Composée de 1946 à 1948, la Turangalîla-Symphonie est une oeuvre monumentale d'Olivier Messiaen. Assurément, son interprétation représente une tâche colossale pour un orchestre symphonique universitaire. Et cette tâche a été dignement accomplie par celui de McGill, vendredi à la Maison symphonique.

Dix mouvements exécutés en 80 minutes, soit une introduction, trois séries de «mouvements enchâssés », un mouvement final joyeux et euphorique, le tout articulé autour de quatre «thèmes cycliques» pour reprendre l'expression du défunt compositeur (1908-1992). Ce n'est pas rien! 

Grande diversité de procédés compositionnels au menu : entre autres, arabesque à la clarinette, scherzo pour piccolo et basson, discours atonal au piano, variété de couches texturales générées par les cordes, les cuivres et les bois, cohabitation continue de la consonance et de la dissonance, usage probant des ondes Martenot, présence de percussions variées, des timbales, solo de contrebasse sur «fond scintillant d'instrument à clavier et de bois», etc. 

Cette oeuvre témoigne d'une grande liberté du compositeur français, de l'austérité conceptuelle à la folie festive en passant par des séquences de réelle tendresse mélodique... à tel point qu'on a parfois un peu de mal à en saisir le fil conducteur.  Mais il suffit de rester attentif pour identifier les raccords de la Turangalîla-Symponie. Pour en apprécier la cohérence, les concepts et les moments de grande beauté.

Près de sept décennies après sa conception, cette oeuvre a passé l'épreuve du temps, ses caractéristiques naguère jugées bizarroïdes sont désormais admises par tant de mélomanes curieux et ouverts d'esprit. 

Quant à l'interprétation de l'Orchestre symphonique de McGill sous la direction d'Alexis Hauser, on ne peut qu'applaudir. Une fois de plus, le maestro a réussi à soutirer le maximum d'un orchestre d'étudiants des plus fervents et de solistes professionnels aguerris (la pianiste Kyoto Hashimoto, l'ondiste Estelle Lemire), sans pour autant rivaliser avec les interprétations de cette même oeuvre par de grands orchestres symphoniques professionnels. Dans un tel contexte, difficile voire impossible d'exiger davantage de cohésion, de précision, d'intelligibilité. Et il y a lieu de s'en réjouir. 

ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE McGILL

Chef d'orchestre: Alexis Hauser. Solistes : Kyoko Hashimoto, piano, Estelle Lemire, ondes Martenot. Vendredi soir, Maison symphonique de Montréal, 19h, festival Montréal/Nouvelles Musiques (MNM)

Programme: Turangalîla-Symphonie, pour piano, grand orchestre et ondes Martenot (1946-1948) - Olivier Messiaen