Trois troupes belges ont répondu cette année à l'invitation du festival Montréal complètement cirque. Avec leur approche ouverte de l'art circacien, leur humour absurde et leur vision du monde toujours un peu de biais, Carré Curieux, les Zyrgomatik et Okidok s'amènent chez nous dans le but de nous faire rire et de nous étonner.

Ils sont magnifiquement beaux et musclés, ils sont muets et ils sont capables de réaliser des prouesses acrobatiques à couper le souffle. Qui sont donc ces hommes parfaits ? Benoît Devos et Xavier Bouvier, qui forment le duo Okidok.

Entre trois semaines de spectacle à Tahiti et quelques représentations en France et en Belgique avant de s'envoler, selon ses mots « vers les superbes contrées québécoises » - ils seront au Festival d'été de Québec avant de venir à Montréal -, Benoît Devos a aimablement accepté de nous accorder une entrevue en direct de sa Belgique natale. Une chance inespérée, étant donné que, dans son monde clownesque du moins, cet acrobate « au corps de rêve » est très demandé.

En jetant un coup d'oeil aux photos du spectacle, on comprend mieux l'ironie du Belge... Ce sont deux gars ordinaires, en caleçon géant, qui nous convient à leurs exploits dans le spectacle Slips inside, nommé ainsi parce que ces clowns de rue se « glissent » à l'intérieur, dans une salle, et qu'ils sont en slip, de surcroît.

Le deuxième spectacle en salle du duo sera plus dépouillé que Ha ha ha (passé par la TOHU en 2006) qui alliait costumes, maquillages, nez rouges, grosses chaussures, masques et marionnettes. « On a fait le choix d'enlever tous les apparats. On aurait pu le faire tout nu, mais on aurait subi les foudres des églises et autres puritains », explique Devos, qui ajoute plus sérieusement : « De se mettre en slip kangourou, c'est aussi une manière de parler de tous ces beaux corps dénudés qu'on voit sur des affiches géantes dans la rue. »

Le mâle de rêve

En sous-texte des acrobaties et des frasques muettes, on trouvera un gros clin d'oeil à l'idéal masculin d'aujourd'hui. « On pourrait dire que l'image désuète qu'on a du clown, avec son costume étriqué et sa cravate, vient de la belle époque où il fallait porter un frac [un habit de cérémonie] pour être respectable. Maintenant, nos clowns s'ancrent dans l'imagerie contemporaine, où il faut être un mâle aux pectoraux et aux abdominaux de rêve. »

Devos et Bouvier se connaissent depuis l'âge de 12 ans. Ils ont fréquenté l'École nationale de cirque de Montréal après avoir fait leurs classes en théâtre à Bruxelles, selon la méthode de Jacques Lecoq. « Le clown est le comédien du cirque, alors ça nous semblait important d'avoir un bagage théâtral qui n'était pas centré sur l'élocution des grands textes, mais où l'acteur travaille beaucoup avec son corps et est créateur », explique Devos, qui est porteur pour les passades acrobatiques, alors que son collègue est voltigeur, plus petit gabarit oblige.

« Sur scène, on est comme Laurel et Hardy, même si dans la vie, nos différences physiques ne se voient pas tant que ça. Il faut dire que nos corps sont totalement magnifiés sur scène », blague le Belge. Pour lui, outre le reflet déformé et humoristique qu'il nous offre, le clown allège le cynisme ambiant. « C'est un gros problème de notre époque. Le clown n'est pas dans cette soupe-là, il est davantage dans l'humanité, existe plus tendrement, pour dire des gros mots », précise-t-il. Voilà, c'est ce qui manquait au portrait du mâle parfait : un petit côté tendre...

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Slips inside, du 20 au 23 juillet à la TOHU.