On s'y attendait, mais c'est arrivé plus vite que prévu. La récession mondiale et l'effondrement des prix des produits de base ont réduit les volumes et la valeur des exportations canadiennes au point de créer un premier déficit commercial en plus de 32 ans.

Le déficit de nos échanges avec le reste du monde a atteint 458 millions de dollars en décembre, a révélé Statistique Canada hier.

 

L'affaiblissement des livraisons aux États-Unis, notre principal partenaire commercial, est le grand responsable de ce renversement. En trois mois, notre surplus avec la première économie du monde est passé de 8,2 à 3,8 milliards seulement. Il s'agit de son niveau le plus faible en 10 ans.

Les États-Unis représentent le seul débouché extérieur du pétrole canadien, dont la valeur des livraisons internationales est passée de 3,9 à 2,8 milliards, de novembre à décembre. Les volumes sont en cause, mais avant tout les prix. La valeur du baril de brut a fondu de 25% au cours du mois.

«Les termes de l'échange qui avaient produit un important effet de richesse jusqu'en juillet dernier se sont détériorés et ont atteint en décembre un niveau inégalé depuis juin 2005», fait remarquer Marc Pinsonneault, économiste principal à la Financière Banque Nationale.

Il s'agit du ratio des prix des exportations aux prix des importations. Quand il se détériore, le revenu national diminue et, corollairement, la demande intérieure.

Le déficit commercial du Canada envers les autres pays s'est quant à lui élargi de 800 millions. Seules nos ventes à l'Union européenne ont progressé au cours du mois.

Dans l'ensemble, la valeur des exportations a chuté de 9,7%, son pire plongeon depuis la récession de 1982. La baisse était généralisée. Outre les produits énergétiques, c'est la catégorie des biens industriels qui a le plus faibli à cause surtout du fort repli des livraisons d'aluminium.

La valeur des importations a de son côté diminué de 5,7%. Le tiers des biens importés par le Canada représente de la machinerie et de l'équipement. Le repli de 5,7% dans cette catégorie signifie que les entreprises réduisent leurs investissements.

«La seule bonne nouvelle de ce rapport, c'est que décembre a capté toute l'ampleur du repli des prix des produits de base, observe Avery Shenfeld, économiste chez Marchés mondiaux CIBC. Les volumes vont sans doute devenir la source principale des pressions à la baisse, surtout dans le secteur automobile.»

Exprimées en volume, les exportations ont diminué de 5,4% alors que les importations reculaient de 4,2%. Pour l'ensemble du quatrième trimestre cependant, le solde commercial réel est moins mauvais que celui du troisième. Autrement dit, le commerce international aura contribué un peu à la croissance l'automne dernier, mais à cause essentiellement de la baisse de la demande intérieure, ce qui n'est guère signe de vitalité.

Surplus pour 2008

Pour l'ensemble de 2008, le Canada enregistre un surplus de 47,2 milliards, soit 800 millions de moins qu'un an auparavant. L'excédent est uniquement attribuable à l'énergie, dont le surplus est passé de 55,1 à 73,2 milliards, de 2007 à 2008. C'est uniquement une histoire de prix. En volume, les livraisons canadiennes ont diminué de 15,9% alors qu'elles avaient bondi de 37,6%, un an plus tôt.

«Nous nous attendions à un équilibre dans nos échanges commerciaux pour l'année en cours, ce qui représente une diminution massive par rapport au surplus de 2008. Compte tenu des chiffres de décembre et de l'affaissement des dépenses américaines et des prix des ressources, ça nous paraît un peu optimiste», constate Douglas Porter, économiste en chef adjoint chez BMO Marchés des capitaux.

La faiblesse de la demande américaine est palpable. De juillet à décembre, les importations des États-Unis ont diminué de 24,4%. En décembre, le déficit est tombé à 39,9 milliards, le plus faible en presque six ans.

À première vue, cela paraît encourageant. En fait, les exportations ont baissé aussi pour le cinquième mois d'affilée. Lorsqu'on les exprime en volume, elles diminuent plus vite encore que les importations.

Le Bureau of Economic Analysis, qui mesure l'évolution du produit intérieur brut (PIB), n'avait pas prévu cela en annonçant de manière préliminaire une décroissance de 3,8% du PIB durant l'automne. Il est probable que 5,0% reflète mieux la réalité.

 

LE COMMERCE EN REPLI

EXPORTATIONS -9,7%

IMPORTATIONS -5,7%