Bombardier devra procéder à des mises à pied si la Société de transport de Montréal (STM) lance un nouvel appel d'offres pour remplacer les voitures du métro de Montréal.

«Nous avons 500 employés à Saint-Bruno, l'équivalent à La Pocatière, a indiqué la vice-présidente au développement des affaires de Bombardier Transport, Ann MacDonald, en entrevue avec La Presse Affaires. Nous ne pouvons pas maintenir tout ce beau monde occupé en l'absence de contrat significatif.»

 

L'usine de La Pocatière, qui a déjà employé près de 1300 employés, effectue surtout des contrats pour le marché américain. Or, en raison de la crise, les nouvelles commandes se font rares du côté des États-Unis.

«On ne peut pas penser que, pendant deux ans, nous allons être capables de soutenir un niveau d'emploi de cet ordre en l'absence de commandes importantes», a affirmé Mme MacDonald.

Bombardier et son partenaire, Alstom, ont envoyé une lettre de quatre pages hier matin à la STM pour contester les récentes déclarations du manufacturier espagnol CAF (Construccionnes y Auxiliar de Ferrocarriles) quant à son expérience et à ses capacités techniques et financières.

«Ça semble témoigner d'une certaine panique chez Bombardier», a commenté le porte-parole de CAF, Philippe Roy.

CAF n'a pas participé au premier appel d'offres lancé par la STM pour remplacer les voitures du métro de Montréal, en juillet 2008. Elle a toutefois répondu lorsque la société a lancé un avis public international, en janvier dernier, pour faire savoir que le contrat serait plus important que prévu. Au lieu de porter uniquement sur le remplacement des 336 voitures MR-63, le contrat portera aussi sur le remplacement des 423 voitures MR-73, en plus de comporter une option pour 288 voitures de plus.

Si CAF répond aux critères énumérés à l'avis public, la STM devra lancer un nouvel appel d'offres. Ce qui pourrait provoquer un délai additionnel de deux ans dans le processus de remplacement des voitures.

«De tels délais, au-delà des conséquences désastreuses pour la STM et pour ses usagers, porteraient des préjudices considérables au consortium et mettraient en danger le maintien de l'emploi et de l'expertise de pointe dans nos sites et ceux de nos fournisseurs au Québec», ont écrit le président de Bombardier Transport pour l'Amérique du Nord, Raymond Bachant, et le président d'Alstom pour l'Amérique du Nord, Pierre Gauthier, dans leur lettre à la STM.

Des doutes sur CAF

Le consortium Bombardier-Alstom a fait valoir que, contrairement à ce que soutient CAF, la firme espagnole n'a obtenu qu'un seul contrat de conception et de fabrication de voitures et de bogies sur pneus, celui de Santiago, signé en 2007. Or, ces voitures ne roulent que depuis six mois, alors que la STM exigerait une expérience de cinq ans d'usage. Toutefois, cette exigence ne fait pas partie des critères énumérés dans l'avis international.

«C'est dans l'appel d'offres initial, a fait valoir Mme MacDonald. L'évaluation doit se faire en fonction des requis de l'appel d'offres.»

M. Roy a répliqué que CAF avait monté des voitures de métro sur pneus dans le cadre de deux contrats signés à Mexico en 1992 et 2002. Le consortium a toutefois fait valoir que la contribution de CAF s'était limitée à la fabrication des caisses des voitures. Il a également souligné que la proposition de CAF n'avait pas passé la première étape de qualification pour un contrat de voitures de métro pour la ville de Washington.

M. Roy a voulu minimiser cet élément.

«Il faut savoir que Washington voulait des voitures en acier inoxydable, a-t-il lancé. Nous n'en faisons pas, nous faisons surtout des voitures en aluminium.»

Le consortium Bombardier-Alstom doute fort que CAF peut livrer une première rame 32 mois après l'attribution du contrat.

«Avec notre réseau de fournisseurs, avec les assises que nous avons ici, nous pouvons respecter ce délai, a affirmé Mme MacDonald. Nous avons beaucoup de difficulté à concevoir qu'une firme qui n'a pas d'assises ici et qui ne connaît pas les requis de l'appel d'offres puisse affirmer qu'il n'y a aucun enjeu avec ce délai.»