La relance de la mine d'amiante Jeffrey serait en péril. Selon ce qu'a rapporté Amir Khadir vendredi, la Caisse Desjardins aurait récemment refusé de financer le projet de Balcorp.

«Nous avons appris de source sûre que le projet de Balcorp est vraiment devant un cul-de-sac financier insurmontable. Aucune institution financière ne s'engagerait à accorder un prêt», a ajouté le député de Québec solidaire.

Le pdg de la société, Baljit Chada, a refusé de répondre à nos questions. Il nous a référé à son porte-parole, Guy Versailles. «On ne fera pas de commentaire sur le sujet», a réagi M. Versailles.

Malgré les avertissements de 18 directeurs régionaux de la santé publique, Québec s'est engagé l'année dernière à offrir une garantie de prêt de 58 millions $ à Balcorp pour relancer la mine Jeffrey, à Asbestos. Mais avant de la recevoir, la société devait d'abord obtenir un financement privé de 25 millions $.

Ses démarches sont laborieuses. Pour recevoir la garantie de prêt, Balcorp devait avoir complété son montage financier le 1er juillet. Québec a repoussé trois fois cette échéance: du 1er juillet 2011 au 15 août, puis au 1er octobre 2011.

En septembre dernier, M. Chada assurait au Globe & Mail est sur le point d'obtenir ce 25 millions $. Mais il cherche encore cet argent.

Peu après la précédente date butoir, le 2 octobre, le ministre du Développement économique, Sam Hamad, espérait que le dossier soit réglé avant Noël.

M. Versailles a refusé de nous dire quelle était la nouvelle date butoir. «On veut faire ça le plus rapidement possible», a-t-il indiqué.

Au cabinet du ministre Hamad, on indique qu'il ne s'agissait pas d'une échéance pour le financement, mais plutôt de dates limites pour obtenir différentes informations. Deux conditions demeurent pour l'octroi de la garantie de prêt, explique l'attaché de presse de M. Hamad, Harold Fortin: le financement préalable de 25 millions $ et un «audit externe» qui prouvera que l'amiante produite à la mine Jeffrey sera utilisée de façon sécuritaire, au Québec ou ailleurs comme en Inde, le marché visé par M. Chada.

Difficile à vérifier en Inde

Québec solidaire, Option nationale et les indépendants souverainistes ont récemment accusé le gouvernement Charest «d'exporter la mort» en participant à la relance de la mine. Le PQ n'a pas pris position - il dit qu'il manque d'information pour se prononcer et réclame donc une commission parlementaire.

M. Khadir s'inquiète des dangers de l'amiante pour la santé publique (lire notre dossier ici). Il ne croit pas que l'audit permettra de vérifier si l'amiante sera utilisée de façon sécuritaire dans un pays aussi vaste que l'Inde, surtout que son utilisation sera faite dans plusieurs constructions résidentielles, pour les toitures en ciment ondulé. Il rappelle aussi que des syndicats indiens s'opposent à l'utilisation de l'amiante.

Mais il indique qu'à lui seul, le «manque» de valeur économique du projet mériterait son abandon.  «Ça ne tient pas la route», soutient-il. Balcorp ne fournirait pas assez de capitaux pour mériter une garantie de prêt. «Habituellement, on demande des fonds propres à hauteur de 50%, 60%. Là, on parle de fonds moins de 25 % du total du projet», affirme-t-il.

La détresse de la région

En août 2009, Baljit Chada a organisé à sa résidence de Westmount une activité de financement pour le PLQ, à laquelle le premierministre Jean Charest participait. Il a amassé 19 000$. «Ce n'est pas central à cette décision», estime toutefois M. Khadir. Il croit plutôt que le ministre et député de Richmond, Yvon Vallières, ainsi que le ministre des Affaires municipales et ancien maire de Thetford Mines, Laurent Lessard, ont été sensibles à la «détresse de la région», qui mise sur les 500 emplois directs qui, selon Balcorp, seraient créés à terme par la relance de la mine. M. Khadir leur demande toutefois d'utiliser l'argent pour financer un autre genre de projet. Selon lui, le gouvernement Charest devrait donc cesser de repousser l'échéance et retirer son offre de garantie de prêt.