Il est frustrant de se retrouver année après année incapable de cotiser le maximum permis à son REER, surtout à l'âge où on devrait y aller à fond la caisse, dans la quarantaine et la cinquantaine. Il existe un moyen de combler les retards accumulés: emprunter pour cotiser le maximum. Mais, comme tous les emprunts, c'est un outil qu'il ne faut manier qu'avec prudence.

Les principaux paramètres à examiner, selon les experts consultés, sont évidemment le montant de la somme à emprunter pour s'approcher du maximum permis, le taux d'intérêt qu'on vous appliquera sur l'emprunt, le temps que vous prendrez à rembourser (idéalement 12 mois, sinon les intérêts accumulés anéantiront les bienfaits de l'emprunt), le crédit d'impôt marginal obtenu par l'emprunt et votre taux marginal d'imposition résultant de l'emprunt.

Mettons de l'ordre là-dedans. «Je me suis fait une règle maison extrêmement simple, pose Khadida Azizi, planificatrice financière à la Banque Royale. On emprunte pour maximiser sa cotisation si et seulement si le coût total de l'emprunt - capital et intérêts - est entièrement remboursé par le crédit d'impôt obtenu.»

Josée Laframboise, planificatrice pour le Groupe financier Banque de Montréal, a une règle semblable. «On peut emprunter si le crédit d'impôt supplémentaire obtenu rembourse le capital et si le placement REER rapporte davantage que le taux d'intérêt sur l'emprunt. Actuellement, vous paierez environ 3% d'intérêt pour un emprunt destiné à une cotisation REER. Votre placement REER doit donc rapporter au moins 3%.»

Un test en quatre étapes

Avant de faire cet emprunt, vous pourriez aussi passer le «test Laverdière». Il nous est communiqué par Daniel Laverdière, directeur principal de la planification financière à la Banque Nationale. Le test s'applique à ceux et celles qui ont pris du retard et qui ont des droits de cotisation accumulés. Ces personnes songent à emprunter pour rattraper leur retard.

Le test se passe en quatre temps. Premièrement, il faut se demander si on ne pourrait pas rattraper le retard par des versements mensuels réguliers plutôt que par un emprunt. Deuxièmement, demandez-vous si l'opération est financièrement rentable, dans le cas où le placement REER marginal rapporte plus que le coût total de l'emprunt. Troisièmement, il est impératif d'examiner son budget au moment de l'emprunt. Pourquoi serais-je capable de rembourser l'emprunt si j'étais incapable de cotiser au maximum des REER permis? Finalement, un bon conseil est de voir si le retard (disons de 50 000$) peut être rattrapé sur quelques années plutôt que d'un seul coup.

Par exemple

Khadija Azizi propose cet exemple qui tient compte du taux d'imposition de l'emprunteur. «Supposons qu'il ou elle gagne 75 000$. Elle a droit de cotiser à hauteur de 20 000$. Elle sort 12 000$ de sa poche et emprunte les 8000 restants, mettons à un taux d'intérêt de 4%. Le coût total de l'emprunt est de 8320$. Le crédit d'impôt sera de 7674$. Ça semble une opération perdante parce que le crédit ne couvre pas la totalité de l'emprunt. Mais l'emprunt a fait baisser le taux marginal d'imposition de l'emprunteur. Ce dernier réalise ainsi un rendement de 38% sur les 8000$ empruntés.»

Hélène Paradis, conseillère en placements chez TD Waterhouse, propose une autre possibilité. «Supposons un revenu de 100 000$ et une cotisation totale permise de 17 000$. On sort 10 000$ comptant et on emprunte 7000$ qui seront couverts par le retour fiscal obtenu. Et, du coup, on fait passer le taux d'épargne de 10 à 17%!»

Pour finir, la bévue de l'année. C'est ce monsieur de 50 ans qui emprunte une somme dodue pour acheter des fonds d'action à risque élevé. «C'est pour le moins très téméraire», dit Mme Azizi.»