédition 40e anniversaire, présentée dans un coffret rouge velouté (fidèle aux exemplaires originaux) avec trois CD (version mono, version stéréo et démos), un collant, une mini-affiche et un livret aux pages glacées.

Vrai qu'Odessa surpasse la plupart des disques que les Bee Gees ont faits dans les années 60. C'est un album foisonnant, éclectique, grandiose par moments. Il y a d'excellents morceaux (Lamplight, Whisper Whisper) et quelques idées surprenantes... Mais bon. Entre vous et moi: un album simple aurait aussi fait l'affaire. Dix-sept titres, c'est beaucoup. Et malgré l'emballage de luxe, force est d'admettre qu'Odessa n'est pas le chef-d'oeuvre absolu qu'on a bien voulu en faire.

À la pièce, rien à redire. Mais à la longue, le disque s'essouffle un peu.

Fana de choucroute rock

Vous avez peut-être entendu parler de la musique «Krautrock». Dans les années 70, ce rock allemand hypnotique a donné naissance à quelques groupes importants (Can, Faust, Neu! Tangerine Dream, Amon Düül, Popol Vuh) qui ont eu un impact certain sur le rock et la techno d'aujourd'hui.

Pour ceux que ça intéresse, il existe un petit livre absolument délicieux sur le sujet. Et il vient tout juste d'être traduit en français.

Écrit par le chanteur rock Julian Cope, Krautrock-sampler n'a rien d'un essai ou d'une thèse de doctorat. C'est un livre de fan, point final. Cope raconte l'histoire du krautrock et fait la liste des disques les plus importants de cette période, avec la passion d'un ado pas encore revenu de son trip.

Un exemple? Voici sa description de la chanson Flowers Must Die, du groupe Ash Ra Tempel. Si vous pigez quelque chose, c'est que ce livre est pour vous: «Après une préparation lente et bizarre, un mantra frénétique éclate et c'est comme les Stooges de la période Fun House, mais dans une zone de voyance qui les surpasse sans problème. Le phasing déchire le morceau d'un bout à l'autre pendant que le fracas céleste entre dans l'hyperespace et que les traits d'union se mettent à tout relier juste-parce-que-c'est-mieux-comme-ça. Flowers Must Die, ça dépouille grave mon gars.»

Méchant Geffen. Mauvais Eagles

The Byrds, Crosby Stills Nash&Young, Joni Mitchell, Mamas&Papas, Jackson Browne, Linda Rondstadt, The Eagles....

La scène folk-rock californienne a fait rêver des générations de mélomanes. Mais bien peu connaissent l'envers de cette épopée musicale, qui a duré grosso modo de 1965 à 1980.

Hotel California, de Barney Hoskyns, raconte comment cette belle histoire fleurie s'est transformée en désert créatif. Au début, tout était beau. Puis le succès les a rendus fous. Le business et la cocaïne ont fait le reste...

L'auteur n'accuse personne. Mais certains de ses protagonistes passent au tordeur. C'est le cas de David Geffen, ce «grand requin blanc» sans scrupules qui a fondé la compagnie de disques Asylum. C'est aussi le cas des Eagles, qu'Hoskyns décrit comme un groupe calculateur, incarnation suprême de cette déchéance aseptisée.

Ça se lit comme un roman, mais c'est hélas une histoire vraie.

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Odessa, réédition 40e anniversaire

Rhino/Reprise

*** 1/2

 

Julian Cope

Krautrock-sampler

Kargo&L'éclat

 

Hotel California

Les années folk-rock (1965-1980)

Barney Hoskyns Castormusic

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Le Orme à Montréal

Attention, vieilles barbes: le groupe «prog» italien Le Orme se produira à Montréal, le 12 septembre prochain, pour le quatrième du Festival des musiques progressives de Montréal. Le FMPM accueillera aussi la formation canadienne Saga et le trio québécois Ex-Cubus, reformé depuis quelques années. On attend aussi des groupes progressifs plus récents, comme DFA (Italie) Thieves Kitchen (Grande-Bretagne) et Rouge Ciel (Québec). Billets en vente depuis hier sur le site www.progquebec.com.