Le Canadien Pacifique a abandonné son projet de fusion avec l'américaine Norfolk Southern, quelques jours après que le département américain de la Justice eut soulevé certaines inquiétudes par rapport à la prise de contrôle du transporteur ferroviaire établi en Virginie.

Le CP a initialement dévoilé sa proposition de fusion en novembre, une transaction qui aurait créé le plus grand transporteur ferroviaire en Amérique du Nord. Elle aurait coûté environ 30 milliards $ US et prolongé le réseau ferroviaire du CP, particulièrement dans l'est des États-Unis et dans la région de Chicago, une importante plaque tournante pour le transport ferroviaire.

Mais le transporteur a indiqué lundi qu'il ne demanderait plus aux actionnaires de Norfolk Southern de voter en faveur de la tenue de négociations en vue d'une fusion, lors de leur assemblée annuelle du 12 mai.

«Nous sommes conscients depuis longtemps qu'une consolidation est nécessaire pour que l'industrie ferroviaire nord-américaine puisse répondre aux exigences d'une économie croissante, mais puisqu'il n'y a pas de voie clairement tracée pour une fusion amicale en ce moment, nous allons concentrer tous nos efforts et notre énergie pour servir nos clients et créer de la valeur à long terme pour les actionnaires du CP», a indiqué le chef de la direction du CP, Hunter Harrison, dans un communiqué.

La décision du CP survient après que le département américain de la Justice eut émis des commentaires négatifs vis-à-vis de la proposition de l'entreprise consistant à mettre sur pied une convention de fiducie en attendant d'obtenir les approbations réglementaires pour la fusion.

Selon le département, la convention de fiducie aurait compromis l'indépendance de Norfolk Southern et, dans les faits, regroupé les chemins de fer avant que l'examen du U.S. Surface Transportation Board ne soit complété.

Le département de la Défense a aussi émis une opinion, affirmant qu'un examen complet du Surface Transportation Board était requis parce qu'il était possible qu'une fusion puisse avoir un impact «adverse pour la défense nationale», d'après une lettre écrite au conseil d'administration et datée de jeudi dernier. Le département a souligné que les deux entreprises ferroviaires desservaient d'importantes bases militaires qui ont besoin de service ferroviaire pour mener à terme leurs missions.

Le département s'est aussi dit troublé du fait qu'en vertu de la proposition de convention de fiducie, M. Harrison aurait pu devenir un haut dirigeant de Norfolk Southern avant même que les autorités réglementaires ne tranchent au sujet de la fusion, ce qui aurait pu le placer dans une situation où il aurait pris des décisions d'affaires avec des intérêts possiblement concurrents.

Selon l'analyste John Larkin, de la firme Stifel Nicolaus, le Canadien Pacifique devra essentiellement miser sur l'élection d'un président républicain soutenant, cet automne, pour pouvoir ressortir son projet de chemin de fer transcontinental. Mais M. Larkin croit aussi que l'obtention d'une approbation des forces militaires américaines pourrait aussi être plus compliquée.

«Mais M. Hunter est énergique et il aimerait qu'un chemin de fer transcontinental, dans lequel il croit passionnément, soit le joyau de la couronne de sa brillante carrière dans le secteur ferroviaire», a expliqué M. Larkin dans un courriel.

Norfolk Southern s'était objectée à la proposition du CP pour diverses raisons, notamment parce que le prix offert était trop faible à ses yeux et en raison de la résistance de ses consommateurs et des autorités réglementaires américaines. Dans un communiqué de presse émis lundi, le chemin de fer a remercié ses actionnaires et ses employés pour leur appui et indiqué qu'il verrait à l'amélioration de ses activités.

Le Canadien Pacifique exploite des chemins de fer au Canada et dans certaines régions du Midwest et du sud des États-Unis, tandis que Norfolk Southern est surtout présent sur la côte Est, dans le Midwest et au Sud.

L'action du Canadien Pacifique a avancé lundi de 4,60 $ à la Bourse de Toronto, pour clôturer à 179,91 $, tandis que celle de Norfolk a reculé de 2,21 $ US à 79,28 $ à la Bourse de New York.