L'opposition à Ottawa doute de plus en plus du sérieux du ministre Christian Paradis dans le dossier de la langue de travail au Québec. En novembre dernier, le ministre a annoncé la mise sur pied d'un comité pour se pencher sur la situation du français dans les entreprises québécoises sous réglementation fédérale. Plus de six mois plus tard, toujours rien. Pas de mandat, pas de budget, pas de président, pas de comité.

Au bureau du ministre Paradis, on reprend le même prétexte que la dernière fois que le retard avait été souligné. «Notre gouvernement prend ce comité très au sérieux. Voilà pourquoi la composition et le mandat du comité seront dévoilés au terme d'une démarche sérieuse et réfléchie», écrit dans un courriel l'attachée de presse du ministre de l'Industrie, Alexandra Fortier.

En novembre, la personne qui a précédé Mme Fortier au même poste promettait que la composition exacte du comité consultatif serait annoncée avant le congé de fin d'année 2011. Elle promettait aussi que l'éventuel rapport de ce comité serait rendu public.

L'automne dernier, au Québec, les manchettes soulignaient la présence d'unilingues anglophones dans des postes de direction de banques à Montréal. Le secteur banquier n'est pas soumis à la Chartre de la langue française puisqu'il relève du gouvernement fédéral.

À Ottawa, au même moment, le gouvernement conservateur s'était retrouvé face à un projet de loi néo-démocrate qui aurait imposé le français comme langue de travail dans les entreprises sous juridiction fédérale au Québec, tout en offrant quelques exceptions dans certains cas. Les conservateurs avaient défait ce projet de loi et le ministre Paradis avait annoncé son comité qui allait, disait-il, «évaluer si un problème existe au niveau de la langue française au sein des entreprises privées qui opèrent dans la sphère fédérale».

«Pour moi ça a toujours été de la poudre aux yeux, dit le bloquiste André Bellavance. Le ministre Paradis avait annoncé ça, j'ai l'impression, de façon improvisée pour pelleter en avant. On voit que le pelletage en avant continue et ils n'ont nullement l'intention de se pencher sur cette question-là.»

Le député néo-démocrate Robert Aubin interprète aussi les six mois d'attente comme une preuve que cette question n'intéresse pas les conservateurs. «Je ne crois pas qu'ils aient vraiment l'intention de s'y attaquer», a dit M. Aubin au cours d'une entrevue téléphonique, vendredi.

Il s'est donné pour tâche de réclamer des comptes sur ce dossier au ministre Paradis une fois par mois.

La dernière fois, c'était le 24 avril. Lorsque le député Aubin a interpellé le ministre en chambre, Christian Paradis est resté assis. C'est la ministre du Travail, Lisa Raitt, qui s'est levée à sa place. «Le ministre de l'Industrie a annoncé la création d'un comité qui se penchera sur la question, et nous avons hâte de connaître ses conclusions», a-t-elle dit.