Grand manitou des spectacles extérieurs du festival Montréal complètement cirque, Anthony Venisse y présentera aussi cette année, en salle, son spectacle Le concierge. Qu'il soit metteur en scène dirigeant une quarantaine d'acrobates ou qu'il se produise en solo, Anthony Venisse incarne à lui seul l'esprit du cirque, poétique, ludique et rassembleur. Portrait en trois projets d'un homme à tout faire.

1-Les Minutes complètement cirque

Sortes de «flash mob» circasiennes, les Minutes complètement cirque sont nées il y a cinq ans, en même temps que le festival. «C'est devenu assez emblématique », souligne Anthony Venisse, qui en est le metteur en scène depuis les débuts.

Le concept n'a pas changé: chaque jour, pendant le festival, une quarantaine d'acrobates déambulent dans les rues du Quartier latin, entraînant avec eux les spectateurs vers un endroit précis où a lieu une performance de cinq minutes.

«En matière de logistique et de développement, c'est cinq fois plus gros qu'avant, lance Anthony Venisse. Quand on a commencé, le noyau dur comprenait trois concepteurs. Nous sommes maintenant plus de dix, et je parle juste de l'équipe de création.»

Cette année, trois univers différents seront présentés: une minute aérienne, une qui est plus «grand jeu» et une minute «à répondre», inspirée par la musique traditionnelle québécoise.

«Nous avons diminué de moitié le nombre de minutes: la première année, il y en avait huit! C'était amusant, mais nous avons eu vite envie d'approfondir chaque concept et d'en faire moins. Je dirais que maintenant, c'est plus dense», laisse savoir Anthony Venisse.

L'idée directrice demeure de «surprendre les gens, d'être sur le plancher et de jouer avec eux». «J'aime le mot "peuple". Ça peut sembler condescendant mais, pour moi, ça signifie communauté, vraie vie.» Ainsi, ajoute Anthony Venisse, le cirque se retrouve dans la rue, à la portée de tous. «On donne le cirque à tout le monde. Je suis chanceux de pouvoir faire ça.»

+ Dans le Quartier latin du 3 au 13 juillet à 18h30 et à 21h30.

2-Babel_Remix

La «quatrième minute», c'est Babel_Remix, spectacle extérieur tout en verticalité présenté place Émilie-Gamelin. Créé pour la première fois l'an dernier, il a connu un tel succès qu'il est de retour cette année.

Dans un immense échafaudage, les 40 «minutiens» - le nom donné aux acrobates des Minutes - présentent chaque soir une création originale de près d'une demi-heure. «Je ne voulais pas une scène toute belle, mais bien une structure urbaine qui s'intègre dans la ville, explique Anthony Venisse. C'est la même que l'an dernier, mais améliorée.»

Un trampoline y a été intégré, de l'espace pour tendre une slackline [équivalent du fil de fer, mais en «lousse»] aussi. «Nous avons gardé le mât chinois en haut de la structure. C'est une discipline impressionnante, c'est très haut!»

Ceux qui l'ont vu l'an dernier le savent: Babel est vraiment à couper le souffle. «On a gardé - et même poussé - ce côté spectaculaire. Ils sont deux acrobates pour le numéro au mât: c'est difficile de faire plus époustouflant!»

Trois musiciens - une violoniste, un accordéoniste et un trompettiste - sont aussi intégrés au spectacle; ils ont été choisis pour leur talent, mais aussi pour leurs capacités acrobatiques. «Avec quelques acrobates qui savent aussi jouer de la musique, on a même créé un petit big band!», dit en rigolant Anthony Venisse, qui tient à souligner que tous les éléments de la conception - musique, costumes, accessoires, décors - ont été créés expressément pour Babel et les Minutes.

L'histoire que raconte Babel est celle qu'on connaît, mais à l'envers: plutôt que les gens soient séparés parce qu'ils parlent des langues différentes, «tout le monde est réuni par le langage du cirque», explique le metteur en scène.

«L'idée est de construire ensemble cette tour. D'ailleurs, Babel est un vrai travail de groupe. Même s'il y a des solos, les autres sont toujours là en appui.» Le résultat, analyse-t-il, est un spectacle fait d'images collectives, de travail commun, d'unité et de rassemblement.

+ À la place Émilie-Gamelin le 2 juillet à 21h30, et du 3 au 13 juillet à 19h et à 22h.

3-Le concierge

Outre cet immense travail collectif un peu fou, Anthony Venisse est aussi Le concierge, personnage clownesque qu'il présente en solo et dans lequel il joue du piano, danse et fait un numéro de trapèze.

Le concierge, qu'il a écrit, mis en scène et pour lequel il a composé la musique, est né il y a quelques années de son désir de voir jusqu'où il pouvait aller en travaillant seul. «C'est un défi que je m'étais donné; c'est vraiment excitant de dessiner et écrire un spectacle le plus loin possible seul. Puis, à un moment, on voit nos limites. À partir de là, j'ai demandé l'aide de Félix Boisvert pour la conception sonore et à Bruno Rafie pour la lumière.»

S'il n'a pas eu l'occasion de le jouer très souvent, ce retour - à la demande du Festival - devrait lui permettre de partir en tournée avec lui. «Dix ans plus tard, le spectacle a été resserré et le personnage a évolué. C'est la même histoire et la même essence, dans une forme consolidée et améliorée.»

Le concierge travaille la nuit dans un théâtre, lieu où, pour échapper à son «quotidien plate», il peut laisser voyager son imagination. «Il va s'inventer un public, puis devenir magicien, pianiste... et puis, oups, son imaginaire va être plus puissant que lui et il se retrouvera imbriqué dans des choses pas prévues.»

«Oui, c'est un clown, mais je ne voulais pas rester que dans les gags; je voulais aussi de la poésie, de l'émotion. Je voulais voir son âme se dénuder», explique Anthony Venisse à propos de son personnage.

Anthony Venisse aime bien passer de son rôle de metteur en scène à celui de clown solitaire. «Je passe du tout au tout, mais ça se complète et ça nourrit pas mal de pôles de ma vie. C'est drôle parce que le point de départ du Concierge était d'essayer de voir jusqu'où je pouvais aller seul, comme un voyage en solitaire. Avec Babel et les Minutes, l'expérience permet de voir tout ce qu'on peut faire avec un gros groupe. C'est comme le retour du balancier.»

Mais le stress est le même, qu'il présente un spectacle devant une salle de 50 personnes ou qu'il en dirige un autre sur une place publique devant des milliers de spectateurs. Et c'est justement ce qui le fait courir... «C'est notre adrénaline à tous. Quand on est dedans, on se dit: quel métier de fou! Et quand c'est fini, on a hâte au prochain projet...»

+ Au Quat'Sous, du 11 au 13 juillet.