Pour que Philippe Couillard parle de laïcité lors de la prochaine campagne électorale, il faudra lui poser des questions. Il espère en parler le moins possible. «Ils ne nous trouveront pas beaucoup sur ce terrain-là», a prévenu le chef libéral lors du caucus de précession de son parti à Saint-Félicien.

Et si on lui pose une question, il sera laconique. «Notre réponse sera: vous connaissez notre position, elle est là, aujourd'hui on vient parler des emplois», a-t-il annoncé.

Deux «modèles de société» s'offriront aux électeurs lors de la prochaine campagne électorale, croit M. Couillard: les libéraux qui «parlent avant tout d'économie et d'emploi», et les péquistes qui «divisent» avec leur Charte de la laïcité.

En fait, le chef libéral ne se gênera pas pour demander au gouvernement péquiste combien d'enseignants, d'éducatrices ou d'infirmières perdraient leur emploi à cause de la charte. Un projet qui est selon lui basé sur une attitude «de peur, de retrait, d'assiégés, comme si le monde entier nous en veut». Il sera  seulement moins enthousiaste à défendre sa position sur la laïcité. Pour lui, le port de signes religieux est une «question théorique», et même un faux problème. Il propose d'interdire le tchador et le voile intégral aux employés en position d'autorité, mais il s'empresse de préciser qu'aucun tel cas n'existe.

Tout en voulant affirmer la neutralité religieuse de l'État, M. Couillard veut maintenir le crucifix au Salon bleu. «C'est cohérent avec le reste de notre position», assure-t-il.

Selon M. Couillard, le dossier est lié à l'économie. «Quand les personnes font des choix d'investissement, il y a des multitudes de facteurs qui entrent en compte», dit-il. Ces facteurs: la taxation, le fardeau administratif et «la façon dont la diversité est gérée». Pour attirer les investisseurs, il faudrait que la diversité soit «un actif pour la société», et non pas «une source de tensions».

«On n'est pas en Europe», lance-t-il, en faisant allusion au modèle français de laïcité. «Les sociétés nord-américaines sont par nature ouvertes, ajoute-t-il. La nôtre devient de plus en plus ouverte.»

Protéger les alumineries

M. Couillard se réjouit de l'aide accordée à la société espagnole FerroAtlantica, mais il se demande pourquoi Alcoa ne reçoit pas le même genre de traitement.

«Je trouve cela assez particulier (...) On veut acheter des meubles neufs, mais la maison brûle», dénonce-t-il.

À Davos, la première ministre Pauline Marois a accordé un congé fiscal de 10 ans et un rabais sur l'énergie pour attirer au Québec le premier producteur mondial de silicium. Il s'agit d'un investissement de 375 millions de dollars qui créera 300 emplois.

Pendant ce temps, il n'y a aucune entente avec Alcoa. L'automne dernier, l'aluminerie envoyait un préavis officiel pour réduire son approvisionnement en hydro-électricité. Les libéraux craignent le pire pour les trois usines au Québec (Baie-Comeau, Bécancour et Deschambault) et leurs quelque 3500 emplois. «Je crois que le ton est très alarmiste, inutilement. Nous sommes en discussions avec Alcoa, et ce, au plus haut niveau», avait alors dit Mme Marois.

Alcoa, le plus gros client d'Hydro-Québec (facture de 350 millions de dollars par année), veut payer moins pour son électricité. Elle jouit actuellement d'un tarif préférentiel de 3 cents/kWh. Hydro-Québec veut les porter à plus de 4 cents/kWh, soit le tarif L, quand son contrat devra être renouvelé d'ici la fin de l'année. Alcoa demande un gel.

Les discussions se poursuivent, indique-t-on simplement au cabinet du ministre des Finances.

M. Couillard ne demande pas forcément qu'on accorde à Alcoa le même rabais qu'à FerroAtlantica, soit environ 20% de moins que le tarif L. Mais il veut qu'on utilise la «même approche».