Le déclin des ventes de journaux et de magazines en papier amène la papetière Kruger à réorienter sa production et à se tourner vers des produits où la demande est croissante, mais non sans une aide gouvernementale considérable.

Kruger a ainsi annoncé, vendredi, en présence du premier ministre Philippe Couillard et de plusieurs membres de son cabinet, des investissements totalisant 107,5 millions pour diversifier la production de ses usines Wayagamack, à Trois-Rivières, et Brompton, en Estrie.

«Kruger, jadis, a été un gros producteur de papier journal et de papier pour publication, mais nous avons commencé un processus de diversification il y a plusieurs années», a expliqué le chef des opérations de la division papier-publications chez Kruger, François D'Amours, en entrevue avec La Presse canadienne.

La papetière regroupe ainsi les actifs des deux usines pour créer une nouvelle entité, Papiers de spécialité Kruger Holding S.E.C., dans laquelle Québec investit 44,6 millions de dollars et dont il devient actionnaire à 37,5 %. Investissement Québec ajoute également des prêts et une garantie de prêt totalisant un peu moins de 60 millions.

La nouvelle entité comprend également la centrale de cogénération à la biomasse adjacente à l'usine de Brompton.

Papiers de spécialité Kruger Holding S.E.C. investira 107,5 millions au cours des trois prochaines années pour assurer la transition, sommes qui serviront notamment à l'achat de nouveaux équipements de production et à modifier des équipements existants.

L'entreprise prévoit réduire de plus de 50 % la production de papier couché pour magazines à son usine Wayagamack d'ici cinq ans et éliminer complètement la production de papier journal à l'usine de Brompton d'ici trois ans. Ces usines se tourneront notamment vers les papiers pour emballages alimentaires, les produits d'étiquetage et le papier couché pour impression numérique sur presses à jet d'encre, utilisé notamment pour les catalogues et circulaires à grand tirage personnalisés pour le publipostage ciblé.

La transformation aura des retombées périphériques puisqu'elle implique un approvisionnement annuel supplémentaire de 100 000 tonnes métriques de copeaux, ce qui aura un impact positif direct du côté des scieries.

Le projet nécessitera aussi des investissements à la centrale de cogénération à la biomasse de Brompton, ainsi qu'à l'atelier de pâte thermomécanique de l'usine de Trois-Rivières, qui approvisionnera l'usine Wayagamack en matière première.

L'usine Trois-Rivières, qui a également fait l'objet d'investissements majeurs de transition il y a un an, ne sera toutefois pas intégrée à la nouvelle entité corporative. Cette usine produit toujours du papier journal, mais une bonne partie de sa production a été convertie au cartonnage.

«L'usine Trois-Rivières va blanchir la pâte PTM au peroxyde, ce qui va donner une pâte très, très blanche qui sera exportée à notre usine de Wayagamack pour diversifier davantage notre carnet de commandes dans les produits couchés beaucoup plus blancs que les produits actuels», a précisé M. D'Amours.

Les investissements permettront de préserver 328 emplois à l'usine Wayagamack de Trois Rivières et 248 autres à l'usine de Brompton.

«Il s'agit de la totalité des emplois, a souligné M. D'Amours. Nos employés en sont très heureux, considérant que le secteur dans lequel on a évolué ces dernières années a vu ses marchés s'effriter.»

Cette affirmation a été confirmée par le directeur québécois d'Unifor, Renaud Gagné, qui était présent à l'annonce vendredi à Trois-Rivières.

Le syndicat représente quelque 250 employés de l'usine Wayagamack et ceux de l'usine Trois-Rivières.

M. Gagné a salué l'initiative qui contribue «à repositionner nos usines dans la production de créneaux d'avenir. (...) C'est ce qu'il faut faire pour assurer la pérennité des emplois et de l'industrie», a-t-il déclaré.