Le gouvernement Marois soutenait qu'il voulait bouger rapidement dans le sens des recommandations du rapport D'Amours, déposé le printemps dernier. Six mois plus tard, il est clair que les coûteuses propositions du comité soulèvent des inquiétudes chez des élus susceptibles de se retrouver bientôt en élection. Le rapport est donc repoussé aux calendes grecques.

La commission parlementaire des finances accordera un enterrement de première classe aux recommandations d'Alban D'Amours, ancien patron du Mouvement Desjardins. Dans leur rapport, qui doit être déposé aujourd'hui, les partis demandent «des études et encore des études», a confié une source proche de ces délibérations. Tout le monde affirme qu'il veut bouger compte tenu de l'urgence de la situation, mais comme personne ne veut vendre une hausse de cotisations pour les employeurs et les salariés, rien ne sera fait avant les prochaines élections.

«Entente de longévité»

Au coeur du rapport D'Amours, une nouvelle «entente de longévité», une prestation pour tous les salariés de plus de 75 ans. Cette mesure nécessiterait une augmentation de 3,3% des cotisations sur la masse salariale - un effort partagé également entre salariés et employeurs. Son impact sur l'économie serait important, se sont fait rappeler les députés en commission parlementaire. Il en coûterait jusqu'à 320 millions de plus par année au gouvernement. Pour les salariés et leurs employeurs, la facture pourrait atteindre 1,2 milliard. Ce fardeau représente une ponction de 0,6 à 0,8% du PIB.

Le rapport d'Amours portait sur un constat inquiétant. De 2007 à 2012, les déficits cumulés des régimes de retraite sont passés de 4,5 à 40,6 milliards. Pas moins de 30% des salariés - plus d'un million de personnes - n'ont aucune couverture et 18% n'ont qu'un REER, et la moitié d'entre eux n'ont pas une couverture suffisante pour les mettre à l'abri de la pauvreté.

Autre impact détestable de cette rente de longévité: elle réduirait les prestations de supplément de revenus pour la vieillesse pour ces retraités.

Pousser la réflexion plus loin

Une seule des 21 recommandations du rapport passera comme une lettre à la poste: la mise en place d'un régime volontaire d'épargne retraite. Le gouvernement Charest avait déjà beaucoup cheminé dans cette direction; l'adoption d'un projet de loi, calqué sur celui du Parti libéral du Québec, est désormais une formalité.

Pour le reste, c'est une autre paire de manches. La ministre Agnès Maltais, responsable du dossier, s'était pourtant engagée à aller rapidement de l'avant au moment du dépôt du rapport. En coulisse, au gouvernement, on prévenait déjà que le gouvernement Marois serait réticent devant ce rapport que le gouvernement précédent avait demandé. «Le gars qui a commandé la pizza est parti», résumait-on.

Mme Maltais avait par la suite indiqué que la préparation d'un projet de loi devrait attendre le dépôt du rapport de la commission parlementaire, aujourd'hui. Or, le rapport de la commission se contente de proposer que l'on pousse plus loin la réflexion, qu'on fasse davantage d'études avant de faire quoi que ce soit. Du côté des parlementaires, on a vite compris: il ne se passera rien avant les prochaines élections.

Dans le rapport de la commission, où le gouvernement est majoritaire, on préconise davantage d'études sur l'impact de la «rente de longévité», qui laisse notamment perplexes les employeurs.

Bien des syndicats ont soutenu que la rente de longévité pouvait être la solution idéale, «mais c'est aussi celle qui coûte le plus cher». Par conséquent, il vaudrait mieux se contenter de bonifier le régime de la Régie des rentes - la voie préconisée par les syndicats.