Mansa Sissoko et Jayme Stone ont lié leurs patrimoines musicaux respectifs : grâce à leur collaboration, le bluegrass appalachien et la musique traditionnelle malienne ont trouvé un terrain commun.

Le banjoïste était à Halifax, où il devait se produire en ce jeudi soir. En fait, le Torontois d'origine vit à Boulder, au Colorado. À Toronto, en 2004, Jayme Stone avait fait la rencontre du chanteur et joueur de kora Mansa Sissoko, alors que ce dernier vivait à Bamako... avant de s'installer à Québec il y a deux ans. Petite planète, dites-vous?

«C'était la première visite de Mansa au Canada, raconte Stone. Nous avons un ami commun qui le produisait, ce qui l'a mené à tourner dans des festivals canadiens. J'aimais la musique d'Afrique de l'Ouest mais je n'avais pas eu l'occasion de jouer avec des artistes du Mali.»

Inutile d'ajouter que la rencontre fut plus que concluante.

«Aussitôt que Mansa et moi avons commencé à jouer, ça a décollé. Il était surpris que je connaisse certaines musiques maliennes, et j'ai beaucoup aimé jouer avec lui. L'idée d'un projet commun m'est rapidement venue à l'esprit. Je suis allé ensuite au Mali pour y faire des recherches sur les musiques traditionnelles, de manière à pouvoir les adapter à mon jeu de banjo.»

Africa to Appalachia (puisque les Appalaches constituent le berceau du bluegrass, un des genres de prédilection de Jayme Stone) a ensuite été enregistré, réalisé, et a même remporté un Juno dans la catégorie musiques du monde cette année. Et pour cause: le mélange de bluegrass haut de gamme avec la musique traditionnelle d'un griot malien (depuis plusieurs générations, Sissoko est une famille de griots), le tout mâtiné d'un esprit jazzistique, produit un véritable échange de styles et de cultures.

Mais Mansa Sissoko n'est quand même pas venu s'installer en Occident pour y reproduire bêtement son folklore!

«Je suis installé avec ma famille à Québec depuis janvier 2007, relate-t-il. Pour vivre une nouvelle expérience, j'ai quitté Bamako. Mon père ne jouait pas de la kora, je l'ai apprise dans les familles de mes cousins, Toumani Diabaté et Ballaké Sissoko. Ces deux familles évoluent côte à côte. Nous avons rapport avec les Sissoko de Gambie, de Sierra Leone, du Sénégal, du Mali, etc. J'ai commencé à l'âge de 15 ans. En Amérique, je m'inspire de la musique traditionnelle et j'essaie de fusionner avec d'autres musiques. Avec le bluegrass, notamment.»

Ainsi donc, le chanteur et joueur de kora vit à Québec avec sa femme et ses quatre enfants. Ce qui ne nous le fait pas connaître pour autant sur ce territoire.

«Nous n'avons fait qu'une scène extérieure au Festival international de jazz de Montréal l'an dernier. À peu près inexistante l'an dernier, notre présence au Québec et dans les Maritimes s'est accrue cette année. Nous avons quand même une vingtaine de semaines de tournée dans le corps», soutient Jayme Stone.

Hormis ce avec Mansa Sissoko, le banjoïste mène les destinées d'un quartette qui a aussi récolté un autre Juno, cette fois pour un album dans la catégorie musique instrumentale de l'année. En mars prochain, Jayme Stone compte enregistrer un tout autre concept, avec lequel il partira éventuellement en tournée.

«Je collabore avec beaucoup de musiciens de styles variés; bluegrass, jazz, musique suédoise etc. Mon prochain projet se concentrera sur la musique de danse, la musique traditionnelle dont le violon est l'instrument central.»

Tout ça est encore loin, note-t-il néanmoins. «La vie de l'album créé avec Mansa n'est pas terminée, nous avons encore un an de tournée à l'agenda. Nous tournons en quartette, c'est-à-dire avec contrebasse et percussions (calebasse, batterie). La musique se développe à quatre, elle ne cesse d'évoluer. Chaque soir, de nouvelles choses se produisent.»

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Dans le cadre du festival Nuits d'Afrique, Mansa Sissoko et Jayme Stone se produisent ce soir, 21 h, au Balattou.