Des tarifs d'électricité réduits pendant 10 ans ne réussiront probablement pas à attirer autant d'entreprises grosses consommatrices d'énergie que le souhaite le gouvernement Marois.

«Ce n'est pas fait pour les grands industriels», affirme Luc Boulanger, directeur exécutif de l'Association québécoise des consommateurs industriels d'électricité, qui regroupe les entreprises énergivores déjà présentes au Québec.

Le gouvernement veut que les imposants surplus d'Hydro-Québec soient vendus au rabais à des entreprises qui voudraient s'établir au Québec. Le tarif industriel actuel, de 4,6 cents le kilowattheure, serait réduit à 3 cents ou 3,5 cents, selon ce qu'il a été possible d'apprendre.

Ce tarif réduit augmenterait graduellement pour rejoindre le tarif régulier au bout de 10 ans.

Selon Luc Boulanger, l'horizon de 10 ans imposé par le gouvernement est trop court. «Des investissements, ça se planifie sur une période beaucoup plus longue, sur 30 ou 40 ans», explique-t-il. En outre, aucune entreprise n'aimera que sa facture augmente chaque année, estime-t-il.

À lui seul, ce rabais d'électricité devrait générer des investissements de 1,6 milliard et créer 10 300 emplois, selon les estimations du ministère des Finances et de l'Économie. C'est un objectif très ambitieux, considère le porte-parole des plus importants clients d'Hydro-Québec.

Les alumineries et les autres entreprises qui consomment beaucoup d'électricité sont restées sur leur faim, cette semaine, parce que la politique économique du gouvernement Marois n'a pas répondu à leurs revendications. Elles demandent depuis longtemps une réduction du tarif L comme condition au maintien et à la poursuite de leurs investissements au Québec.

La politique rendue publique lundi dernier a toutefois un côté positif, selon Luc Boulanger, parce qu'elle reconnaît que le tarif L n'est plus compétitif pour attirer des investissements. «Le tarif L ne fait plus la job, c'est ce qu'on dit depuis longtemps et que le gouvernement reconnaît maintenant», dit-il.

15 mégawatts

Le rabais dans les tarifs d'électricité ne s'adresse pas aux alumineries, dont les besoins en énergie sont très importants, mais aux entreprises qui consomment 15 mégawatts et plus, ce qui est quand même considérable. Ça équivaut, par exemple, à la consommation totale d'une petite ville de 10 000 habitants.

Le gouvernement veut aussi privilégier quelques secteurs d'activités seulement: la transformation des ressources, la fabrication de composantes liées au transport électrique et aux technologies vertes, de même que les centres de données.

L'ouverture vers les centres de données est une volte-face pour Québec, qui n'en a jamais voulu parce qu'ils ne créent pas beaucoup d'emplois pour chaque mégawatt qu'ils accaparent. La firme française OVH, qui a installé à Beauharnois ce qu'elle dit être le plus important centre de données du monde, emploie 117 personnes, alors que ses serveurs ont besoin de 40 mégawatts de puissance. OVH a investi 127 millions pour s'installer dans l'ancienne usine de Rio Tinto Alcan à Beauharnois.

Hausse peu probable des exportations d'Hydro-Québec

Il est peu probable que le Massachusetts augmente ses achats d'électricité auprès d'Hydro-Québec à moyen terme, a indiqué hier le gouverneur de l'État, Deval Patrick.

De passage à Montréal, M. Patrick a souligné que le projet de nouvelle ligne de transport piloté par Hydro et le distributeur américain Northeast Utilities faisait actuellement l'objet d'une «grande controverse» au New Hampshire. Si elle devait voir le jour, la ligne permettrait d'accroître les exportations québécoises d'électricité dans tout le Nord-Est américain.

Le gouverneur a aussi noté que son administration encourage activement la production d'électricité propre au Massachusetts. Grâce à un programme de subventions, la production d'énergie éolienne et solaire a crû de façon exponentielle au cours des dernières années.

Cette nouvelle donne pourrait-elle réduire les besoins du Massachusetts auprès d'Hydro-Québec? «Peut-être un jour, mais c'est un horizon lointain», a répondu Deval Patrick.

Le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales, Alexandre Cloutier, et le président d'Hydro, Thierry Vandal, ont assisté au discours que M. Patrick a prononcé hier devant le Conseil des relations internationales de Montréal.

Hydro-Québec vend régulièrement de l'électricité à l'État de 6,7 millions d'habitants par le biais du marché de gros de la Nouvelle-Angleterre. «L'information reliée à ces transactions est de nature commerciale et n'est pas publique», a précisé une porte-parole de la société d'État, Ariane Connor.

Même si la production d'électricité propre est en croissance au Massachusetts, les centrales alimentées au gaz naturel, au charbon et à l'énergie nucléaire continuent de dominer largement le tableau.