Après avoir tourné au ralenti depuis janvier, l'usine d'alumine de Rio Tinto Alcan à Jonquière reprendra bientôt son rythme normal de production, a annoncé hier l'entreprise. S'il s'agit d'un signe certain que le marché de l'aluminium se porte mieux, il ne faut pas croire que le ciel s'est définitivement dégagé.

«Le prix de l'aluminium a légèrement augmenté, mais on est encore dans une période très critique», a affirmé hier Pat Fiore, vice-président de Rio Tinto et responsable de la production de bauxite et d'alumine, au cours d'un entretien avec La Presse Affaires.

L'usine Vaudreuil de Jonquière peut se remettre à produire à pleine capacité en raison de l'augmentation de la demande, de la hausse des prix de l'aluminium et des coûts de transports favorables, a-t-il expliqué. «C'est une série de paramètres et ces mêmes paramètres pourraient nous amener à rabaisser la production plus tard.»

Rio Tinto Alcan peut produit 1,5 million de tonnes d'alumine à partir de bauxite importée à son usine de Jonquière. En janvier dernier, en réaction à la chute de 60% du prix de l'aluminium sur le marché, Rio Tinto Alcan avait annoncé une réduction de 25% de la production de l'usine, soit 400 000 tonnes de moins, en même temps qu'une série d'autres mesures.

Aucun employé n'a dû être mis à pied à la suite de cette réduction de la production, mais des sous-traitants avaient été remerciés et ils seront rappelés.

Le porte-parole des employés de l'usine était bien sûr content de la tournure des événements, mais il reste inquiet. «C'est quand même fragile, a commenté Carl Dallaire. Il s'agit d'une vieille installation et ce qui nous fait le plus mal, ce sont les coûts de transports.»

L'usine Vaudreuil raffine de la bauxite importée d'aussi loin que l'Afrique et le Brésil et pour cette raison, les syndiqués craignent depuis des années que leur employeur mette la clé dans la porte.

«Le fait d'être loin (des mines de bauxite) reste un défi», a reconnu hier le directeur de l'usine, Gervais Jacques. Selon lui, l'usine a compensé son handicap en améliorant ses coûts de production. Elle est aussi devenue plus flexible et peut ajuster sa capacité de production aux conditions du marché.

Le sort de l'usine Vaudreuil dépend des conditions du marché et la production sera revue chaque trimestre, a indiqué M. Jacques.

Rio Tinto Alcan a réduit sa production de bauxite de 17% et celle d'alumine de 4% depuis le retournement de la conjoncture, à la fin de 2008. Son intention était de réduire de 11% sa production d'aluminium.

Depuis janvier, la production d'aluminium a été réduite de seulement 5%, avec la fermeture de l'usine de Beauharnois au Québec (220 employés) et celle Anglesey en Angleterre. Selon les conditions du marché, Rio Tinto Alcan décidera s'il y a lieu de continuer ou non de réduire la production.

Le secteur de l'aluminium de Rio Tinto Alcan affiche une perte de 689 millions US après les six premiers mois de l'exercice en cours.

Après avoir atteint un creux en février, le prix de l'aluminium s'est redressé au cours des derniers mois. Le prix d'une tonne d'aluminium atteint aujourd'hui 1900$US, après avoir touché un creux de 1100$US au début de l'année. Le prix reste quand même inférieur de 50% aux niveaux atteints en 2007 et 2008, et les stocks sont à des niveaux record.

Alcoa, l'autre gros acteur du secteur de l'aluminium au Québec, avait réagi à la crise en annonçant vouloir réduire sa capacité de production de 18% et en gelant les salaires de ses employés.

Ses activités au Québec avaient été relativement épargnées. Alcoa avait décidé de commencer plus tôt la modernisation de son usine de Baie-Comeau et de réduire de 15% les heures de travail.

Ces mesures sont toujours en place, a fait savoir hier le porte-parole d'Alcoa, Pierre Després.

Alcoa affichait une perte de 454 millions US après deux trimestres.