L’entrepôt des importations privées de la SAQ est plein depuis quelques semaines, une situation « critique », selon la société d’État. Des milliers de produits pourraient être saisis en juin parce qu’ils y sont entreposés depuis trop longtemps.

« L’entrepôt des importations privées est à pleine capacité », peut-on lire dans une infolettre du 25 avril destinée aux agents d’importation privée. « La situation est critique et nous devons intervenir afin de rétablir celle-ci dans les plus brefs délais », ajoute-t-on dans le document signé par Josée Dumas, directrice de la gestion de l’offre et de la mise en marché à la Société des alcools du Québec (SAQ).

« Ce sont environ 2500 produits sur 12 300 » qui pourraient être saisis le 18 juin, précise la porte-parole Clémence Beaulieu Gendron en réponse aux questions de La Presse. « Cela représente approximativement 27 000 caisses sur 300 000 », indique-t-elle par courriel, soit 9 % du total. En temps normal, seulement 1 % des stocks fait l’objet de saisies sur une base annuelle.

La proportion de produits à risque de saisie est exceptionnelle et s’explique par la fermeture prolongée des bars et restaurants.

Clémence Beaulieu Gendron, porte-parole de la SAQ

La majorité des bouteilles saisies sont vendues aux employés de la SAQ, qui verse les fonds à l’organisme Entraide. Les bouteilles impropres à la consommation « sont envoyées à notre sous-traitant CRI environnement qui traite le liquide et recycle le verre », précise Mme Beaulieu Gendron.

La SAQ se dit toutefois sûre de « libérer ces produits de [ses] entrepôts avant cette date butoir » avec la collaboration des associations liées aux agents.

Même son de cloche du côté de Catherine Lessard, directrice générale d’A3 Québec, qui représente 77 agences d’importation privée et environ la moitié des ventes de ces produits. « J’ai beaucoup entendu qu’on était confiant que d’ici les prochaines semaines, avec le beau temps qui arrive, qu’il y aurait une grande partie des surstocks qui serait sortie de l’entrepôt », assure-t-elle.

La pandémie en cause

« Avant la pandémie, nous vendions en moyenne 15 000 caisses par semaine et avec un roulement continu de caisses », détaille Mme Beaulieu Gendron, un nombre qui a bien sûr diminué avec les fermetures des bars et des restaurants. Les bouteilles se sont accumulées, de sorte qu’en ce moment, « il y a près de 40 % plus de produits d’importation privée dans notre entrepôt que l’année précédente ».

Les ventes sont de retour au niveau prépandémique, mais elles ne sont « pas suffisantes pour reprendre le retard encouru des deux dernières années », note la porte-parole.

En parallèle, les délais d’entreposage normaux ont été suspendus pour aider les agents, qui avaient de la difficulté à vendre avec les vagues successives de fermetures. Habituellement, des frais d’entreposage s’appliquent après 150 jours, et les produits sont saisis après 210 jours.

« Pour nous aider, ils ont suspendu tous les compteurs », explique Frédéric D’Amours, propriétaire de l’agence Importation Pivot, spécialisée en bières. Ce qui fait que les agences ont « eu le luxe de laisser traîner notre bois mort à l’entrepôt » depuis mars 2020.

M. D’Amours pense que la situation va « se résorber d’elle-même » avec la reprise des saisies, mais aussi parce que « typiquement, on ne veut pas en arriver là », assure-t-il, citant des pénalités et d’autres conséquences pour les agences qui dépassent les délais. « Ce qui arrive plus souvent qu’autrement, c’est que l’agence achète ces produits-là en échantillons promotionnels. »

« Il y a plusieurs sites d’agences justement qui font la promotion de leurs importations privées, puis il y a possibilité de commander, renchérit Catherine Lessard, donc c’est peut-être intéressant pour les consommateurs. »