Lorsque les autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont adopté en 2005 le régime de gouvernance applicable aux sociétés ouvertes canadiennes, elles se sont engagées à le réviser afin qu'il demeure pertinent. En décembre dernier, les ACVM ont proposé des modifications majeures.

Actuellement, les sociétés ont le choix de se conformer ou non aux lignes directrices en vigueur, mais s'ils ne le font pas, ils doivent s'expliquer à leurs actionnaires.

«Bien souvent, les sociétés remettent cela entre les mains d'un expert juridique qui remplit rapidement le formulaire», indique Michel Nadeau, directeur général de l'Institut sur la gouvernance d'organisations privées et publiques.

Neuf principes

Les propositions des ACVM déterminent plutôt neuf larges principes. «Le conseil d'administration devrait prendre chacun des principes, faire un débat et ensuite, dire comment il l'appliquera», ajoute-t-il.

Les grandes nouveautés? D'abord, le principe «Discerner et gérer les conflits d'intérêts».

Il protégerait notamment les actionnaires minoritaires qui pourraient être lésés par l'actionnaire majoritaire dans certaines transactions.

Ensuite «Reconnaître et gérer le risque» dit que la société devrait établir un régime fiable de surveillance et de gestion du risque. Pour sa part, le principe «S'engager auprès des actionnaires» précise que le conseil d'administration devrait se tenir au fait des opinions des actionnaires par les assemblées et par le dialogue continu.

Enfin, les propositions des ACVM revoient le critère d'indépendance des administrateurs en éliminant de nombreuses exclusions, indique Me Sonia J. Struthers, associée, groupe du droit des affaires, chez McCarthy Tétrault.

«La nouvelle proposition indique que l'administrateur doit être ni salarié, ni membre de la haute direction de la société et qu'il n'a pas, ni n'a jamais eu avec la société ou un membre de la haute direction, de relation qui, de l'avis du conseil d'administration pourraient être raisonnablement perçues comme une entrave à l'exercice de son jugement indépendant», explique-t-elle.

Cette proposition n'exclut donc pas que les actionnaires importants de la société puissent siéger au conseil d'administration tout en étant qualifiés d'indépendants.

Une bonne chose?

Michel Nadeau croit que cette nouvelle définition de l'indépendance des administrateurs tient davantage compte de la particularité du Canada où de nombreuses grandes entreprises appartiennent à des familles.

«Ce serait déraisonnable de croire que ces familles n'ont pas un rôle important à jouer dans le conseil d'administration de leur entreprise. Ces familles ne laisseront quand même pas des gens qui n'ont aucun intérêt dans la compagnie décider pour eux.»

L'élimination des règles pour passer à de grands principes est aussi une bonne chose, selon lui. «Le fait que le CA devrait réfléchir à chaque principe serait probablement beaucoup plus profitable que la façon de faire actuelle.»

Pour sa part, Luc Villeneuve, président de l'Institut des administrateurs de sociétés - section Québec et président de Samson Bélair Deloitte & Touche au Québec, voit beaucoup de subjectivité dans ces principes.

«Ce qui est bien, c'est que les principes pourraient être interprétés en fonction des particularités des entreprises, mais encore faudra-t-il que ces principes soient mis à l'épreuve. D'un autre côté, bien des entreprises trouvent que des règles claires sont plus faciles à suivre. Chose certaine, si ces principes sont adoptés, ce sera tout un changement de culture pour les entreprises.»

Les ACVM veulent communiquer une série d'intentions à l'industrie d'ici la fin de l'année. Mais les nouvelles ne seront pas annoncées avant 2010.