Les villes du Québec paient depuis des années des factures salées pour enfouir leurs déchets. Elles ont maintenant trouvé le moyen de transformer cette dépense en revenus, en vendant le gaz naturel généré par ces déchets à Gaz Métro.

C'est le cas de Saint-Hyacinthe, qui a conclu une entente en vertu de laquelle Gaz Métro lui achètera tout le gaz qu'elle produira à partir de 2015, au prix du marché.

Saint-Hyacinthe investira 15 millions pour transformer ses déchets en gaz naturel, et Gaz Métro dépensera 6 millions pour absorber ce gaz et l'acheminer dans son réseau. Le projet bénéficie d'une aide financière importante des gouvernements fédéral et provincial, soit 25 millions dans le cas de Saint-Hyacinthe.

À moyen terme, tout le monde y gagne, assure Martin Imbleau, vice-président Exploitation et projets majeurs chez Gaz Métro. «C'est une nouvelle filière énergétique qui sera rentable», estime-t-il.

Pour Gaz Métro, qui détient le monopole de la distribution de gaz naturel au Québec, le biogaz qui sera produit à Saint-Hyacinthe reviendra moins cher que celui qu'elle achète en Alberta ou aux États-Unis, parce que le coût du transport est nul. «C'est du gaz local et renouvelable qui permet de réduire nos coûts d'approvisionnement», explique-t-il.

La ville de Saint-Hyacinthe, pour sa part, pense pouvoir rentabiliser son investissement en cinq ans, avec les économies réalisées sur l'enfouissement et le transport des déchets, ainsi qu'avec les revenus tirés de la vente du gaz.

La ville, qui a déjà une importante concentration d'entreprises agroalimentaires sur son territoire, espère en attirer d'autres avec les services de gestion et de valorisation des déchets qu'elle pourra leur offrir tirer. «On s'est payé un avantage concurrentiel», dit sa porte-parole. Le projet de Saint-Hyacinthe est en marche depuis 2007, raconte la porte-parole de la ville, Joëlle Jetté. Il a fallu commencer par mettre sur pied la collecte des matières putrescibles, d'abord pour les résidences unifamiliales puis, graduellement, aux immeubles à logements. La collecte de matière putrescible est maintenant bien ancrée dans les habitudes des citoyens. «Dans les nouveaux immeubles à condos, les gens nous le demandent», affirme-t-elle.

La ville est maintenant prête à construire six biodigesteurs qui, comme leurs noms l'indiquent, digèreront l'ensemble de ses déchets pour produire du CH4, un gaz en tous points semblable à celui tiré des gisements souterrains.

«Saint-Hyacinthe traitera ainsi 132 000 tonnes de matières résiduelles afin de produire, la première année, 6 millions de mètres cubes de biométhane et à terme, 13 millions de mètres cubes de gaz par année», a précisé Joëlle Jetté.

C'est peu, étant donné que Gaz Métro distribue 5,4 milliards de mètres cubes de gaz naturel par année, mais ce n'est que le début d'une production appelée à croître. «On ne sera jamais capable de remplacer tout le gaz naturel consommé au Québec, explique Martin Imbleau, mais à court et moyen terme, le biogaz pourrait représenter 2% de la consommation québécoise».

Gaz Métro s'intéresse aussi aux autres projets de biométhanisation en marche au Québec, petits ou grands. La seule condition, c'est qu'ils soient situés à proximité de son réseau, afin de minimiser les coûts de raccordements.

Les investissements requis par Gaz Métro pour acheter le gaz de Saint-Hyacinthe doivent être approuvés par la Régoe de l'énergie. Ces dépenses auront un impact à la hausse sur les tarifs des clients de Gaz Métro, mais un impact minime, selon l'entreprise, soit autour de 2$ par année.

> 650 millions

C'est la somme mise à la disposition des municipalités qui investiront pour valoriser leurs déchets par le gouvernement du Québec. À Montréal, où la collecte de matières putrescibles vient de commencer, deux usines de biométhanisation devraient être construites, l'une à Montréal-Est et l'autre à LaSalle.

Québec, Beauharnois et Rivière-du-Loup ont aussi des projets en marche.