L'initiative du directeur général des éditions Septentrion, Gilles Herman, qui visait à sensibiliser la population au conflit entre Renaud-Bray et Dimedia, n'aura duré qu'environ 48 heures. Mardi, Gilles Herman a mis en ligne un site web, maintenant fermé, intitulé «Mes livres préférés chez Renaud-Bray». Il s'agissait d'une page rappelant les milliers de titres absents des librairies de la chaîne en raison du conflit avec le distributeur Dimedia et on y invitait les lecteurs à écrire à Renaud-Bray pour y demander le retour de ces titres. Le but était de devenir viral sur les réseaux sociaux. Or, Gilles Herman a reçu une mise en demeure de Renaud-Bray exigeant la fermeture de ce site avant 16h30 jeudi, ce à quoi il s'est plié.

«Je ne me suis pas caché, j'aurais pu faire héberger le site à Taïwan, mais je ne pensais pas que Renaud-Bray allait décider de m'envoyer une mise en demeure, a expliqué Gilles Herman à La Presse. On y évoque une exploitation abusive de la marque de commerce, de l'information diffamatoire, des pertes de revenus lié à de la mauvaise presse.... J'ai fermé le site, parce que je n'ai pas de combat personnel à mener. Moi, je n'ai pas de firme d'avocats et je ne veux surtout pas en avoir une. Je ne veux pas mettre en danger ma compagnie.»

«C'est un litige entre deux entreprises privées, il n'y aura aucun commentaire, ce n'est pas d'intérêt public», a répondu Denise Courteau, responsable des communications de Renaud-Bray, jointe par La Presse.

«Pour moi, ça s'arrête là, a précisé Gilles Herman. J'ai espoir d'avoir quand même réveillé quelque chose pour la période de Noël. C'est dommage, car je vais être le premier à dire que ce sont de bonnes librairies, Renaud-Bray. Le problème est présentement au niveau de l'offre. Je dis aux lecteurs qu'ils n'ont plus leurs livres, qu'un pan important de la littérature francophone et nationale ne se trouve plus chez Renaud-Bray. Par exemple, on ne trouve pas le Goncourt ou le Médicis. Cette mise en demeure vient prouver que la chaîne est intransigeante et ne désire pas un règlement rapide du conflit. Tout le monde désire un règlement rapide de la situation.»

Renaud-Bray, qui possède une trentaine de librairies au Québec, est actuellement dans un bras de fer avec le distributeur Dimedia à propos d'un litige sur une modification des conditions commerciales. Dimedia aurait un compte à recevoir de près d'un demi-million de dollars de Renaud-Bray et a suspendu la livraison de ses nouveautés à la chaîne. L'affaire est devant les tribunaux.

Sur le site lancé (et fermé) par Gilles Herman, on pouvait y lire ceci: «Depuis le mois d'avril, les livres de plus de 375 éditeurs francophones dont 44 québécois ne sont plus disponibles chez Renaud-Bray. Une modification unilatérale et non négociée des conditions commerciales par la chaîne de librairies ainsi qu'une accumulation de factures non payées ont obligé le distributeur Dimedia à interrompre ses livraisons. Depuis, toutes les démarches de médiation ont échoué et les deux parties ne se parlent plus qu'à travers leurs avocats.»

«En arrière-plan se dessine une tentative de contournement de la loi du livre par un joueur important qui tente ainsi de se prévaloir d'une position prédatrice dans l'écosystème du livre. Les éditeurs québécois réaffirment le rôle primordial qu'occupe le distributeur pour la santé de la littérature d'ici et demandent à Renaud-Bray et Dimedia de remédier le plus rapidement possible à cette situation qui ne fait que pénaliser les auteurs et les lecteurs.»

Le lien actuel (http://www.meslivreschezrb.com/) annonce ceci: «Ce site a été fermé le jeudi 27 novembre à midi suite à une mise en demeure. Vous trouverez l'entièreté de l'offre éditoriale francophone dans toutes les librairies indépendantes ainsi que dans les succursales Archambault.»