Wal-Mart a jeté un coup de froid mercredi en révisant sérieusement ses prévisions de ventes pour 2015 et celles pour ses bénéfices futurs, en raison de la force du dollar qui pèse de plus en plus sur les grandes multinationales américaines.

L'enseigne, qui essaie de refaire son retard dans le commerce en ligne face à Amazon, prévoit un recul de 6 à 12 % de son bénéfice ajusté par action, référence en Amérique du Nord, lors de l'exercice fiscal 2017. Les marchés tablaient, eux, sur une hausse de 4 % de la rentabilité opérationnelle.

Les ventes du numéro un mondial de la vente au détail devraient en outre stagner lors de l'exercice fiscal 2015-2016, contre une croissance de 1 à 2 % qui était prévue jusqu'ici.

«Au vu d'un impact d'effets de change plus important que prévu, la croissance des ventes sera relativement nulle», explique Wal-Mart, qui a dévoilé mercredi à New York un plan stratégique sur trois ans.

Le chiffre d'affaires s'était établi à 485,65 milliards $US lors de l'exercice précédent, dont un tiers provenait des ventes réalisées hors des États-Unis.

Comme nombre de multinationales, le renchérissement du dollar rogne les ventes réalisées par Wal-Mart hors de ses frontières américaines lorsque celles-ci sont converties en billets verts.

La hausse des salaires en cause

A Wall Street, ces annonces, qui interviennent près de deux mois après un plongeon de 15 % des bénéfices au deuxième trimestre, ont jeté une onde de choc.

Le titre Wal-Mart a dégringolé de plus de 9 % en une trentaine de minutes, soit l'une des plus mauvaises séances boursières du groupe en 20 ans, entraînant dans son sillage le Dow Jones, l'indice vedette de la Bourse de New York, dont il est l'un des poids lourds.

Quelque 21,2 milliards $US de capitalisation boursière se sont ainsi évaporés, malgré l'annonce du versement indirect de 20 milliards $US aux actionnaires sous la forme d'un plan de rachat d'actions. L'action reculait de 7,87 % à 61,48 $US vers 13 h, heure avancée de l'Est.

«La prévision de bénéfice est simplement affreuse», estime Jon Ogg, analyste au site d'informations financières 247wallstr.com.

Pour l'analyste Charles Grom, le geste adressé aux actionnaires suggère «une contraction à venir des marges».

Le directeur financier Charles Holley, sur le départ, a expliqué que la revalorisation prévue des salaires d'un demi-million d'employés - 40% des effectifs - était la principale cause de la dégradation de la rentabilité.

La hausse des salaires et les coûts liés à la formation des employés vont peser à hauteur de 1,5 milliard $US dans le bénéfice opérationnel lors de l'exercice fiscal 2017 - 75% des effets négatifs -, après 1,2 milliard $US en 2016.

À compter du 1er février 2016, le salaire horaire moyen chez Wal-Mart sera «au moins» à 10 $US de l'heure, soit 1,75 dollar de plus que le salaire minimum fédéral aux États-Unis, selon des mesures annoncées sous la pression des syndicats en début d'année.

Wal-Mart, qui est confrontée à l'énorme défi de se réinventer face à l'agressivité des acteurs du commerce en ligne, au premier rang desquels Amazon, investit dans les technologies pour s'adapter aux nouvelles habitudes des consommateurs.

L'enseigne modernise sa chaine d'approvisionnement, ses technologies et réorganise ses magasins, ouvre des boutiques de proximité et étend ses rayons «bio».

Elle est en train de muscler également son offre dans le commerce en ligne, avec le lancement d'un service de livraison illimité à 50 $US par an pour concurrencer Prime (99 $US), l'offre d'Amazon, qui est un véritable succès.

Contrairement à Wal-Mart, Amazon n'a pas les coûts fixes attachés à la possession de magasins physiques, autant de facteurs qui lui ont permis de peser désormais plus que son rival en Bourse (257 milliards $US contre 197 $US).

Un des baromètres de la consommation aux États-Unis, Wal-Mart doit trouver des moyens pour convaincre les ménages, réticents à dépenser davantage dans ses magasins malgré un léger mieux de la croissance.

Les enquêtes d'opinion récentes montrent que les consommateurs américains préfèrent réallouer leurs crédits d'impôt et les économies qu'ils se font sur les bas prix de l'essence à rembourser leurs dettes, reconnaît le groupe.