Marco Calliari a fait énormément de scène au cours des dernières années. Quatre ans après Mia Dolce Vita, disque de reprises de chansons traditionnelles italiennes, l'ex-chanteur du groupe métal Anonymus lance son troisième album solo, Al Faro Est. Un disque de musique du monde léché et éclectique, composé de chansons originales entièrement écrites en italien, dans lequel tous les métissages sont permis.

Marco Calliari arrive un peu en retard à notre rendez-vous et voit le disque sur la table. «Tu as l'album!» s'exclame-t-il en l'ouvrant, heureux comme un enfant le matin de Noël. «Je ne l'avais pas vu encore. On a tellement travaillé dessus, tu ne peux pas savoir à quel point.»

Pour ce troisième disque solo, Marco Calliari a mis le paquet: 29 musiciens, de nombreuses collaborations (la Fanfare Pourpour, le quatuor à cordes Quatr'Ailes de Trois-Rivières, le chanteur Nedji Bouizzoul, entre autres), pour 12 chansons originales et une chanson traditionnelle toscane qui remplissent l'espace... comme lui. C'est vrai que Marco Calliari déplace de l'air. En entrevue, une anecdote n'attend pas l'autre, par exemple comment il s'est fait voler deux fois son ordinateur portable, sa difficulté à écrire le troisième couplet d'une chanson, les spectacles «corpos» dont il est devenu le spécialiste - «J'aime ça faire lever des partys», dit-il.

Mais sa propension à semer la joie autour de lui ne l'empêche pas de faire son travail sérieusement. Pour écrire Al Faro Est, il est allé se réfugier en Gaspésie pendant trois semaines lors de l'hiver 2009. «Je n'arrivais pas à me concentrer, je suis trop hyperactif. Alors j'ai loué la maison du gardien de phare à Cap-d'Espoir pour travailler.» Il en est reparti avec un titre - Al Faro Est, littéralement «le phare Est -, une certaine nostalgie («Je pourrais vivre en Gaspésie», dit-il en admettant que c'est difficile à croire) et assez de chansons pour commencer la préproduction.

Puis, en mars dernier, il est entré dans le studio de Stacy Le Gallee à Montréal pour 40 séances d'enregistrement qui se sont étalées sur quatre mois. Pourquoi lui? «C'est le spécialiste des enregistrements vintage. Il trouvait que sur mes autres albums, on n'entendait pas assez le gras de ma voix, et c'est ce qu'il a voulu aller chercher. Pour ça, on a utilisé le vieux micro RCA, celui qui ressemble à un rasoir.»

S'ils ont beaucoup travaillé, l'Italien en lui n'a pas oublié l'essentiel. «Le premier jour, je suis arrivé avec une valise de bouffe. Il y a aussi des fois où mes parents débarquaient avec de la lasagne pour tout le monde...» Il rigole, mais il est fier du résultat: Marco Calliari voulait un disque de musique du monde de haut niveau, et il a demandé à chaque musicien de faire de chaque solo «sa meilleure performance».

«Je voulais que chaque toune ait sa couleur, et pour ça, j'ai laissé la porte ouverte aux musiciens.» Pour lui, il n'y a aucun problème à mélanger un flamenco avec un raï, une tarantelle avec une musique de mariachis. « J'ai été à la merci de mes chansons. Mais si ça coule, on peut le faire», dit-il en donnant comme exemple la chanson Bino di Bedonia, son «country grec», assez efficace merci.

Si Al Faro Est est musicalement soigné, Marco Calliari s'est aussi préoccupé des paroles. L'album est écrit entièrement en italien, avec quelques touches de français, d'espagnol et d'arabe. Mais comme il trouvait que sa maîtrise de sa langue maternelle était déficiente, il a pris des cours avec un prof de Concordia, Dario Brancato, qu'il a même crédité pour l'écriture de deux chansons tant il l'a aidé à les remanier.

Le chanteur de 36 ans en est convaincu: Al Faro Est est son meilleur disque parce qu'il a mûri, qu'il est «rendu là». Et il vise loin: la tournée de spectacles au Québec est déjà commencée, mais il a toujours l'Europe dans le collimateur, dans les pays où le travail est entamé: la Belgique, la France, la Suisse, l'Italie.

Avec cette carte de visite, ce n'est pas rêver en couleur que d'espérer une carrière internationale. «On s'entend que ça n'a pas coûté des pinottes, tout ça. Mais je ne crois pas à ça, moi, des voyages à Cancún, ou une hypothèque à payer toute sa vie. J'aime mieux faire un disque, voyager, rendre le monde heureux.» La retraite en Gaspésie, ce sera pour plus tard.