La banque américaine JPMorgan Chase était «tout au centre de la fraude» commise par l'escroc Bernard Madoff et son entière complice, affirme une plainte déposée le 2 décembre par le liquidateur de l'affaire, Irving Picard, et publiée jeudi.

«L'histoire de la manière dont Madoff a trompé les meilleurs et les plus brillants de la communauté financière a été contée maintes fois. L'enquête du liquidateur révèle une histoire très différente, celle d'institutions financières dans le monde qui étaient conscientes d'une probable fraude et ont sciemment décidé de détourner les yeux», explique le texte de la plainte, déposée dans un tribunal fédéral de Manhattan (Southern District of New York).

«Bien que de nombreuses institutions financières aient rendu possible la fraude de Madoff, JPMorgan Chase était tout au centre de cette fraude, et en était entièrement complice», ajoute-t-il.

Le liquidateur de l'affaire Madoff, qui cherche à récupérer les fonds perdus par les victimes de cette gigantesque escroquerie, avait annoncé le 2 décembre qu'il réclamait 6,4 milliards de dollars à JPMorgan Chase, qui fut «pendant 20 ans le principal banquier» de Bernard Madoff.

Pour démontrer que les employés de JPMorgan étaient au courant des activités frauduleuses de «Bernie» Madoff, la plainte, qui cite en prélude Le roi est nu de Hans Christian Andersen, reproduit de nombreux courriels d'employés.

«Je suis en train de déjeuner avec (un employé de JPMorgan au nom non divulgué) qui vient de me dire qu'il y a un gros nuage au-dessus de la tête de Madoff et que ses rendements sont soupçonnés de faire partie d'une fraude pyramidale», dit ainsi un courriel envoyé le 15 juin 2007 par un employé de la division des risques de JPMorgan Chase.

La banque a immédiatement démenti avoir été au courant de la fraude bien avant qu'elle soit révélée au public. «La plainte publiée aujourd'hui par le liquidateur de l'affaire Madoff est sans mérite, et basée sur des distorsions des faits aussi bien que des lois», a-t-elle indiqué dans un communiqué.

«Contrairement aux affirmations du liquidateur, JPMorgan n'était pas au courant de la fraude orchestrée par Bernard Madoff et n'y a pris part en aucune façon», ajoute le communiqué.

La société Madoff «n'était pas un gros client de JPMorgan» et les revenus tirés de son compte étaient «modestes et complètement cohérents avec les taux d'intérêts et les frais» imposés à l'époque sur le marché, ajoute JPMorgan, qui a l'intention de se défendre «vigoureusement».

Bernard Madoff, 72 ans, a été condamné en 2009 à 150 ans de prison pour cette escroquerie, estimée entre 23 et plus de 65 milliards de dollars, selon que l'on compte avec ou sans les intérêts.

Le liquidateur avait indiqué à la mi-décembre avoir récupéré la moitié des sommes investies par les victimes de l'escroc, soit quelque dix milliards de dollars. Il cherche au total à récupérer 50 milliards de dollars.