Une entreprise de la région de Montréal propose une méthode révolutionnaire pour s'attaquer à la grave crise du logement qui frappe les peuples autochtones dans le nord du pays : transporter des maisons préfabriquées dans des usines du Québec ou ailleurs dans les communautés éloignées à l'aide d'un dirigeable cargo.

LTA Aérostructures, qui ouvrira son usine de 60 millions de dollars à la mi-2018 à Mirabel afin de construire quelque 200 dirigeables capables de transporter jusqu'à 70 tonnes métriques de fret, estime être en mesure de livrer ainsi 2500 nouvelles maisons de 1600 pieds carrés par année, à partir de 2019, dans des endroits qui sont souvent inaccessibles par route ou par avion.

Mieux encore, ces nouveaux logements meublés pourraient être habitables rapidement, une fois installés sur leurs fondations, et ils pourraient coûter 50% moins cher au gouvernement fédéral que la méthode traditionnelle de construire des maisons sur les lieux, a affirmé hier devant un comité du Sénat Michael Dyment, président et chef de la direction de LTA Aérostructures, une entreprise formée d'un consortium de plusieurs géants de l'aéronautique du monde. À lui seul, l'envoi des matériaux dans le Nord coûte une fortune, et la livraison peut prendre des mois.

«C'est une approche plutôt radicale pour régler ce problème de logement», a reconnu le PDG Michael Dyment. «Mais nous sommes en mesure de livrer ces maisons en un seul morceau. Ces maisons pourront déjà être munies d'appareils électriques. Cela représente un potentiel d'innovation énorme pour le pays, non seulement pour l'utilisation des dirigeables, mais pour l'habitation dans l'Arctique. Elles pourront être construites en fonction des demandes et des besoins des diverses communautés. Cela va permettre d'améliorer la qualité de vie de ces gens.»

Voilà près de deux ans et demi que le comité sénatorial permanent des peuples autochtones se penche sur la crise du logement qui afflige les communautés autochtones un peu partout au pays. Le comité a entrepris cette étude après que le rapporteur spécial des Nations unies sur les peuples autochtones, James Anaya, eut vivement dénoncé leurs conditions de vie au Canada, notamment la surpopulation dans des logements qui sont en piètre état dans les réserves autochtones.

«Il arrive souvent que jusqu'à 18 personnes s'entassent dans un petit bungalow. L'état lamentable des maisons existantes dans de nombreuses collectivités est tout aussi troublant.» Dans bien des cas, des matériaux de construction de piètre qualité ont été utilisés pour construire ces logements, et il n'existe pas de codes de bâtiment obligatoires.

Dans son premier budget, le gouvernement Trudeau a confirmé son intention d'investir quelque 8,4 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années pour améliorer les conditions de vie des peuples autochtones. Une bonne partie de cette somme servira à offrir de meilleurs services d'éducation. Mais Ottawa compte investir plus de 550 millions, durant les deux prochaines années, pour répondre aux besoins en matière de logement - «une première étape».

LTA Aérostructures compte vendre son service de transport aux gouvernements et à d'autres entreprises à un taux horaire, hebdomadaire, mensuel ou annuel, ou encore en fonction du poids et de la distance parcourue, selon les exigences des clients.

M. Dyment a précisé avoir rencontré des leaders des communautés autochtones qui se sont montrés intéressés par ce projet. Il a aussi rencontré récemment des hauts fonctionnaires de 22 ministères et agences fédérales qui seront appelés à jouer un rôle dans la volonté du gouvernement Trudeau de rebâtir des relations de nation à nation avec les peuples autochtones.

D'ailleurs, LTA Aérostructures compte embaucher et former des travailleurs autochtones pour piloter les dirigeables qui compteront un équipage de 40 membres et en assurer l'entretien. «Nous n'allons pas recruter nos pilotes à Miami Beach. Nous allons les recruter dans les diverses communautés et les former à Montréal», a lancé M. Dyment.

Au départ, LTA Aérostructures comptait offrir ses services de transport aux entreprises minières, pétrolières ou gazières pour qu'elles puissent transporter de l'équipement lourd sur les lieux d'exploitation sans avoir à construire de nouvelles routes à fort prix. Le gouvernement du Québec a décidé d'investir dans cette entreprise en 2014 dans le but de réduire les coûts liés à la mise en oeuvre de son Plan Nord.

«Notre principal marché est celui des mines, du gaz et du pétrole. Mais au cours des 18 derniers mois, nous avons conclu qu'il est possible d'utiliser cette merveilleuse technologie pour s'attaquer à un problème grave qui afflige les Premières Nations, les Inuits et les Métis», a dit M. Dyment.