Les allégations d'agression sexuelle qui pèsent contre l'ex-député libéral Gerry Sklavounos ont créé une onde de choc qui a continué à se répercuter au parlement mardi, alors que les libéraux tentaient de prendre leurs distances de leur ancien collègue.

Chassé du caucus libéral jeudi dernier, le principal intéressé, député de Laurier-Dorion depuis 2007 et devenu depuis indépendant, était absent de l'Assemblée nationale, mais le malaise est toujours palpable dans les rangs libéraux.

Lors d'une brève mêlée de presse, le ministre Laurent Lessard a dit n'avoir «aucune souvenance» d'une plainte de harcèlement sexuel formulée envers M. Sklavounos par le gouvernement péquiste en 2013, au moment où M. Lessard était whip du caucus libéral, alors dans l'opposition.

Les péquistes soutiennent pourtant que le whip du gouvernement Marois, Marjolain Dufour, avait porté plainte à M. Lessard, pour dénoncer le comportement de M. Sklavounos envers une attachée de presse de l'équipe gouvernementale. Les péquistes en concluent que les libéraux étaient au courant depuis longtemps des comportements discutables du député de Laurier-Dorion.

M. Lessard a dit pourtant ne pas se rappeler que ces événements aient été portés à son attention, à l'époque.

Le leader du gouvernement, Jean-Marc Fournier, a dit lui aussi qu'il n'avait «aucune idée» des événements auxquels on faisait référence.

Le chef de l'opposition officielle, Jean-François Lisée, a parlé d'une «culture de l'hypocrisie», surpris d'apprendre que les libéraux n'avaient jamais entendu parler de la réputation «sulfureuse» que traînait depuis des années, selon lui, M. Sklavounos en relation avec les femmes.

M. Lisée a par ailleurs réaffirmé que la police devrait informer le chef du parti au pouvoir lorsqu'un député fait l'objet d'une enquête, parce que les élus doivent «être au-dessus de tout soupçon».

Se réclamant de la séparation des pouvoirs, la Coalition avenir Québec a tenté en vain de déposer une motion proclamant au contraire que la police n'avait pas à fournir ce genre d'informations.

En Chambre, le premier ministre Philippe Couillard, qui avait déclaré vendredi n'avoir été au courant de rien avant que l'affaire Sklavounos éclate au grand jour, s'est encore dit mardi «profondément ébranlé» par les allégations visant son ancien député, exprimant toute sa compassion envers la victime alléguée, Alice Paquet, qui prétend avoir été violée par l'élu de Laurier-Dorion en 2014.

Le premier ministre n'a pas dit un mot pour se porter à la défense de son ancien député, qui ne fait l'objet d'aucune accusation.

La ministre de l'Accès à l'information, Rita de Santis, a convenu quant à elle que l'Assemblée nationale n'était pas un endroit exempt de sexisme et de propos déplacés à caractère sexuel envers les femmes.

«Il y a certaines remarques qui ne sont pas appropriées» au parlement, selon la ministre. Elle encourage les femmes qui s'estiment victimes de propos ou gestes déplacés à se prévaloir de la nouvelle politique gouvernementale contre le harcèlement sexuel.

Mais sa collègue responsable de la Condition féminine, Lise Thériault, a prétendu exactement le contraire, n'ayant observé aucun commentaire ou geste déplacé autour d'elle dans les couloirs du parlement.

«Moi, j'ai pas constaté ça. Je pense que dans ma gang de collègues, honnêtement, je peux pas dire que je suis témoin de propos qui est déplacé», a-t-elle commenté, en ajoutant que les femmes qui se sentaient lésées ne devaient pas hésiter à porter plainte.

La députée solidaire de Gouin, Françoise David, croit qu'une solution au problème serait d'offrir à tous les élèves québécois des cours d'éducation sexuelle. C'est ce qu'elle a réclamé en Chambre au premier ministre Couillard, qui s'est dit «tout à fait favorable avec le principe», sans pour autant s'engager à rien.

Des projets pilotes d'éducation sexuelle ont cours présentement dans une quinzaine d'écoles.

Jusqu'à jeudi dernier, M. Sklavounos était le leader adjoint du gouvernement. C'est le député de Lafontaine, Marc Tanguay, qui lui succédera.