Un nouveau volet s'ouvre dans l'affaire du Libor avec la plainte d'un régulateur du secteur financier américain qui attaque en justice treize banques internationales, dont la Banque Royale du Canada.

La National Credit Union Administration (NCUA), qui supervise le secteur des caisses d'épargne aux États-Unis, entend ainsi récupérer une partie des sommes perdues, du fait des manipulations du taux Libor, par cinq établissements qu'elle supervisait et qui ont fait faillite depuis.

La plainte, pour violation des lois anti-trust fédérales et régionales, a été déposée auprès d'une cour du Kansas (centre du pays), selon un communiqué mis en ligne lundi soir sur le site de la NCUA.

«C'est de notre responsabilité de récupérer de l'argent par tous les moyens possibles à ceux qui ont causé des milliards de pertes aux caisses d'épargne», a souligné la présidente de la NCUA Debbie Matz, citée dans le texte.

«Certaines sociétés manipulaient les taux d'intérêt internationaux de telle manière qu'ils ont coûté aux cinq (caisses d'épargne faillies) des millions de dollars», a relevé Mme Matz, qui se dit déterminée à les rendre «responsables de leurs actions».

La NCUA souligne qu'une quarantaine de procédures ont été engagées dans le monde contre les banques chargées de déterminer le cours du Libor, un taux d'intérêt à très court terme appliqué aux prêts que les banques se font entre elles.

À ce jour, des amendes d'un montant total d'environ 2,5 milliards de dollars ont été appliquées à trois des principaux acteurs de ce marché: UBS, Royal Bank of Scotland et Barclays.

Outre la Banque Royale, la NCUA a attaqué SocGen, UBS et Crédit Suisse, JPMorgan Chase, Lloyds Banking Group, WestLB, Raiffensen Bank, Norinchukin Bank et Bank of Tokyo Mitsubishi UFJ.

Les enquêtes menées par les autorités britanniques et américaines ont montré comment les courtiers au sein de certaines banques manipulaient les taux communiqués au panel chargé de fixer le Libor, afin d'en tirer des bénéfices sur leurs positions ou de faire apparaître leur banque plus solide.

Ce scandale a conduit les autorités britanniques à faire passer le Libor sous la responsabilité de l'opérateur boursier NYSE Euronext.

Plus de 300 000 milliards de dollars de produits financiers dépendent du Libor et son niveau a une incidence sur les prêts aux ménages et aux entreprises.

À l'échelle européenne, la Commission enquête de son côté sur les manipulations dont cet indice et d'autres taux de référence ont pu faire l'objet, pour déterminer si cela a donné lieu à des atteintes à la concurrence.

Pour encadrer plus strictement la fixation des indices de référence, la Commission a également récemment présenté une proposition de réforme. Le texte prévoit des sanctions administratives en cas d'infraction aux nouvelles règles, pouvant aller jusqu'à 675 000 dollars pour les personnes physiques, et 1,3 million de dollars ou 10% du chiffre d'affaires pour les entreprises.

Outre sa plainte pour manipulations de taux, la NCUA a annoncé dans un communiqué séparé avoir engagé une autre procédure en justice contre Morgan Stanley et huit autres banques internationales pour avoir vendu pour 2,4 milliards de dollars de produits financiers pourris.

La NCUA a expliqué qu'elle entendait être indemnisée pour les pertes subies par certaines banques qu'elle supervisait et qui ont fait faillite en raison de ces mauvais investissements.

Cette procédure, engagée devant un tribunal fédéral de New York, vise aussi JPMorgan Chase, Credit Suisse, Royal Bank of Scotland, UBS, Goldman Sachs, Wachovia (désormais Wells Fargo) et Ally Bank.

Sur les 2,4 milliards de produits financiers qui se sont révélés toxiques, des obligations adossées à des crédits obligataires, 416 millions ont été vendus par Morgan Stanley, a relevé le régulateur.

La NCUA rappelle qu'elle a réglé des contentieux similaires avec Citigroup, Deutsche Bank, HSBC et Bank of America et qu'elle a ainsi pu récupérer plus de 335 millions de dollars.