Le chanteur Prince, décédé jeudi, était avant tout une bête de scène qui a laissé des souvenirs mémorables, un « musicien virtuose qui pouvait jouer d'à peu près tous les instruments », tout en étant un être « exigeant et contrôlant ».

C'est ainsi que le vice-président à la programmation du Festival international de jazz de Montréal, Laurent Saulnier, s'est souvenu de l'artiste.

Prince était monté sur scène pas plus tard que le mois dernier à Montréal, dans le cadre d'un spectacle épuré présenté au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts. Il s'était produit peu après à Toronto. Il avait alors offert de nouvelles interprétations des succès ayant ponctué sa longue et prolifique carrière, de même que des reprises d'autres artistes.

M. Saulnier, qui avait pu compter sur la présence de Prince au Festival en 2001 et 2011, a déclaré que c'est le musicien originaire de Minneapolis qui décidait où il allait se produire, et non les organisateurs d'événements - à Montréal ou ailleurs.

« C'est lui qui faisait les démarches pour venir à Montréal, et pas l'inverse, a-t-il relaté en entrevue. C'est lui qui décidait. Lorsque toi, tu veux faire venir Prince chez toi, et que Prince ne veut pas venir à toi, c'est là que c'était plus difficile. »

Questionné sur ce que c'était de « fréquenter » Prince, M. Saulnier a répondu aussitôt en riant : « Personne ne l'a côtoyé! En 2011, on avait assigné une personne sur le «dossier Prince », et il n'y avait que cette personne-là qui avait le droit d'adresser la parole à Prince. Notre objectif à nous, il est toujours le même : il faut que l'artiste livre le meilleur concert possible quelles que soient les circonstances. »

M. Saulnier a affirmé que le meilleur spectacle de Prince qu'il a eu la chance de voir était à Montréal, dans le cadre du Festival en 2011. « Le premier des deux concerts au Métropolis était magique avec un M majuscule. Il était embarqué sur scène à 23h30, tel que prévu à la minute près, et il était sorti de scène à 3h30 du matin. Durant ces quatre heures, il était toujours sur scène, à part une pause de dix ou quinze minutes avant le rappel. »

Dix ans plus tôt, la première présence de Prince au Festival avait été bien différente, avec un « mandat jazz » totalement assumé.

« En 2001, Prince avait très peu été invité dans les festivals de jazz, et il a pris cette invitation très, très au sérieux. Durant la première heure et demie de son show à la Salle Wilfrid-Pelletier, il avait joué du jazz, un jazz électrique, un jazz fusion, mais c'était quand même du jazz. Et il y avait une partie de la salle qui avait même quitté, parce que ce n'était pas ce que les gens venaient entendre », a raconté M. Saulnier.

« Puis, Prince s'était adressé à la foule en disant "on prend un dix minutes de pause et on revient après". (...) Il était revenu pour faire une heure et demie de ses grands succès, et quasi que des hits. C'était marquant pour ça. Prince venait dans un festival de jazz, et il voulait remplir le mandat jazz. »

Une relation particulière avec Toronto

Le chanteur Prince avait, par ailleurs, une relation particulière avec Toronto, ville où il a déjà vécu et où il a donné l'un de ses derniers spectacles.

L'icône des années 1980 a épousé la Torontoise Manuela Testolini au début des années 2000, et le couple s'est installé dans le quartier Bridle Path.

Ils ont divorcé en juillet 2006, mais le chanteur de Purple Rain n'a apparemment jamais perdu son amour de la Ville Reine.

L'artiste a donné deux de ses derniers concerts dans la métropole canadienne le mois dernier, quelques jours après en avoir présenté deux au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts à Montréal.

Il avait alors offert de nouvelles interprétations des succès de sa longue et prolifique carrière, de même que des reprises.

Ses spectacles - deux le même soir - avaient été suivis d'un après-concert impromptu dans un club du centre-ville torontois.

«J'adore Toronto», avait-il dit à La Presse Canadienne en 2004, après un spectacle de deux heures présenté à Jacksonville, en Floride.

«C'est une ville cosmopolite, avait-il poursuivi. Il y a toutes sortes de gens différents, partout où vous allez à Toronto, ils y a toutes sortes de bonne musique, de grands restaurants, de bonnes boîtes de nuit qui ne proposent pas un programme musical américain, mais plutôt des listes musicales que j'apprécie vraiment.»

C'est pendant son passage à Toronto qu'il a enregistré l'album Musicology, encensé par la critique.

À l'époque, la légende du funk, du rock et du r&b avait parlé de la tendance du Canada à ignorer l'industrie du disque américaine.

«Musicology est le premier album que j'enregistre à Toronto et je peux vraiment sentir la différence. Il a un son complètement unique qui vient du fait qu'on n'y tient aucunement compte de ce qui se passe dans la musique américaine et du fonctionnement de l'industrie musicale américaine. (L'album) ne sonne comme rien d'autre qui existe en ce moment», avait-il déclaré.

Prince a été retrouvé mort jeudi à son domicile de Minneapolis. Il avait 57 ans.