Stephen Harper va «empirer» la récession s'il n'investit pas massivement dans l'économie canadienne, a averti hier le financier Stephen Jarislowsky dans un discours prononcé à Montréal.

Stephen Harper va «empirer» la récession s'il n'investit pas massivement dans l'économie canadienne, a averti hier le financier Stephen Jarislowsky dans un discours prononcé à Montréal.

Le président du conseil d'administration de Jarislowsky Fraser n'a pas mâché ses mots, tirant à boulets rouges sur l'administration Bush lui reprochant de ne pas avoir su réglementer le système financier, avant de blâmer Stephen Harper pour son inaction devant les conséquences du désastre.

Le célèbre investisseur a qualifié la «récente destruction de notre système financier» de «plus grand acte terroriste qui soit» et n'a pas hésité à comparer la crise actuelle à la dépression de 1929. Un coupable, à ses yeux: la cupidité. «On a pensé que la cupidité allait contrôler la cupidité», a-t-il dénoncé, blâmant l'introduction de nouveaux produits dérivés sur le marché alors qu'ils n'avaient fait l'objet d'aucun test.

Selon lui, les conséquences de la crise actuelle seront «très graves». «C'est la même chose que pendant la dépression de 1929. C'est le même type de problème, sauf qu'il est probablement encore plus difficile à gérer" parce qu'il est international, a-t-il dit, prédisant des "mises à pied massives».

«Il y a des récessions que vous pouvez sauver avec des diminutions de taux d'intérêt, a expliqué M. Jarislowsky. Mais si les gens ne veulent pas emprunter d'argent, vous pouvez diminuer vos taux jusqu'au point mort comme l'ont fait les Japonais et ça n'apporte rien: les gens n'empruntent pas! Ils veulent repayer leur dette.»

La solution, selon lui: d'abord sécuriser la situation des banques et des compagnies d'assurance, puis investir massivement dans les infrastructures. Le refus de M. Harper de s'engager dans des investissements importants est une «erreur», a affirmé M. Jarislowsky.

«Contrairement à (ce que dit) M. Harper, si vous ne faite pas ce genre d'investissements et si vous n'imprimez pas d'énormes quantités d'argent, vous aller empirer la récession. Alors, il faut que ce soit fait», a-t-il dit.

Selon M. Jarislowsky, c'est la menace de déflation qui obligera les gouvernements à imprimer de l'argent.

Selon des sources au sein de la nouvelle coalition formée des libéraux, du NPD et du Bloc québécois, la coalition aurait l'intention d'investir environ 30 milliards de dollars dans l'économie, une somme que rejette M. Jarislowsky du revers de la main: «30 milliards, c'est une bagatelle par rapport à ce qu'on aura besoin», a lancé l'investisseur, précisant toutefois qu'il ne voulait pas se mêler de politique et qu'il prônait la mise sur pied d'un gouvernement de coalition comme en temps de guerre pour gérer la situation «urgente».

M. Jarislowsky a montré du doigt l'ancien président de la Réserve fédérale américaine, Alan Greenspan, pour avoir mis sur pied des programmes qui ont provoqué la bulle immobilière américaine. Il estime qu'aux États-Unis, mais aussi au Canada, le prix des maisons est encore surévalué de 36,5%.

M. Jarislowsky a aussi dénoncé la rémunération des dirigeants d'entreprise qui sont payés «comme les gladiateurs romains» et s'esquivent quand ça va mal grâce à leurs parachutes dorés. Il recommande aux petits investisseurs d'attendre que l'inflation revienne avant d'investir à la Bourse et dans l'immobilier, affirmant qu'entre temps, «l'argent est roi» (cash is king).