La disparition prochaine de l'amortissement hypothécaire de 35 ans entraîne un miniboom immobilier au Canada.

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Selon les données publiées hier par l'Association canadienne de l'immeuble (ACI), le nombre de transactions a grimpé de 4,5% en janvier par rapport à décembre. Depuis le creux atteint en juillet dernier, les ventes ont rebondi de 25% à l'échelle du pays.

Bien des ménages ont «devancé» leur achat avant l'entrée en vigueur de nouvelles règles de financement plus sévères le 18 mars prochain, surtout dans les villes les plus chères du pays, a souligné Gregory Klump, économiste en chef de l'ACI. Une frénésie très palpable à Toronto et Vancouver, mais aussi à Montréal.

Beaucoup d'acheteurs «se grouillent» ces jours-ci à trouver une maison dans la métropole, tandis que de nombreux propriétaires cherchent à refinancer leur prêt actuel sur un terme de 35 ans, a observé Sylvie Rousson, courtière hypothécaire chez Multi-Prêts. «En janvier, j'ai fait le double de mon volume de l'an dernier.»

Le nombre de transactions a baissé de 6,6% le mois dernier au Canada si l'on compare à janvier 2010, a indiqué l'ACI, mais ce mois avait été exceptionnellement actif partout au pays.

Le prix moyen des propriétés s'est élevé à 343 675$ en janvier, sans changement par rapport aux trois derniers mois et en hausse de 4,5% sur un an. Sur une base corrigée des variations saisonnières, le prix moyen a atteint 357 000$, un sommet de tous les temps au Canada, a souligné Douglas Porter, économiste à la BMO.

Ce record s'explique en bonne partie par la vigueur exceptionnelle de Vancouver, a-t-il précisé. Sur un an, les prix y ont explosé de 19,6%, à 760 000$ en moyenne. Sans l'apport de cette ville, le prix moyen aurait grimpé de seulement 2% depuis un an pour l'ensemble du Canada.

Ralentissement

Quoi qu'il en soit, le regain d'activité observé en janvier - et qui devrait perdurer jusqu'au 18 mars - laisse présager des mois plus tranquilles après l'entrée en vigueur des nouvelles normes sur le financement, a souligné hier Diana Petramala, économiste à la Banque TD. Elle prévoit une «courte période» de faiblesse du marché.

En plus de réduire à 30 ans la période d'amortissement maximale des prêts hypothécaires, Ottawa abaissera à 85% de la valeur de la maison la somme qui pourra être empruntée lors d'un refinancement et cessera d'assurer les marges de crédit garanties par les propriétés. Ce sera la troisième fois que le gouvernement resserre les critères depuis octobre 2008.

Louis Gagnon, professeur de finances à la Queen's School of Business et expert des marchés financiers, salue ce nouveau tour de vis. D'autant plus que le ratio d'endettement des Canadiens - à 148% du revenu disponible - soulève de plus en plus d'inquiétudes.

«Toute mesure qui sert à dissuader les Canadiens de s'engager trop profondément dans l'endettement ne peut qu'aider», a fait valoir M. Gagnon.

Ces nouvelles règles empêcheront plusieurs ménages de réaliser leur rêve d'acheter une maison, ce qui n'est toutefois pas une mauvaise chose, ajoute le professeur. «C'est la façon diplomatique d'obtenir un équilibre un peu plus soutenable sur le plan social, de mettre des contraintes qui vont empêcher les éléments les plus vulnérables du système de s'endetter au-delà de leur capacité.»

Le marché immobilier canadien reste équilibré à l'échelle nationale, mais l'ACI avertit que les «effets à long terme» des nouvelles règles sur le financement sont encore inconnus. En conséquence, le regroupement d'agents immobiliers demande à Ottawa d'attendre un certain temps après le 18 mars avant de songer à resserrer une nouvelle fois les critères d'emprunt.