Des médias internationaux, dont l'Agence France-Presse, et des organismes de protection des journalistes ont présenté jeudi à New York des «règles de sécurité pour les pigistes en zone hostile», en réponse à la vague d'enlèvements et d'assassinats dont ils ont été victimes récemment.

Le document, qui appelle à la mise en place de «pratiques et principes de sécurité globaux», édicte sept règles de base à respecter lorsque les médias signataires font travailler des journalistes locaux, des pigistes ou leurs propres reporters dans des environnements dangereux.

Avant d'aller couvrir un conflit ou une région touchée par une épidémie, par exemple, les journalistes devront avoir suivi une «formation aux premiers secours et au travail en milieu hostile».

Ils devront disposer d'une couverture médicale «valable dans les zones de conflit et les régions où existe un risque de contracter des maladies contagieuses» et d'équipement de protection «comme des gilets pare-balles et des casques».

En outre, les médias ont une «responsabilité morale» vis-à-vis des journalistes qu'ils emploient dans des zones dangereuses, «tant que les pigistes se conforment aux règles et aux instructions données par ces médias».

Outre l'AFP, la liste des signataires comprend les agences Associated Press (AP) et Reuters, la BBC, Bloomberg ainsi que Reporters sans Frontières (RSF), le Comité de protection des Journalistes (CPJ) et le Centre Pulitzer sur le reportage de crise.

«Il s'agit de la première étape dans un mouvement qui, comme nous l'espérons, permettra des avancées concrètes pour améliorer la sécurité des pigistes de tous les pays, mais aussi des journalistes locaux qui jouent un rôle crucial dans la couverture de zones à risque et sont les premiers à souffrir de la violence contre les journalistes à travers le monde», a déclaré David Millikin, Directeur régional de l'AFP pour l'Amérique du Nord.

Cet accord, présenté à l'École de journalisme de l'université Columbia à New York, est le fruit de discussions lancées en septembre dernier entre les responsables de grands médias, et qui ont ensuite inclus les associations de pigistes et les défenseurs de la liberté de la presse.

«Bon début»

Dans son classement annuel publié jeudi, Reporters sans Frontières a noté une «régression brutale» de la liberté de la presse en 2014, conséquence notamment de l'action de groupes comme l'État islamique et les islamistes nigérians de Boko Haram.

«En 2014, de nombreux États et acteurs non étatiques ont utilisé l'information comme arme de guerre», explique RSF, à l'instar de l'EI qui n'a pas hésité à diffuser des vidéos montrant la décapitation de journalistes enlevés par les jihadistes.

Le pigiste américain James Foley, premier otage américain décapité par l'EI le 19 août après plus d'un an et demi de détention, s'est ainsi transformé en symbole de la nouvelle réalité affrontée par ces reporters.

James Foley avait notamment couvert la rébellion contre le président syrien Bachar al-Assad pour l'AFP ou le groupe de presse américain GlobalPost.

Un peu plus tard, les djihadistes ont diffusé l'exécution de Steven Sotloff, un autre pigiste américain.

Ces assassinats «représentent une menace fondamentale contre les professionnels de l'information, mais aussi contre le journaliste indépendant», font valoir les signataires de la charte présentée à Columbia.

«À l'heure où les journalistes affrontent des risques de plus en plus grands pour collecter les informations dont le monde a besoin, il est crucial de mettre en place de meilleures pratiques qui leur permettent de faire leur travail de la façon la plus sûre possible», a indiqué Kathleen Carroll, Directrice de l'information d'AP.

Pour Vaughan Smith, président de l'association Frontline Freelancer Register, qui représente 500 pigistes à travers le monde, le document est «un bon début dans un processus qui garantira le respect, la dignité, la protection et, in fine, le juste salaire que les pigistes méritent».