Au terme de sa tournée de deux jours en Europe afin de mettre le couvercle sur l'idée d'une taxe bancaire internationale, la mission que s'était donnée le premier ministre Stephen Harper s'est soldée par le statu quo.

À l'issue de ses rencontres avec le président de la France, Nicolas Sarkozy, et le premier ministre français, François Fillon, les pro-taxe et les pays militant contre la mesure se sont entendus pour ne pas s'entendre, d'ici le Sommet du G20 qu'accueillera Toronto fin juin.

Mais si M. Harper n'a pas réussi à convaincre ni la France, ni la Grande-Bretagne, la veille, de renoncer à la mesure, l'idée d'imposer une taxe mondiale semble avoir été écartée des choses à accomplir au Sommet du G20.

Fin juin, les pays réunis tenteront donc plutôt de trouver un terrain d'entente permettant à ceux qui le désirent d'imposer une taxe à leurs banques, ont fait valoir M. Fillon et son homologue canadien.

«On cherche à arriver à un accord, une entente sur cette question, où même si des pays font des choses différentes, on peut reconnaître un principe en commun pour assurer que les risques sont pris par les institutions elles-mêmes, et non pas par les contribuables», a expliqué le premier ministre Harper, à l'issue de deux rencontres d'une heure tenues avec le président et le premier ministre français.

Une idée sur laquelle tout le monde s'entend, car les contribuables ont suffisamment donné pour sauver les institutions financières suite à la récession.

Mais reste à déterminer de quelle façon les pays s'y prendront, avec ou sans taxe bancaire.

Si certains pays, comme la France, la Grande-Bretagne, l'Allemagne ou les États-Unis, souhaitent imposer une taxe bancaire internationale, le Canada, lui, s'y oppose, appuyé de d'autres, car en vertu de son système bancaire ses institutions se sont bien tirées d'affaire suite à la crise économique qui a secoué la planète.

Au Sommet du G20, on discutera des pistes de solution, pour mettre en place un système qui éviterait une nouvelle chute des banques. Car tout le monde est d'accord qu'il faut un nouveau modèle, ont indiqué les premiers ministres.

«Il y a un très large consensus entre nous, au sein du G20, sur l'objectif. L'objectif, c'est limiter les comportements à risque des banques», a affirmé M. Fillon, en point de presse aux côtés de M. Harper.

«C'est un principe qui ne fait pas l'unanimité au sein du G20, il n'est pas consensuel au plan international; rien n'empêche d'en discuter ensemble, de trouver des principes forts qui permettent d'aboutir aux résultats qu'on s'est fixés, aux objectifs qu'on s'est fixés. Et moi je suis très confiant sur le fait que le Sommet de Toronto permettra de faire des progrès dans cette direction, parce qu'au fond on a les mêmes objectifs», a souligné le premier ministre français.

Après une tentative infructueuse pour convaincre son homologue britannique d'abandonner l'idée d'une taxe bancaire internationale, jeudi à Londres, M. Harper s'était dirigé vers Paris afin de convaincre le président Sarkozy de rejoindre son camp.

La bataille était cependant perdue d'avance, puisque le gouvernement français est l'un des plus fervents militants pour une telle mesure. L'Union européenne et les États-Unis, notamment, sont les principaux défenseurs de la taxe.

Et comme la France prendra la relève comme hôte des prochains sommets du G8 et du G20, l'an prochain, le pays pourrait bien revenir à la charge en 2011 et remettre la question à l'ordre des discussions du G20. Questionné par les journalistes à savoir jusqu'où irait son gouvernement pour imposer la mesure, le premier ministre français a toutefois esquivé la question.

La possibilité d'imposer une taxe bancaire internationale n'est donc pas complètement écartée. Mais M. Harper aura gagné du temps.

Le Canada s'oppose à une taxe bancaire internationale, car il refuse d'imposer davantage ses banques, qui se sont bien tirées de la récession mondiale, contrairement aux banques de l'étranger.

La Chine, l'Inde, l'Australie, l'Argentine et le Brésil ont indiqué partager la position canadienne. Et l'idée ne semble pas faire consensus au sein de l'Union européenne, puisque la Suisse a également appuyé le Canada, elle aussi ayant vu ses banques bien se tirer d'affaire.

L'économie a été le principal sujet du jour lors des pourparlers avec M. Sarkozy et M. Fillon, puisque M. Harper mène ces rencontres en prévision des sommets du G8 et du G20.

À l'instar de ses discussions de la veille avec le premier ministre britannique, David Cameron, M. Harper a abordé, avec son homologue français, des priorités des sommets qui se tiendront en Ontario à la fin du mois, soit les moyens de restaurer les finances publiques, des stratégies de croissance mondiale, de réforme du secteur financier, ainsi que de la nécessité de résister au protectionnisme.

Les premiers ministres français et canadien ont en outre fait le point sur l'accord de libre-échange que négocient l'Union européenne et le Canada depuis des mois.

Le premier ministre français a par ailleurs affirmé que l'initiative sur la santé maternelle et infantile, que mettra de l'avant le Canada au Sommet du G8, avait l'appui de son gouvernement, qui la soutiendra «sans aucune réserve».

Les dirigeants de la planète tenteront, au Sommet du G20, de consolider la relance économique et de jeter les bases de l'économie de demain.