Elle était belle à voir dans sa robe rouge à traîne de cantatrice, la future maman qui avait réservé l'annonce de sa grossesse au public de ce soir de premières, hier: première fois de sa carrière qu'Ariane Moffatt chantait avec un aussi «gros band» que l'OSM, première fois également qu'elle le faisait sans s'accompagner elle-même.

Ça peut avoir l'air de rien pour une fille aussi douée et polyvalente qu'Ariane Moffatt, mais ce saut dans le vide dans lequel la chanteuse se met plus à nu qu'à l'habitude donnerait le vertige aux plus expérimentés des artistes de scène.

En première partie du concert, la cantatrice d'un soir - deux, en fait, parce qu'elle remet ça ce soir à la Maison symphonique - a paru un tantinet déstabilisée, comme s'il lui fallait se pincer pour se prouver que tout cela était bien réel. Les hormones, sans doute, a-t-elle lancé à la blague au public qui était prêt à la suivre dans cette aventure qui n'allait surtout pas priver la chanteuse de son naturel.

Ses deux invités, eux, avaient l'air de poissons dans un gros bocal d'eau claire. La voix de tête d'Alexandre Désilets et sa gestuelle décontractée étaient remarquables pendant Vieux loup, tandis que celle, chaude à souhait, de Marie-Pierre Arthur était tout à fait dans son élément sur la musique de boléro que Simon Leclerc avait orchestrée pour sa chanson Déposer les armes.

Il faut dire que malgré leurs nouveaux atours symphoniques, les chansons d'Ariane Moffatt étaient «légèrement moins électro», comme elle l'a fait remarquer après Debout, dont la rythmique était assurée par les cuivres et les percussions de l'OSM. Au retour de la pause, de connivence avec Simon Leclerc, elle s'est amusée avec son beat box auquel s'est arrimé l'orchestre pendant Je veux tout. Elle s'est également servie d'un vieil échantillonneur en guise de clin d'oeil sympathique pendant La fille de l'iceberg.

Courant d'émotion

Mais c'est quand Ariane Moffatt a interprété la fort jolie Perséides, dédiée à sa moitié Florence, qu'un courant d'émotion a traversé la Maison symphonique, qui a également vibré tout de suite après quand elle a livré une version sentie de Your Song d'Elton John et Bernie Taupin qui a permis à la chanteuse en elle de s'éclater.

Il faudrait également parler de cette amusante Si tu savais que Marie-Pierre Arthur a reprise accompagnée uniquement de sept cuivres de l'orchestre qui sont venus la rejoindre à l'avant de la scène.

Et si les autres emprunts aux grands de la pop livrés en duo n'étaient pas toujours raccord, ils étaient beaux à entendre: la délicatesse des voix de Moffatt et Arthur dans Famous Blue Raincoat de Cohen, une Space Oddity de Bowie faite sur mesure pour l'orchestre derrière Moffatt et Désilets et, surtout, une version à trois voix aussi ludique qu'irrésistible de la Billie Jean de Michael Jackson, qui n'est pas très souvent au répertoire de l'OSM.

Dans l'histoire de la série OSM Pop, il y a sans doute eu des concerts plus ambitieux que celui-là, mais pas des masses où les artistes et leur public ont donné l'impression de s'amuser autant.