Pressée par le FMI d'accélérer «une clarification politique», l'Italie, au bord de l'asphyxie, presse le pas pour former un gouvernement crédible et a procédé jeudi à une émission d'obligations, vue comme un test après la démission de Silvio Berlusconi, qui s'est soldée par un taux record.

Une «clarification politique» est nécessaire à Rome et à Athènes, car celle-ci «favoriserait la stabilité et mon objectif est une plus grande stabilité», a déclaré jeudi Christine Lagarde, directrice générale du FMI, au cours d'une conférence de presse en Chine.

La démission annoncée du chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi n'a pas permis de rassurer les marchés qui craignent des négociations politiques infinies, laissant le pays sans un gouvernement fort capable de prendre les mesures impopulaires nécessaires pour redresser la situation.

Les Bourses européennes et Wall Street ont terminé dans le rouge mercredi, l'annonce du départ prochain de Silvio Berlusconi ne parvenant pas à apaiser les craintes des investisseurs.

Et les mauvaises nouvelles pour l'économie de la péninsule continuent de s'accumuler.

Jeudi matin, l'Institut national des statistiques (Istat) a annoncé que la production industrielle a chuté de 4,8% en septembre, plus que prévu, une donnée qui alimente les craintes de récession de l'économie italienne.

Les taux d'intérêt à un an payés par le Trésor italien ont par ailleurs atteint jeudi le niveau record de 6,087% lors d'une émission obligataire test, contre 3,57% le 11 octobre, même si ceux à 10 ans se sont légèrement détendus, repassant en dessous des 7%.

Cette envolée des taux «aura assez vite des retombées significatives sur les conditions de financement et sur l'économie réelle» a mis en garde jeudi le commissaire européen aux Affaires économiques, Olli Rehn.

Une contagion de la crise à l'Italie, troisième économie de la zone euro dont la dette atteint 1900 milliards d'euros (120% du PIB), et a fortiori à la France, mettrait à genoux l'ensemble de la zone euro.

Le message du FMI, des marchés et de l'Union européenne a été reçu très clairement à Rome où le président de la République, Giorgo Napolitano, personnalité unanimement respectée en Italie, a imprimé une forte accélération au processus politique, dérogeant à toutes les règles jusqu'à présent en vigueur.

«L'Italie fait face à des passages difficiles et à des choix particulièrement délicats pour surmonter la crise. L'Europe attend avec urgence des signaux importants de prise de responsabilité de la part d'un de ses pays fondateurs. Nous serons à la hauteur de la tâche», a déclaré jeudi solennellement M. Napolitano lors d'une cérémonie publique à Rome.

Grâce à l'intervention du chef de l'État, le Parlement italien, réputé pour sa lenteur, a décidé d'adopter en un temps record les mesures d'austérité et de réformes structurelles promises par le pays à l'Union européenne: premier vote attendu vendredi au Sénat, feu vert définitif à la Chambre des députés samedi ou dimanche au plus tard.

Immédiatement à l'issue de ce dernier vote Silvio Berlusconi remettra sa démission.

La presse italienne s'attend à ce que M. Napolitano nomme quasiment dans la foulée l'ex-commissaire européen Mario Monti, après avoir toutefois consulté une dernière fois les principaux dirigeants politiques du pays.

Le chef de l'État pourrait théoriquement aussi dissoudre le Parlement et convoquer de nouvelles élections, mais «la pression des marchés éloigne le vote», estime le Corriere della Sera, quotidien de référence.

La nomination de l'ex-commissaire européen, économiste respecté de 68 ans, viserait à rétablir la crédibilité fortement entamée du gouvernement italien. Reste toutefois pour le chef de l'État à s'assurer qu'il disposera d'une majorité suffisante pour mener à bien sa tâche.