Le Commissaire à l'éthique de l'Assemblée nationale ouvre une enquête sur le président du Conseil du trésor, Sam Hamad, à la demande de l'opposition et du ministre lui-même.

Jacques Saint-Laurent fera ainsi la lumière sur les agissements de M. Hamad entourant l'octroi de subventions à Premier Tech de Rivière-du-Loup, en 2012. Le vice-président du conseil d'administration de l'entreprise était l'ancien ministre libéral Marc-Yvan Côté jusqu'au 17 mars dernier, jour de son arrestation par l'UPAC dans une affaire de complot, fraude et corruption.

Des courriels dévoilés par l'émission Enquête de Radio-Canada jeudi suggèrent que M. Hamad a fourni des informations privilégiées à M. Côté, selon ce dernier. Le ministre aurait également multiplié les démarches auprès de ses collègues du cabinet et d'Investissement Québec pour aider cette entreprise à obtenir un coup de pouce de l'État. Radio-Canada a également souligné que les dirigeants de Premier Tech ont versé 20 000 $ au PLQ entre 2008 et 2012. L'entreprise a réagi en disant que ces contributions ont été faites en respect de la loi.

MM Hamad et Côté se connaissent depuis longtemps. Ils ont tous deux travaillé pour la firme de génie-conseil Roche (aujourd'hui Norda Stelo). Cette firme est au coeur de la frappe menée par l'UPAC en mars.

Vendredi, Sam Hamad a envoyé une lettre au commissaire Jacques Saint-Laurent pour lui demander de faire « toutes les vérifications nécessaires » au sujet des révélations de Radio-Canada et lui offrir sa collaboration. Il entend toutefois demeurer en poste, comme président du Conseil du trésor. Il a qualifié le reportage de « pétard mouillé » et s'est dit sans reproche.

Le Parti québécois et la Coalition avenir Québec ont aussi écrit au commissaire Jacques Saint-Laurent pour qu'il déclenche une enquête. Les deux partis sont insatisfaits des explications de Sam Hamad.

En parlant de « pétard mouillé », le président du Conseil du trésor a fait preuve de « désinvolture », a dit le député péquiste et leader parlementaire de l'opposition officielle, Bernard Drainville. « M. Hamad ne réalise pas la gravité des soupçons qui pèsent sur lui et des révélations qui ont été faites. »

« De toute évidence, Sam Hamad est dans le déni », a soutenu de son côté Éric Caire.

La situation de M. Hamad est intenable aux yeux de l'opposition. Le président du Conseil du trésor n'a plus la crédibilité nécessaire pour octroyer des contrats ou encore mettre en oeuvre les recommandations de la commission Charbonneau. 

Cette affaire est un « test » pour le premier ministre, ajoutent le PQ et la CAQ. Philippe Couillard doit retirer M. Hamad du conseil des ministres et du caucus libéral le temps que le Commissaire à l'éthique fasse la lumière dans le dossier.

« Sa gestion de l'affaire Hamad est un test pour Philippe Couillard quant à sa volonté de renouveler le Parti libéral. Si Philippe Couillard prétend qu'il dirige un nouveau Parti libéral, bien là, il a le test parfait pour le prouver, il a l'occasion idéale pour démontrer que le Parti libéral qu'il dirige, ce n'est pas le même vieux Parti libéral qui existait sous Jean Charest », a affirmé M. Drainville. Si le premier ministre n'exclut pas Sam Hamad de son cabinet, « ça envoie un message que l'éthique et l'intégrité, ce n'est pas très, très important pour lui, et que ça a à peu près la même importance que ça en avait pour Jean Charest ».

De son côté, Éric Caire a rappelé que Philippe Couillard a promis un gouvernement « éthiquement et moralement irréprochable ». « Le seul geste décemment possible dans les 24 prochaines heures » de la part du premier ministre est de suspendre M. Hamad du cabinet. « Philippe Couillard a devant lui un vrai premier gros test en matière d'éthique, en matière de morale, parce qu'un de ses ministres, et un de ses ministres seniors, un de ses ministres importants, un de ses alliés à la course au leadership (du PLQ) fait l'objet d'allégations extrêmement graves. On verra comment il va se comporter. Sera-t-il le chef du Parti libéral, l'ami de Sam Hamad ou sera-t-il le premier ministre de tous les Québécois? » a-t-il lancé. « Si Philippe Couillard ne pose pas le seul geste décemment possible dans les prochaines 24 heures, suspendre Sam Hamad du Conseil des ministres, ce sera un échec lamentable, et tout le discrédit sera jeté sur son Conseil des ministres et son gouvernement. »

Mais le premier ministre s'est refusé à tout commentaire jusqu'ici.