Le scandale sur la manipulation du taux interbancaire Libor a rebondi vendredi avec l'annonce de poursuites judiciaires engagées aux États-Unis contre une série de grandes banques internationales, dont la Société Générale.

Au nom de 38 banques américaines de petite et moyenne tailles, l'agence de garantie des dépôts bancaires (FDIC) a porté plainte devant un tribunal de New York contre une douzaine de banques accusées d'entente «illicite».

Entre août 2007 et au moins mi-2011, elles auraient manipulé à leur avantage le Libor (London Interbank Offered Rate), un taux crucial dans la finance internationale, au détriment de petits établissements financiers américains, selon la plainte.

Ces malversations auraient causé «d'importantes pertes» à ces petites banques, poussant même certaines d'entre elles à la faillite, affirme la FDIC, qui est également chargée de contrôler et réglementer plus de 5.000 établissements financiers.

360 000 milliards de dollars 

La totalité des banques chargées de calculer le taux au sein d'un panel sont visées dans la plainte.

Sont ainsi mis en cause de grands noms de Wall Street comme JPMorgan Chase, Citigroup et Bank of America mais aussi les banques suisses UBS et Credit Suisse, les britanniques HSBC, Royal Bank of Scotland, Lloyds et Barclays.

La plainte vise également la canadienne Royal Bank of Canada, la française Société Générale, l'allemande Deutsche Bank, ou encore la japonaise Bank of Tokyo-Mitsubishi UFJ, WestLB et Norinchukin Bank.

Contactées par l'AFP, JPMorgan et Citigroup ont refusé de commenter.

Déjà ternie par la crise des «subprime», l'image des banques avait pris un nouveau coup de canif en juin 2012, avec l'éclatement sur la place publique du scandale du Libor.

Taux central dans le monde de la finance, ce taux fixé à Londres sert de référence pour environ 360 000 milliards de dollars de contrats à travers le monde.

Il a une incidence sur une masse de produits financiers, dont certains prêts aux ménages et aux entreprises. Le Libor est privilégié par les banques anglo-saxonnes, même s'il est décliné pour plusieurs grandes devises, comme le dollar, l'euro, le yen ou la livre sterling.

À chaque fois, les taux sont calculés à partir d'un panel de 6 à 18 banques.

Afin d'en restaurer la crédibilité, les autorités britanniques ont fait passer le taux sous la responsabilité de l'opérateur boursier NYSE Euronext.

Lourdes amendes 

De Londres à Singapour en passant par Bruxelles, Genève et Hong Kong, des enquêtes menées par les autorités sont en cours, certaines s'étant déjà soldées par de lourdes amendes.

La Commission européenne a par exemple infligé en décembre dernier une amende de 1,7 milliard d'euros à huit banques.

Parmi elles, Deutsche Bank condamnée à s'acquitter de 725 millions d'euros et Société générale (446 millions d'euros) qui a fait appel.

UBS s'est pour sa part vu infliger en décembre 2012 une amende combinée de 1,4 milliard de francs suisses par les autorités américaine, suisse et britannique.

Des traders ont également été suspendus dans de nombreux établissements financiers, tandis que les bénéfices de nombre de ces banques ont souffert.

Selon une étude des analystes de la banque Morgan Stanley, le scandale du Libor a amputé en 2012, de 4 % à 13 % les bénéfices par action de seize banques impliquées.

La saignée n'est pas encore terminée: La plupart des fleurons de Wall Street ont annoncé ces dernières semaines avoir mis de côté d'importantes réserves en prévision de litiges en cours, dont l'affaire du Libor.

Dans sa plainte, la FDIC poursuit également l'Association des banquiers britanniques (BBA), qui chapeautait les banques en charge du Libor et à qui elle reproche son silence.

L'agence cherche à récupérer, explique-t-elle, des indemnités égales aux pertes essuyées par les petites banques américaines et des indemnités supplémentaires pour violations des lois antitrust.

Créée dans les années 30, la FDIC est un des principaux organes de régulation financière du pays, n'a toutefois pas donné d'estimations chiffrées.