Guillaume, Nicola et Guillaume, les 3 gars su'l sofa, se sont fait remarquer il y a deux ans grâce à leurs chansons douces, vite qualifiées de drôles et d'absurdes. «Ça nous a un peu déplu», révèle Nicola Morel. Et si on s'était trompé et que ce trio n'était pas aussi comique qu'on a bien voulu le croire?

Impossible de ne pas remarquer la chanson À la plage, sur le premier album de 3 gars su'l sofa. Cette peinture hyperréaliste des vacances passées en famille au bord de la mer a d'ailleurs été le succès-surprise de l'été 2007. L'efficacité de la mélodie, la justesse du ton, la joliesse des harmonies vocales de Guillaume Monette, Nicola Morel et Guillaume Meloche-Charlebois, la pincée d'humour, tout concourrait à nous coller un sourire au milieu du visage.

 

Du coup, on a conclu qu'on avait affaire à un trio rigolo, dans la foulée des Trois Accords et André. À la grande surprise des principaux intéressés. «Ça nous a un peu déplu, révèle Nicola Morel (guitare rythmique et chant). On s'est toujours considérés comme des musiciens. On écrit des chansons. On n'a jamais voulu être invités au Festival Juste pour rire.

«Le fait qu'on ait été perçus comme des petits comiques, c'est plus lié à nos performances scéniques, croit-il. On a la blague facile dans la vie.» La forme a-t-elle porté ombrage au fond? Peut-être. La légèreté des mélodies et des harmonies vocales, le regard en apparence naïf posé sur les êtres et les choses, ces voix douces, un peu trop gentilles pour ne pas être pince-sans-rire, tout ça a sans doute contribué à façonner cette image. Une image qu'on est forcé de réévaluer à la lueur du deuxième album du trio.

Cerf-volant, publié un peu plus tôt cette semaine, n'est pas un disque fondamentalement drôle. Ourse et ciel, la première chanson, parle de chercher sa voie. Sous ses dehors jardiniers, À l'ombre raconte une rupture. Du stationnement, comme son titre ne l'indique pas, est une touchante déclaration d'amour. Mieux vaut se méfier des apparences avec les 3 gars su'l sofa.

D'amour et d'absurdité?

Nicola Morel affirme que le groupe n'a pas cherché à faire de Cerf-volant un disque plus sérieux. «Les gens disaient de notre premier album qu'il faisait sourire. C'est encore ça. On ne se tape pas sur les cuisses en écoutant ce disque-là, mais je ne pense pas qu'on se soit jamais tapé sur les cuisses en écoutant nos chansons», dit-il.

Cerf-volant parle surtout de relations humaines: couple, amis ou famille. Les personnages qu'on y croise sont souvent dans l'expectative. Dans -14°, un amoureux transi attend le bon moment pour embrasser l'objet de son affection. Dans Du stationnement, le narrateur affûte ses arguments pour convaincre son amoureuse de venir vivre avec lui: «Viens vivre chez nous y'a du stationnement (...) J'te laisse des tiroirs/Pis le tiers des supports.»

On constate bien sûr qu'offrir les deux tiers des supports aurait été plus invitant, mais surtout qu'il s'agit d'une manière franchement inhabituelle de démontrer son amour. «On a écouté beaucoup de country en faisant ce disque-là, expose Nicola Morel. Du Woody Guthrie, du Hank Williams. On s'est rendu compte que, dans le country, on ne passe pas par quatre chemins pour dire les choses.» Pour un homme de peu de mots, laisser le tiers des supports et vanter l'espace de parking dénoterait donc une sensibilité aux besoins de sa petite amie. Pas fou.

Venant de trois gars qui ont de l'esprit, ça passe facilement pour de l'ironie (ce dont ils sont parfaitement conscients), voire pour un clin d'oeil absurde. Là, Nicola Morel décroche. «On est loin des Denis Drolet et Ionesco», fait-il valoir. Pas faux. Il trouve leurs chansons «très terre à terre» et, sans dire que Cerf-volant est plus introspectif, il estime que ses comparses et lui s'y dévoilent plus que sur Des cobras, des tarentules. «Ça nous tente de nous rapprocher des gens. Et que les gens se rapprochent de nous», conclut-il, d'un ton équivoque.