L'annonce jeudi par le constructeur automobile PSA Peugeot Citroën de la suppression de 8000 emplois et de la fermeture de son usine d'Aulnay, près de Paris, a provoqué un séisme en France qui a pris de plein fouet ce signal de la perte de compétitivité de son industrie.

Le gouvernement s'attendait à cette annonce, mais elle n'en a pas moins constitué «un «véritable choc» pour le pays, a déclaré le premier ministre Jean-Marc Ayrault, alors qu'une série d'autres plans sociaux se profilent à l'horizon.

À Bruxelles, la Commission européenne s'est dite prête à examiner avec les autorités françaises la mobilisation de fonds pour des aides à l'emploi.

Le premier groupe automobile français (100 000 salariés en France) a mis en avant des pertes au premier semestre et une réduction durable des marchés en Europe pour justifier ces décisions qui viennent s'ajouter à des mesures annoncées fin 2011.

Ce nouveau plan prévoit la fin de l'assemblage dans son usine d'Aulnay, aux portes de Paris (3000 postes), la suppression de 1400 postes à l'usine de Rennes (Bretagne, ouest) et de 3600 autres emplois dans ses autres sites.

«PSA, patron voyou», «On déclare la guerre à PSA»: en tenue de travail, des ouvriers sont sortis de l'usine d'Aulnay jeudi matin pour clamer leur «rage» contre les patrons «menteurs».

«Je ne sais pas jusqu'où on va pouvoir les faire reculer, mais on va vendre extrêmement cher notre peau», a prévenu Jean-Pierre Mercier, délégué du syndicat CGT.

Le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, a affirmé que le gouvernement français «n'accepte pas en l'état» le plan de restructuration, sans préciser les moyens de pression qu'il pourrait faire jouer sur le groupe privé.

«Nous demandons à PSA d'examiner loyalement toutes les autres solutions que celles qu'il a réservées à plusieurs sites de France et notamment à ces milliers de salariés concernés», a insisté Arnaud Montebourg.

L'arrêt de la production à Aulnay est la première fermeture d'une usine automobile en France depuis celle de Renault à Boulogne-Billancourt près de Paris en 1992. En 1997, Renault avait aussi marqué les esprits en annonçant la fermeture de son usine de Vilvorde, en Belgique (3100 salariés), entraînant un des conflits sociaux les plus médiatisés.

Le gouvernement socialiste accuse l'ancien président de droite Nicolas Sarkozy, battu par François Hollande le 6 mai, d'avoir demandé aux entreprises de retarder leurs plans sociaux le temps de la campagne électorale.

Philippe Varin, le patron de PSA, a dit «mesurer pleinement la gravité des annonces» ainsi que le choc et l'émotion qu'elles provoquent.

Mais selon lui, ces mesures se justifient par «l'ampleur et le caractère durable de la crise qui affecte notre activité en Europe». Le constructeur, pâtit de sa forte présence sur le créneau des petits modèles, comme la Citroën C3 assemblée à Aulnay, pas assez compétitifs sur le marché mondial.

«Personne ne sera laissé au bord du chemin», a-t-il promis aux salariés, tout en rejetant l'idée d'un prêt ou d'une entrée de l'État au capital de l'entreprise.

M. Ayrault a souligné «l'ampleur sans précédent» du plan de PSA et a demandé à la direction du groupe de mener «sans délai» une «concertation».

Il a chargé Arnaud Montebourg de présenter le 25 juillet un plan de soutien à la filière automobile qui, selon certaines estimations, représente 10% de l'emploi dans le pays.

Alors que la désindustrialisation de la France s'est imposée comme l'un des thèmes majeurs du débat politique (400 000 emplois supprimés dans les secteurs manufacturiers au cours des 5 dernières années), le gouvernement a placé la question de la compétitivité des entreprises françaises au coeur de ses préoccupations.

Le premier ministre a aussi commencé à lever le tabou du coût du travail en évoquant la possibilité de baisser les charges sociales sur les salaires au profit d'une hausse d'une contribution fiscale assise sur l'ensemble des revenus.

Mais Jean-François Copé, le chef de l'UMP, a affirmé que le gouvernement va «à l'inverse» de l'objectif du soutien de la compétitivité, soulignant qu'il fallait en urgence donner «plus de souplesse dans le marché du travail».