Le budget provincial a globalement déçu le milieu de l'innovation québécois, qui y voit peu de mesures pour soutenir la compétitivité des entreprises et l'économie du savoir. Une exception: l'industrie des technologies propres obtient un soutien important et ressort comme la grande gagnante de l'exercice.

L'Association pour le développement de la recherche et de l'innovation du Québec (ADRIQ) a parlé d'un budget «qui s'inscrit dans la continuité, sans accent pour l'innovation».

«Dans le contexte où le fédéral semble vouloir revoir son programme de crédits à la recherche et développement, le Québec avait une belle opportunité de dire aux entreprises qui veulent innover: on ne vous laissera pas tomber. Malheureusement, ce signal n'a pas été lancé», a dit à La Presse Affaires Jean-Louis Legault, président de l'ADRIQ.

L'ADRIQ salue tout de même les programmes «PME 2.0» et «ESSOR 2.0», destinés à aider les PME à investir dans les technologies de l'information.

Le programme «PME 2.0» bénéficiera d'un financement de 6 millions sur trois ans. Les mêmes sommes sont octroyées à «ESSOR 2.0», mais elles sont puisées à même les budgets déjà existants.

«On s'entend que ce n'est pas avec 6 millions sur trois ans qu'on va s'attaquer au problème de productivité de nos entreprises», lance toutefois Michel Lefebvre, associé en fiscalité et spécialiste de la recherche et développement chez Raymond Chabot Grant Thornton.

M. Lefebvre estime aussi le nouveau budget Bachand «très timide» envers le milieu de l'innovation.

«Nous sommes encore une juridiction favorable à la recherche et au développement au Québec, mais on semble un peu s'asseoir sur nos lauriers», dit M. Lefebvre, qui souligne que d'autres provinces augmentent leur soutien à l'innovation et viennent directement concurrencer le Québec.

Parmi les initiatives intéressantes, M. Lefebvre souligne les sommes de 20 millions accordées pour permettre au milieu culturel de se doter d'une stratégie numérique. Mais ce sont surtout les mesures qui n'apparaissent pas dans le budget qui soulèvent son attention.

«On a un bel écosystème dans le secteur de la mobilité qui est en train de se mettre en place, mais rien n'a été fait pour lui donner un coup de pouce», souligne-t-il.

Le milieu de l'innovation s'attend à ce que le gouvernement fédéral annonce des changements importants à son programme de crédits d'impôt à la recherche et au développement la semaine prochaine. Selon M. Lefebvre, il ne faudrait pas s'étonner de voir Québec réagir par la suite et arrimer son propre programme au programme fédéral.

Les technos propres célèbrent

Le son de cloche est tout autre du côté de l'industrie technologies propres, qui applaudit le nouveau budget Bachand.

«Ce budget s'inscrit dans la foulée du virage vers l'économie verte. On a l'impression d'avoir été entendus», a dit Denis Leclerc, président d'Écotech Québec, la grappe des technologies propres de la province.

Le gros morceau est la création d'un nouveau fonds de capital-risque entièrement réservé aux technologies propres. Le projet est confié à Cycle Capital, qui pilote déjà deux fonds dans ce secteur.

Québec met d'emblée 50 millions dans le fonds et pourrait y ajouter 25 millions supplémentaires. À cela s'ajoute une contribution de 25 millions de Teralys, un réservoir de capital-risque créé conjointement par Investissement Québec, le Fonds de solidarité FTQ et la Caisse de dépôt.

Le Fondaction CSN, Cascades et Gaz Métro y ont aussi contribué, si bien que ce qui s'appellera le Fonds d'investissement Cycle Capital III peut déjà compter sur 85 millions, une somme qui pourrait bien être bonifiée.

Andrée-Lise Méthot, fondatrice et associée principale de Cycle Capital, se réjouit d'avoir un fonds d'envergure qui lui permettra de faire des investissements plus importants dans les entrepreprises.

«Ce que ça veut dire, c'est qu'on va être capable de jouer sur le terrain des fonds américains, par exemple», dit Mme Méthot.

Le plan d'action sur les changements climatiques de 2,7 milliards, financé à partir du futur marché du carbone, risque aussi d'amener de l'eau au moulin de l'industrie des technologies propres. La bonification du programme Rénoclimat, pour améliorer l'efficacité des bâtiments, et le Fonds Valorisation Bois, pour relancer la forêt, ont aussi été bien accueillis par l'industrie des technologies environnementales.