L'Agence du revenu du Canada invite les contribuables à faire un examen de conscience, dans le cadre d'une nouvelle campagne de sensibilisation nationale.

Au Québec, quelque 10 000 particuliers ont reçu une lettre «éducative de sensibilisation» depuis janvier dernier. Ces lettres laissent planer la menace d'une vérification complète des déclarations de revenus ainsi que l'imposition de lourdes pénalités.

Pour le fisc, il s'agit d'un avertissement. «On a réalisé qu'il y avait une méconnaissance du fonctionnement de certains types de dépenses. On donne une chance aux gens de bien comprendre et de faire une divulgation volontaire avant qu'on procède à des vérifications», a expliqué à La Presse Affaires, la porte-parole de l'Agence du revenu du Canada (ARC), Kareen Dionne.

Or, les contribuables invités à passer au confessionnal n'ont peut-être commis aucun péché. «Au lieu de bâtir des dossiers bien ficelés, le fisc va à la pêche», déplore Marc-André Paquin, avocat chez Jurifisc.

Mais l'ARC assure qu'elle n'agit pas à l'aveugle. «Il y a une part de hasard là-dedans. Mais on n'envoie pas ça de façon complètement aléatoire. C'est fondé sur un modèle d'analyse du risque», a indiqué Mme Dionne.

Les contribuables ont été ciblés parce qu'ils évoluent dans un secteur d'activité à risque d'inobservation fiscale ou parce qu'ils ont réclamé des dépenses qui s'éloignent de la norme dans leur secteur.

Certains sont des travailleurs autonomes, des propriétaires qui déclarent des revenus de location, ou encore des contribuables qui présentent des dépenses qui ne sont pas assorties d'un feuillet.

Dans une lettre dont La Presse Affaires a obtenu copie, le fisc met la loupe sur des renseignements fournis par un contribuable dans sa déclaration de revenus 2008: frais comptables, juridiques et autres honoraires professionnels de 1186$, dépenses relatives aux véhicules à moteur de 5588$.

«En utilisant l'annexe A ci-jointe, vous pouvez vérifier les renseignements fournis dans vos déclarations afin de déterminer l'exactitude de vos réclamations», lui écrit un chef d'équipe de l'ARC.

Déclaration volontaire

S'il réalise qu'il n'a pas déduit correctement les dépenses, le fisc l'invite à faire une déclaration volontaire, pour éviter une vérification qui ne se «limitera pas nécessairement aux éléments mentionnés dans cette lettre.»

Le fisc fait valoir qu'une déclaration volontaire permettra d'éviter les pénalités et les poursuites qui pourraient découler d'une vérification en bonne et due forme.

En effet, les contribuables coincés par le fisc doivent verser une pénalité de 5% du solde impayé pour l'année précédente, plus 1% du solde impayé par mois complet de retard, jusqu'à un maximum de 12 mois.

Le fisc peut même poursuivre le contribuable qui a volontairement tenté d'éluder de l'impôt. S'ajoutera alors une amende de 50% à 200% du montant éludé ou une peine d'emprisonnement maximale de 12 mois.

«Beaucoup vont percevoir ça comme une menace. Ils vont mal dormir, peut-être devenir ultra-prudents dans leurs prochaines déclarations», estime le fiscaliste Pierre Nadeau, qui se spécialise dans les litiges fiscaux après avoir travaillé plus de 20 ans pour l'ARC.

«Mais d'un autre côté, demande-t-il, vaudrait-il mieux qu'on mette plus de vérificateurs sur la route?»