Le gouvernement fédéral a annoncé près de 1 milliard de dollars de subventions, contrats et autres contributions financières depuis lundi, alors que l'on atteint aujourd'hui la marque des 100 jours avant les élections fédérales du 19 octobre.

Cet «été des annonces» est dénoncé par les partis de l'opposition comme une utilisation éhontée des fonds publics pour permettre au Parti conservateur d'«acheter» des votes. Le lieutenant québécois de Stephen Harper, Denis Lebel, rejette cette accusation.

«Il n'y a aucune stratégie là-dedans. Au contraire, plus on en aura d'annoncé, plus on aura démontré qu'on a fait notre travail», a affirmé le ministre Lebel, qui est aussi responsable du portefeuille fédéral des Infrastructures et de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec.

La Presse a calculé que des ministres et députés conservateurs ont fait près de 100 annonces d'aide financière aux quatre coins du pays cette semaine. Elles portent sur une série de contributions qui vont des subventions pour la construction d'infrastructures communautaires au financement de la réfection de ports ou de manèges militaires, en passant par des prêts remboursables à des PME et des contrats de réfection de bateaux de la Garde côtière. Elles s'inscrivent dans le cadre de divers programmes fédéraux, comme le Fonds des petites collectivités ou le Nouveau Fonds Chantiers Canada.

À titre de comparaison, pour la même période en 2014, soit pour la semaine du 7 au 11 juillet, Ottawa avait procédé à environ 30 annonces pour un total de 240 millions de dollars. C'est près de quatre fois moins que les 900 millions annoncés en cinq jours cette semaine, de lundi à vendredi.

Et pour donner une idée de ce que représentent 1 milliard de dollars pour le gouvernement canadien, le surplus annoncé en grande pompe dans le dernier budget fédéral était de 1,4 milliard.

Plusieurs autres à venir

Or, le ministre Lebel ne s'en cache pas: plusieurs annonces du même genre devraient être faites au cours des prochaines semaines, tandis que plusieurs programmes fédéraux sont mûrs pour distribuer des fonds. De nombreux avis aux médias ont d'ailleurs été diffusés en fin d'après-midi hier pour les convier à de telles cérémonies lundi.

«Le nouveau plan d'infrastructures est en place depuis le 1er avril 2014. Le temps de déposer des dossiers et de les analyser, il est normal que, cet été, on ait énormément de dossiers à annoncer», a précisé Denis Lebel. Ce plan sur 10 ans est d'une valeur de 14 milliards.

Le nouveau Programme d'infrastructure communautaire de Canada 150, annoncé en mai, est dans une position semblable. Ottawa n'a laissé qu'environ un mois aux provinces et aux municipalités pour qu'elles soumettent leurs projets. Le programme de deux ans dispose d'une enveloppe de 150 millions afin d'améliorer l'état des infrastructures du pays en vue du 150e anniversaire de la Confédération, en 2017.

«J'espère qu'on va avoir des annonces cet été, mais maintenant, ce sont les fonctionnaires qui font le travail actuellement», a déclaré M. Lebel au sujet de ce programme surnommé PIC150.

«Oui, on va continuer à faire notre travail de gouvernement, a conclu le ministre. Évidemment, la période électorale va arrêter toute annonce. Mais avant, il y a des gens qui ont hâte qu'on présente le projet sur lequel on a travaillé avec eux.»

«Acheter des votes»

Ces dépenses des fonds publics attirent de nombreuses critiques des partis de l'opposition: ils ont gelé «tous leurs programmes jusqu'à la toute fin pour pouvoir faire un été d'annonces», a accusé le député libéral Stéphane Dion.

Le 19 octobre marquera les premières élections fédérales à date fixe de l'histoire canadienne et l'une des critiques le plus fréquemment formulées à l'égard de ce type d'élections est qu'elles augmentent l'utilisation de fonds publics à des fins électorales dans les mois et les semaines qui précèdent le jour du scrutin.

«C'est de la très mauvaise gestion des fonds publics canadiens, [ce financement] est subordonné à la réélection du gouvernement et c'est crassement électoraliste», a ajouté M. Dion.

La frustration du député libéral trouve écho chez plusieurs de ses collègues des autres partis de l'opposition. «C'est incroyable, mais pas vraiment surprenant... Les conservateurs font tout ce qu'ils peuvent pour sauver les meubles et ils achètent des votes comme ils peuvent!», a lancé le député du NPD Guy Caron.

«Au Bloc, nous avons confiance en l'intelligence des Québécois, qui ne se feront pas duper par des cadeaux à saveur électoraliste», a tranché l'attaché de presse du chef Gilles Duceppe, Mathieu Renaud St-Amand.